Le PDG de Beyond Meat, Ethan Brown. (Photo: Getty images)
BLOGUE INVITÉ. Le fabricant de produits simili-viande d’origine végétale Beyond Meat gagne en popularité. Les Beyond Burgers s’envolent comme des petits pains chauds et la société a récemment signé un accord avec Tim Hortons pour offrir des sandwichs d’origine végétale au petit-déjeuner. Son prix d’introduction d’offre publique en bourse s’établissait à 25$ par action, les premières actions se sont négociées à 46$ le 2 mai et le titre clôturait dernièrement à 163$, soit un rendement de 254% en moins de 2 mois. Une performance très appétissante!
Sur la base de l’évaluation par contre, Beyond Meat n’est pas un titre que nous nous dépêcherions d’ajouter à notre «panier». Au cours des douze derniers mois, la société a généré des revenus de 115M$, mais aucun bénéfice. Avec une valorisation de 8,9 milliards de dollars, le titre se négocie à 77 fois les ventes. Un rendement de 15% au cours de la prochaine décennie se traduirait par une valorisation d’environ 36 milliards de dollars en 2029. Cette valorisation n’est pas très éloignée de celle d’une autre entreprise du secteur alimentaire, General Mills. Avec une valorisation actuelle de 32 milliards de dollars, General Mills a des revenus annualisés de 16,6 milliards de dollars et des bénéfices de 1,5 milliard de dollars. Pour que Beyond Meat dégage des revenus similaires, il faudrait qu’ils croissent en moyenne de 64% par an au cours de la prochaine décennie. Toute une «commande»!
À titre de comparaison, il faudrait que la croissance soit plus rapide que celle d’Amazon et de Google, qui ont vu leurs revenus croître respectivement de 59% et 35% au cours de leurs 10 premières années en tant que sociétés publique. Normalement lorsqu’on doit se forcer mentalement pour donner du sens à une évaluation, c’est généralement un drapeau rouge.
En raison du monde capitaliste dans lequel nous vivons, et au même moment où Beyond Meat tentera d’atteindre ces objectifs de croissance ambitieux, il y aura des concurrents sous toutes les formes, petits et grands, qui tenteront de rendre la vie aussi difficile que possible à la société. Beyond Meat jouit d’un certain avantage en tant que précurseur de l’industrie, avec une marque de commerce reconnue mondialement, mais il est difficile d’entrevoir un avantage concurrentiel durable qui pourrait éloigner les entreprises rivales et garder les marges d’exploitation élevées.
Un aspect sous-estimé en investissement est le bénéfice comportemental de rester à l’écart de telles situations. Investir avec succès est un processus qui requiert un niveau élevé de discipline. Si un investisseur gagne de l’argent sur un titre uniquement parce que les autres l’ont acheté, et non pas en raison de principes fondamentaux, celui-ci tentera probablement de continuer à gagner de l’argent de cette façon, ce qui pourrait l’emmener vers la spéculation. Cette technique pourrait fonctionner pour quelques titres chanceux, mais risque d’être dangereuse dans son ensemble. Cela a été prouvé à maintes reprises, comme pendant la bulle technologique au début des années 2000 ou par la suite pendant la folie immobilière aux États-Unis.
Bien que le titre puisse continuer à monter, pour un investisseur de valeur qui respecte une discipline stricte, Beyond Meat est tout simplement un repas à sauter.
Patrick Thénière, CIM, Associé Barrage Capital