Metro: «nos investissements nous positionnent pour croître»
Dominique Beauchamp|Publié le 11 mars 2020Metro investit 420 millions de dollars au Québec. Le PDG Éric La Flèche explique sa stratégie.
Après l’Ontario, l’épicier Metro (MRU, 54,44$) déboursera cette fois 420 millions de dollars d’ici 2024 pour construire un centre de distribution automatisé à Terrebonne et agrandir un deuxième centre de distribution de fruits et de légumes et de produits surgelés à Laval.
Ces investissements majeurs visent à assurer la croissance future de l’épicier, améliorer le service aux magasins et la variété et la fraîcheur des produits tout en améliorant son efficacité. Éric La Flèche, PDG de Metro a mis ces dépenses en contexte, en entrevue.
Dominique Beauchamp – L’investissement au Québec survient-il parce que les débours de celui de l’Ontario amorcé en 2017 tirent à leur fin ?
Éric La Flèche – L’investissement au Québec faisait déjà partie de notre plan stratégique. Nous avions acheté un terrain à Terrebonne. Nous avons commencé par l’Ontario parce que les besoins y étaient plus pressants et que les problèmes de capacité y étaient plus aigus. Les deux investissements se chevaucheront un peu puisque le centre de distribution d’Etobicoke en Ontario encore en construction ouvrira ses portes à la fin de l’été. À Terrebonne, la construction débutera en 2021.
D.B. – Vous voulez améliorer l’efficacité de la manutention des produits frais et surgelés à Terrebonne. Est-ce le principal objectif de l’investissement?
E.L. – Notre chaîne d’approvisionnent est déjà efficace. Nous la voulons bien sûr encore plus efficace. Quelque 75 % des tâches seront automatisées. Toutefois, l’investissement vise surtout à traiter un plus grand volume de produits, les fruits et de légumes notamment qui sont de plus en plus demandé. Les entrepôts de Montréal-Nord et de Rivière-des-Prairies/Pointe-aux-Trembles ainsi que celui de Laval ne répondaient plus à nos besoins d’espace et de capacité. Les tâches de certains des employés changeront et globalement l’emploi sera maintenu parce que le volume est appelé à augmenter. On rapatrie aussi la manutention qui avait été confiée à de tierces parties incluant le volume que livraient certains fournisseurs directement aux magasins.
D.B. – Comment financez-vous ces investissements de plus de 800 millions de dollars ?
E.L. – Notre bilan sain nous en donne les moyens. On génère plus de liquidités annuellement depuis l’achat de Jean Coutu. Ça nous permet d’accélérer la cadence. Nous venons aussi de refinancer une dette de 400 millions de dollars, bien heureusement avant les récentes turbulences sur les marchés financiers. Nous avons aussi accès à une facilité de crédit rotative de 600 M$. Ces nouveaux investissements ne ralentissent pas nos dépenses courantes dans l’ouverture, la relocalisation ou la rénovation de notre réseau existant d’épiceries. Nous avions prévu le plan de capital en conséquence. On peut produire une bonne croissance des bénéfices pendant cette période d’investissement.
D.B. – La concurrence accrue vous pousse-t-elle à devancer vos plans ? On dit par exemple que Walmart se fait plus dynamique.
E.L. – La compétition est intense et l’environnement est très promotionnel, mais pas plus qu’avant. Walmart Canada est un solide rival que nous respectons. Comme tout le monde, on vient aussi d’apprendre que Goodfood veut se lancer dans l’épicerie en ligne. On suivra leur évolution comme on le fait de tous nos concurrents. C’est sûr qu’il nous faut exécuter et travailler fort pour capter les ventes qui nous reviennent. D’ailleurs, nos ventes par épicerie comparables augmentent plus vite que celles de nos concurrents depuis plusieurs trimestres.
D.B. – Approchez-vous de la fin des économies de 75 M$ promises lors de l’achat de Jean Coutu ? Prévoyez-vous d’autres synergies ?
F.L. – En 18 mois, nous avons atteint la marque de 65 millions de dollars. Pour le reste, il faudra attendre le regroupement du distributeur McMahon, qui approvisionne les pharmacies Brunet, à l’entrepôt de Jean Coutu à Varennes. On négocie actuellement une nouvelle convention collective à Varennes. Une fois la convention renouvelée, on pourra déménager. Ce chantier prend donc une pause actuellement. Il est encore trop tôt pour parler d’autres synergies potentielles.
D.B. – Êtes-vous toujours à l’aise avec votre stratégie pour l’épicerie en ligne ?
E.L. – Selon Nielsen, l’épicerie en ligne représente environ un pour cent du marché au pays. Il y a de la croissance, mais ça reste marginal. Pour l’instant, l’assemblage des commandes en ligne dans huit magasins au Québec est le bon modèle pour suivre le rythme de la demande. On s’améliore constamment. Si la demande explosait, il nous faudrait sans doute revisiter notre modèle.
D.B. – Depuis janvier, vous versez plus de vos profits en dividendes. Est-ce un signe d’un changement dans votre répartition de capital ?
E.L. – La stratégie de retour de capital aux actionnaires reste la même. Elle évolue un peu en fonction de notre profil financier. Nous avons augmenté le dividende tous les ans depuis 26 ans. Après l’achat de Jean Coutu, les liquidités accrues nous permettent d’accroître d’une fourchette de 20 à 30% à une autre de 30 à 40% de nos profits ajustés en dividendes. Les rachats d’actions annuels se poursuivent en parallèle. Nous n’avons pas l’intention d’accélérer les rachats étant donné les importants investissements en cours.