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À surveiller: WSP, Savaria, et Corus

Dominique Beauchamp|Publié le 12 octobre 2022

À surveiller: WSP, Savaria, et Corus

À mi-année, Savaria affichait un carnet de commandes record pour ses produits d’accessibilité alors que la demande pour les lève-personne se rétablissait après la pandémie. (Photo: 123RF)

Que faire avec les titres de WSP Global, Savaria et Corus Entertainment? Voici quelques recommandations d’analystes susceptibles de faire bouger les cours prochainement. Note: l’auteur peut avoir une opinion totalement différente de celle exprimée.

WSP Global (WSP, 148,78$): l’ingénieur-conseil perd RPS, mais conserve de nouvelles munitions de 920 M$

Benoit Poirier de Desjardins Marché des capitaux n’est pas trop déçu que WSP Global renonce à surenchérir à l’offre rivale de l’Américaine Tetra Tek (TTEK, 131,12$ US) pour mettre la main sur le spécialiste britannique de l’environnement RPS. Il avait néanmoins prévu que WSP majore son offre au-delà de 975 millions de dollars.

À l’instar de ses collègues, l’analyste considère que l’ingénieur-conseil fait preuve de discipline, un trait que les investisseurs apprécieront même si l’achat de RPS aurait atteint plusieurs visées stratégiques dont l’ajout de 5000 professionnels dans le domaine de l’environnement. Les deux entreprises étaient en pourparlers pendant quatre ans.

Pour mettre cet échec en contexte, l’analyste évalue que RPS aurait ajouté 1,1% au bénéfice de 2023 et 1,6% au bénéfice de 2024 de WSP, après avoir inclus les deux plus récentes acquisitions conclues par WSP en septembre (E&I et Capita), dans son modèle financier.

En vue de l’achat de RPS, WSP a aussi récolté 920 millions de dollars en émettant des actions auprès du public investisseur et de ses principaux actionnaires, dont la Caisse de dépôt et placement du Québec et l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada. Ces sommes lui procurent des munitions importantes pour poursuivre sa stratégie d’acquisitions bien qu’à court terme le plus grand nombre d’actions en circulation dilue la position des actionnaires existants, explique Benoit Poirier.

En attendant un autre achat majeur, le bilan de WSP s’améliore aussi puisque le groupe terminera 2022 avec une dette équivalant à 1,2 fois le bénéfice d’exploitation ajusté, au lieu du ratio de 1,8 fois qu’il aurait affiché après l’achat de RPS.

«Ce bilan sain plaira aux investisseurs dans la conjoncture économique incertaine. Nous ne prévoyons pas que WSP annonce une autre acquisition majeure dans l’immédiat (malgré les nombreuses occasions qui se présentent) parce qu’il lui faudra du temps pour trouver la bonne candidate et mener sa vérification diligente, son analyse interne et réaliser l’achat», explique aussi Benoit Poirier.

Dans l’intervalle, l’analyste réduit son cours cible de 187 à 185$, soit un multiple inchangé de 14 fois le bénéfice d’exploitation prévu en 2023 et un potentiel de rebond de 24%.

L’analyste se dit toujours aussi optimiste à l’égard de WSP qui a bouclé 120 acquisitions depuis son entrée en Bourse en 2006. «Nous restons confiants dans sa capacité à créer de la valeur à long terme», conclut-il.

L’action de WSP a perdu 21% par rapport au cours record de 187,94$ atteint en novembre 2021.

Savaria (SIS, 14,01$): l’amélioration de la rentabilité sera plus graduelle que prévu

Savaria (SIS, 14,01$): l’amélioration de la rentabilité sera plus graduelle que prévu

Michael Doumet de Banque Scotia refait le point sur le principal fournisseur mondial d’équipements pour les personnes à mobilité réduite après une période difficile en Bourse marquée par les inquiétudes économiques en Europe, l’inflation et la remontée rapide des taux.

L’analyste juge que le fabricant d’ascenseurs résidentiels, de lève-personnes et de sièges d’escalier a bien navigué les récents défis opérationnels. La société relève ses prix de vente, contrôle ses coûts et intègre le fabricant suédois de sièges d’escalier Handicare acquis en mars 2021.

Par prudence, Michael Doumet réduit le bénéfice d’exploitation qu’il prévoit au deuxième semestre de 2022 et prévoit un bénéfice inférieur au consensus pour 2023, mais il continue de croire que Savaria peut atteindre un bénéfice d’exploitation d’au moins 130 millions de dollars éventuellement.

Au cours actuel, le titre incorpore beaucoup d’inquiétudes au sujet de l’impact de la hausse des taux sur la construction résidentielle et de la récession en Europe. L’analyste rappelle que les ascenseurs résidentiels représentent seulement 15% des revenus totaux tandis que les sièges d’escaliers (50% des revenus) sont peu tributaires de la construction neuve.

À mi-année, Savaria affichait un carnet de commandes record pour ses produits d’accessibilité alors que la demande pour les lève-personne se rétablissait après la pandémie.

Michael Doumet estime que les investisseurs accordent une capacité bénéficiaire de seulement 105 M$ à l’entreprise alors que Savaria vise plus de 180 M$ en 2025. «Cet écart témoigne du potentiel d’appréciation du titre à long terme», dit-il.

