BRP secouée par les peurs de récession, l’action dévisse de 10%
Dominique Beauchamp|Publié le 22 mars 2019Le titre a perdu 51% parce que les investisseurs craignent que le meilleur soit passé pour les produits de luxe.
BRP (DOO, 36,66$) n’a pu échapper au vortex boursier provoqué par un signal célèbre de récession, en dépit de résultats et d’un aperçu plus que satisfaisants.
Les taux américains de trois mois sont en effet tombés sous le seuil des taux de dix ans, inversant ainsi la fameuse courbe des taux considérée comme l’un des signaux précurseurs les plus fiables d’une récession.
Après un gain de 5,7% à l’ouverture, l’action de BRP (DOO, 36,66$) a fait un sérieux demi-tour dès la fin de l’avant-midi alors que les scénarios de récession saturaient tous les médias.
L’action du fabricant de motoneiges, de motomarines et de véhicules hors routes perd presque 5% en après-midi, ce qui creuse sa chute à 51% depuis septembre.
Il faut dire que la plupart de ses véhicules sont des dépenses hautement discrétionnaires.
Ce nouveau déclin du titre incitera sans doute la société à devancer le rachat de ses actions, comme le lui permet son programme annuel.
Se disant déçu par la performance du titre depuis six mois qu’il attribue a de vagues craintes de ralentissement qu’il ne perçoit pas, Sébastien Martel, le chef de la direction financière, a promis d’optimiser le programme de rachat de 10% des actions.
«Racheter des actions pendant que le cours est attrayant serait la bonne chose à faire», a-t-il dit pendant la téléconférence annuelle.
Les dirigeants ne perçoivent pas ralentissement
Le comportement de l’action tranche avec l’optimisme des dirigeants qui mettent surtout de l’avant le lancement rapide de nouveaux modèles, l’innovation continue, l’ajout à la capacité de production et les gains de parts de marché.
Il faut dire que l’entreprise de Valcourt vient de terminer une année «exceptionnelle», qui a vu un bond de 18% des revenus, de 22% du bénéfice d’exploitation de 37% du bénéfice par action.
Dans certains segments, dont les véhicules côte-à-côte, ses ventes croissent deux à trois fois vite que celles de son industrie.
Malgré un quatrième trimestre supérieur aux prévisions, BRP a offert un aperçu conforme aux attentes pour 2020, soit une hausse prévue de 7 à 11% des revenus, de 14 à 18% du bénéfice d’exploitation et de 13 à 19% du bénéfice par action.
Le bénéfice de 3,50 à 3,70$ prévu pour 2020 devance d’un an l’échéancier original, précise Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale.
Derek Dley, de Canaccord Genuity juge les objectifs «prudents» et rappelle que la société les a dépassé depuis quatre ans.
Les dirigeants ont aussi répété que l’entreprise est en bien meilleure posture qu’en 2008 pour faire face à une mauvaise conjoncture en raison de la plus grande diversité de ses marchés et de ses produits. Son modèle de production plus flexible lui permet aussi de déplacer la fabrication d’une usine à l’autre et de moduler plus rapidement les modèles fabriqués selon la demande.
La croissance de BRP en Chine ralentit tout de même du rythme de 25% des trois dernières années à 10% tandis que les affaires au Moyen-Orient sont «difficiles».
En février et mars, le climat erratique en Amérique du Nord a aussi nui aux ventes de véhicules tout terrain dans certains marchés, mais les commandes printanières en mars ont repris du mieux.
Deux autres aspects des résultats trimestriels ont soulevé des questions de la part des analystes: les pressions sur les marges causées par l’augmentation du coût des matériaux et des frais de transport ainsi que le niveau encore élevé des dépenses en capital en 2020.
Déjà puni en Bourse
Au cours actuel, l’action de BRP incorpore déjà un ralentissement économique, croit M. Doersken.
Son titre s’échange à un multiple de 10,6 fois le bénéfice, soit 34% de moins que sa moyenne historique de 16,2 fois.
«Bien que des préoccupations économiques soient justifiées, aucun indice ne signale une chute imminente de la demande pour les produits de BRP», écrit l’analyste.
Il recommande toujours l’achat du titre et ne touche pas à son cours cible de 48$.
L’évaluation de 7,5 fois le bénéfice d’exploitation qu’il accorde au titre intègre un déclin de 4,5% du bénéfice d’exploitation en 2021, dit-il.
«Selon notre méthodologie, le cours actuel reflète un déclin de 20% du bénéfice d’exploitation à 625 millions de dollars en 2021», ajoute l’analyste.