ANALYSE. Les commentateurs les plus cyniques diront « jamais aura-t-on vu tant de prédictions de récession, ...
ANALYSE. Les commentateurs les plus cyniques diront « jamais aura-t-on vu tant de prédictions de récession, de marché baissier ou d’inversion de la courbe des taux ».
Il est vrai que ce type d’avertissement reflète parfois un vague sentiment de peur qui peut servir de signal contraire du genre « si tant craignent une récession, elle n’est donc pas à nos portes ».
En revanche, le recul synchronisé de catégories d’actifs en 2018 donne à penser que le mouvement de correction est pire que les dérapages de 2016, 2014, 2013 ou encore 2011.
À la mi-décembre, seuls le dollar américain et les titres monétaires d’un à trois mois affichaient un rendement positif, de 5 % et 1,7 % chacun aux États-Unis, révélait Bank of America Merrill Lynch. C’est du jamais vu depuis 1969, précisait aussi le courtier.
Au Canada, l’indice obligataire Canada FTSE affichait encore un mince gain de 0,4 %, tandis que le S&P/TSX perdait près de 13 %.
Même l’analytique Doug Ramsay, chef des investissements de Leuthold Group, croit que le marché baissier a bel et bien commencé. « La foule adoptera notre point de vue. Les prochains profits décevants serviront d’épiphanie », a-t-il dit à l’hebdomadaire financier Barron’s.
La croissance des bénéfices n’est pas aussi solide qu’il y paraît, fait-il valoir, parce que les baisses d’impôts masquent les pressions sur les marges de la hausse des salaires, du cours des matières premières, des frais de transport et des tarifs douaniers.
Les marges auraient donc atteint leur apogée, ce qui affaiblira l’attrait des actions, craint le financier. Par extension, l’évaluation des actions n’est peut-être pas aussi attrayante que les seuls multiples cours-bénéfices ne le laissent croire.
Même si le ratio cours-bénéfice du S&P 500 a retrouvé sa moyenne à long terme d’environ 15 fois les bénéfices prévus, les actions peuvent encore se déprécier si les profits du dénominateur de l’équation baissent aussi.
Les investisseurs flairent peut-être déjà ce « retour à la moyenne » : un peu moins de la moitié des 500 membres du S&P 500 avaient perdu plus de 20 % de leur valeur, à la mi-décembre.
À Toronto, 141 sociétés ou 58 % de l’indice S&P/TSX avaient perdu 20 % ou plus à la même date, selon Financière Banque Nationale.
« Un rebond réflexe est tout à fait possible, mais il pourrait être de courte durée », écrit Steven Goldberg, associé chez Tweddell Goldberg Wealth Management dans son dernier billet sur Kiplinger.com.
Comme 1999 et 2007 l’ont démontré, l’économie peut dérailler assez vite après avoir présenté son meilleur visage. « La Bourse devance aussi parfois le point de bascule », ajoute-t-il.
Les signaux plus réconfortants
En même temps, le marché des options et des contrats à terme sur le taux de volatilité est remarquablement calme à la fin de 2018.
« Les négociateurs achètent peu de produits dérivés pour parier ou se protéger de l’aggravation des turbulences boursières », indique Yannis Couletsis, directeur de Credence Capital Management, à Bloomberg.
Les stratèges européens de la banque Barclays signalent que l’achat de titres monétaires par les gestionnaires de portefeuille, par rapport aux achats d’actions et d’obligations, a atteint un niveau qui avait précédé les cinq reprises observées en 2011, 2013, 2014, 2015 et de 2017.
L’indice AAII Sentiment Survey révèle aussi que la proportion des investisseurs pessimistes surpasse de 22 % celle des optimistes, un écart qui dépasse 95 % des données observées.
« Lorsque les investisseurs ont aussi peur, les rendements à venir s’améliorent et les chances de réaliser un gain 12 mois plus tard augmentent aussi historiquement », explique Charlie Bilello, directeur de la recherche chez Pension Partners.
Lorsque le degré de pessimisme est dans la zone actuelle, les rendements moyens pour le S&P 500 sont de 4,2 % sur trois mois, de 8 % sur six mois, et de 10,9 % sur un an.
Ces perspectives divergentes ne facilitent pas la tâche des investisseurs en ce début d’année. Au moment où la chute commune de tant d’actifs se moque du principe de la diversification, certains titres jouent tout de même bien leur rôle.
Les épiciers/pharmaciens Metro (MRY), Loblaw (L) et Empire (EMP.A) s’étaient appréciés de 17 %, 12 % et 21 %, au moment d’écrire ces lignes, en 2018.
Le fabricant de t-shirts, sous-vêtement et chaussettes Vêtements de sport Gildan (GIL) avait progressé de 6 %, tandis que les deux fournisseurs de câble et de sans-fil Québecor (QBR.B) et Rogers Communications (RCI.B) avaient gagné 23 % et 10 % chacun.
Appréciés pour leurs revenus récurrents, Groupe CGI (GIB. A), Constellation Software (CSU) et Enghouse (ENGH) avaient aussi gagné 24 %, 16 % et 7 %.