Bien que Savaria offre l’un des meilleurs profils de croissance interne parmi les sociétés suivies par l’analyste, plusieurs vents de front l’incitent à modérer ses attentes à court terme incluant le taux de change, le ralentissement en Europe et les pressions inflationnistes.

Ceci dit, Savaria ne fait pas que subir les effets de la conjoncture. Plusieurs initiatives en cours visent à améliorer les marges. Elles incluent les synergies d’Handicare, l’ajout à la capacité de fabrication de sièges d’escalier à l’usine de Brampton (Ontario), le recours à l’automatisation, et la réduction des délais et des coûts que procure la nouvelle usine mexicaine.

Michael Doumet fait aussi valoir que le vieillissement structurel de la population et le potentiel des ventes croisées de produits entre Savaria et Handicare rendent le milliard de dollars de revenus que vise la société atteignable. La marge de 20% visée est «ambitieuse», mais pas hors de portée.

En fonction de ces objectifs, Savaria peut faire croître son bénéfice d’exploitation de 10% par année, incluant les acquisitions, à moyen terme. Entre 2016 et 2021, cette croissance avait atteint 23%, rappelle-t-il.

Au final, Michael Doumet renouvelle sa recommandation d’achat. Son cours cible inchangé de 17,50$ offre un rendement total potentiel de 28% (incluant le dividende de 3,3%). Cet objectif représente 11 fois le bénéfice d’exploitation prévu en 2023.

L’action de Savaria a perdu 34% par rapport au sommet annuel de 20,75$ atteint en novembre 2021.

Corus Entertainment (CJR.B, 2,20$): un analyste n’exclut pas que le télédiffuseur soit privatisé 

Corus Entertainment (CJR.B, 2,20$): un analyste n’exclut pas que le télédiffuseur soit privatisé 

Le télédiffuseur de la famille Shaw est frappé de plein fouet par la fuite des téléspectateurs et des annonceurs de la télévision conventionnelle. L’action de Corus s’est en effet effondrée de 91% par rapport au sommet historique de 2013.

Bien que le système canadien de la télédiffusion souffre un peu moins qu’aux États-Unis du désabonnement au service de câble et de la multiplication des plateformes de diffusion en continu, Maher Yaghi de Banque Scotia dresse un portrait peu encourageant pour Corus qui possède 33 chaînes de télévision spécialisées (dont Historia et Télétoon), ainsi que 39 stations de radio et 15 chaînes de télé conventionnelles, dans un premier rapport sur la société chez Banque Scotia.

L’analyste s’attend à ce que la vente de publicité par les plateformes de diffusion en continu telles que Netflix et Disney + fragmente encore plus la tarte publicitaire.

Le titre de Corus s’est d’ailleurs enfoncé de 4,3% à la publication du rapport, le 11 octobre, dans un marché fortement à la baisse.

Le plongeon du titre n’est pas sans rappeler la débandade qu’ont connue les journaux imprimés il y a dix ans. Leur multiple d’évaluation avait alors chuté aussi bas que 3,5 à 4 fois les bénéfices d’exploitation. Leur bénéfice d’exploitation se contractait alors de plus de 10%, précise-t-il.

Bien que Maher Yaghi ne prévoit pas rien de tel pour la télévision spécialisée dans un avenir rapproché, l’analyste préfère rester prudent tant que les tendances publicitaires ne montreront pas de signe d’amélioration. À cet égard, Corus vient d’abaisser ses perspectives pour les ventes de pub au quatrième trimestre parce que certains annonceurs se serrent la ceinture en période d’inflation, de rupture d’approvisionnement et de ralentissement économique.

Ceci dit, Maher Yaghi salue les nombreux efforts de la société pour offrir de meilleurs outils numériques qui mesurent l’impact de la publicité pour les annonceurs ainsi que sa bonne gestion financière.

Le segment de la radio pourrait regagner en valeur si les autorités réglementaires canadiennes facilitaient une nouvelle phase de consolidation des stations au pays afin de protéger l’industrie. Cette lointaine possibilité à elle seule ne suffit pas toutefois à améliorer les perspectives de Corus en Bourse à court terme puisque la radio lui procure 6% des revenus publicitaires de Corus.

L’analyste de Banque Scotia n’écarte pas totalement la possibilité que Corus soit privatisée étant donné que ses activités génèrent des flux de trésorerie disponibles qui représentent un rendement de 45% au cours actuel (free cash flow yield). Un tel rendement a de quoi en principe attirer l’œil de fonds d’investissement privés bien que les règles de propriété canadienne des médias limitent le bassin de prétendants potentiels.

«La chute du titre dépasse amplement la réaction normale au déclin opérationnel à court et à moyen terme. Au cours actuel, les investisseurs semblent même douter de la durabilité du modèle d’affaires», évoque-t-il.

Dans l’intervalle, l’analyste établit un cours cible de 4$, conforme à la moyenne de ses collègues, soit un multiple de 4,5 fois le bénéfice d’exploitation. Il prévoit au titre une performance égale à son secteur.

«Un multiple plus modeste de 4 fois équivaut à un cours de 2,90$ qui n’est pas bien loin du cours actuel», ajoute-t-il.