Une politique ESG des commerces, illusion ou nécessité?

Publié le 15/05/2024 à 10:55, mis à jour le 15/05/2024 à 10:55

Une politique ESG des commerces, illusion ou nécessité?

Publié le 15/05/2024 à 10:55, mis à jour le 15/05/2024 à 10:55

La Boulangerie Première Moisson est un exemple de politique ESG réussie. (Photo: courtoisie)

EXPERT INVITÉ. Dernièrement, j’ai eu le plaisir d’assister à une réunion où une dizaine de commerçants québécois débattaient de l’utilité de mettre en œuvre une politique environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) au sein de leurs entreprises. Force était de constater que les avis divergeaient et que le consensus en fin de rencontre n’est jamais arrivé. 

Au Québec, comme ailleurs, l’intégration des considérations ESG dans le secteur du commerce de détail peut être à la fois perçue comme une illusion et une nécessité, mais il y a des nuances spécifiques à considérer.

D’une part, le Québec, en tant que société généralement progressiste sur les questions environnementales et sociales, voit de plus en plus de consommateurs sensibilisés à ces enjeux. Cela signifie que les entreprises de détail qui ignorent ces considérations risquent de perdre la confiance et le soutien de leur clientèle.

D’autre part, il est vrai que certaines entreprises pourraient simplement se livrer à de l’écoblanchiment ou à des actions superficielles pour répondre aux attentes sans véritable engagement envers la durabilité ou la responsabilité sociale. Dans ce cas, l’intégration de politiques ESG pourrait plus ressembler à une illusion destinée à améliorer l’image de marque plutôt qu’une réelle volonté de changement. 

Cependant, la pression réglementaire et la demande croissante des consommateurs pour des produits et des services responsables sont des facteurs qui poussent les entreprises québécoises du commerce de détail à prendre au sérieux ces enjeux. Les investisseurs institutionnels et les organismes de régulation financière peuvent également exercer des pressions pour que les entreprises intègrent ces considérations dans leurs stratégies.

Dans l’ensemble, bien que certains pourraient encore considérer l’ESG comme une illusion dans le commerce de détail au Québec, la tendance générale indique qu’il devient de plus en plus une nécessité pour les entreprises de s’engager sérieusement dans des pratiques durables et socialement responsables pour rester compétitives et pertinentes sur le marché. Tout cela sans compter les répercussions réelles que les détaillants peuvent avoir sur l’environnement, car le secteur vivra aussi avec les répercussions environnementales telles que les changements climatiques, comme en faisait foi mon dernier article de blogue.

 

Le cas Première Moisson

Intéressons-nous maintenant à un exemple réussi d’ESG dans le commerce de détail de taille moyenne au Québec comme celui de la société Boulangerie Première Moisson. 

Considérations environnementales: Première Moisson met l’accent sur la durabilité environnementale en adoptant des pratiques responsables dans la production de ses produits. La société utilise des ingrédients biologiques et locaux autant que possible, réduisant ainsi son empreinte carbone. De plus, elle a mis en place des initiatives de réduction des déchets et de recyclage dans ses opérations. 

Considérations sociales: L’entreprise accorde une grande importance au bien-être de ses employés et des communautés dans lesquelles elle opère. Elle offre des conditions de travail équitables, des salaires compétitifs et des avantages sociaux à ses employés. Première Moisson s’implique également dans des initiatives sociales locales, telles que des programmes de lutte contre l’insécurité alimentaire et des dons à des organisations caritatives.

Gouvernance: Première Moisson a le souci de maintenir une gouvernance d’entreprise transparente et responsable en ayant pris un engagement d’intégrité et d’éthique dans toutes ses opérations. Son conseil d’administration surveille activement les pratiques commerciales de l’entreprise pour garantir qu’elles sont alignées sur des normes éthiques élevées. De plus, elle publie régulièrement des rapports sur sa performance ESG pour assurer la transparence et la responsabilité envers ses parties prenantes.

Cet exemple démontre comment une entreprise de taille moyenne dans le commerce de détail au Québec peut intégrer avec succès les principes d’ESG dans ses opérations commerciales, ce qui peut non seulement renforcer sa réputation et sa durabilité à long terme, mais aussi avoir un effet positif sur l’environnement, la société et la gouvernance.

Ce type de politique nous semble parfois limitée par le fait que 85% des commerces de la province ont moins de 25 employés, mais c’est faux. En intégrant les principes ESG dans leurs opérations, les petites entreprises peuvent aussi renforcer leur réputation, attirer les clients sensibles aux enjeux sociaux et environnementaux et potentiellement accéder à de nouveaux marchés et à des sources de financement.

À propos de ce blogue

Damien Silès est directeur du Conseil québécois du commerce de détail depuis janvier 2023. Doté d’une solide formation en commerce international, Damien Silès occupait depuis 2014 le poste de directeur général du Quartier de l’innovation de Montréal. Il a auparavant été, pendant six ans, directeur général de la Société de développement social de Ville-Marie, premier courtier social en Amérique du Nord, qu’il a fondée en 2008. L’action qu’il a menée à la barre de cet organisme a été saluée par les médias et lui a valu d’être nommé à deux reprises Personnalité de la semaine La Presse-Radio-Canada (février 2011 et juin 2013). De 2002 à 2008, il a également été directeur du membership et des ventes à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, poste qui lui a permis de tisser de solides relations avec le milieu des affaires québécois.

Damien Silès

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