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Ce que nous avons appris de Warren Buffett et Charlie Munger

Morningstar|Publié le 11 novembre 2022

Ce que nous avons appris de Warren Buffett et Charlie Munger

«Il n’y a pas meilleure introduction aux placements que la sagesse de Warren Buffett et de Charlie Munger.» (Photo: 123RF)

Il n’y a pas meilleure introduction aux placements et à l’analyse commerciale que la sagesse de Warren Buffett et de son partenaire Charlie Munger.

Quand un groupe de jeunes analystes d’actions (dont je faisais partie) s’est joint à Morningstar en 1991, le fondateur de la société et son PDG d’alors Joe Mansueto nous ont recommandé trois lectures. La première était Money Masters de John Train, un ouvrage qui profilait des investisseurs comme Benjamin Graham, Philip Fisher et M. Buffett. L’autre recommandation était les lettres annuelles aux actionnaires de la société de M. Buffett, Berkshire Hathaway BRK. A BRK.B. En ces années pré-internet, si l’on en voulait un exemplaire, il fallait le demander par écrit à Berkshire Hathaway.

À lire les lettres de M. Buffett, on réalise qu’il n’y a pas d’industrie ou d’entreprise ennuyeuse. Quand on y regarde d’un peu plus près, n’importe quelle entreprise, qu’elle vende des bonbons, des meubles ou même de l’assurance, est fascinante. On réalise aussi que l’on peut expliciter ces entreprises en langage simple. Nul n’est besoin du jargon si omniprésent dans Wall Street. Enfin, si l’on considère le nombre d’années pendant lesquelles M. Buffett a écrit ces lettres aux actionnaires. Lire ses rapports les uns après les autres offre un historique fascinant des 50 dernières années. 

L’Impact de M. Buffett sur Morningstar n’a fait que s’accroître avec le temps.

Chaque année, nous emmenions autant d’analystes que nous le pouvions à Omaha pour assister à l’assemble générale annuelle des actionnaires de Berkshire Hathaway. Passer sept ou huit heures à écouter MM Buffett et Munger répondre aux questions des actionnaires a pour effet de nous épurer du tintouin des nouvelles financières et des marchés et de nous enraciner dans les données fondamentales. On en sort rafraîchi. Cela rend même supportable le séjour dans un Days Inn à la périphérie d’Omaha. (La situation hôtelière d’Omaha s’est considérablement améliorée depuis les années 1990.)

Ayant lancé Morningstar.com en 1997, nous avons commencé à couvrir l’assemblée générale par des articles, un blogue sur le vif et des entretiens avec des participants, et de 2014 à 2019, Greggory Warren de Morningstar a fait partie du panel d’analystes financiers lors de l’assemblée générale annuelle.

M. Buffett, M. Munger, et la Cote de bastille économique Morningstar

Avec le temps, la pensée de M. Buffett est demeurée enracinée dans la façon dont Morningstar analyse les actions. Il y a plus de 20 ans, nous avons emprunté le terme de moat (en français: bastille) à M. Buffett pour définir les avantages concurrentiels que peut avoir une société. Là où nous avons innové, c’est lorsque nous nous sommes emparés du concept et l’avons systématisé en attribuant une Cote de bastille économique Morningstar à toutes les sociétés couvertes par nos soins (plus de 1 500 à l’heure actuelle) et en identifiant la source de cette bastille: coûts de transfert pour le consommateur, actifs incorporels, avantage de coût, échelle d’efficience ou effet de réseau.

Le plus gros risque auquel soit confronté une société peut être interprété comme celui que représente la concurrence ; c’est la raison pour laquelle presque toutes les sociétés plient boutique quelques années après leur lancement. La société offre-t-elle quelque chose de spécial, ou le consommateur peut-il se procurer la même chose ailleurs? Voilà pourquoi comprendre ce qu’est l’avantage concurrentiel est la pierre de touche de l’investissement dans les actions.

 

M. Buffett, M. Munger, et la Cote Morningstar pour les actions

La méthode Morningstar de cotation des actions est également du Buffett distillé. Nous prévoyons les flux de trésorerie disponible d’une société et les actualisons au présent pour estimer la valeur intrinsèque. Une action ne reçoit notre cote maximum de 5 étoiles que si elle se négocie à un rabais important (ou une grande marge de sécurité) par rapport à cette valeur intrinsèque.

La différence essentielle entre notre système de cotation et l’approche de MM. Buffett et Munger est que ces derniers relèguent allègrement de nombreuses sociétés dans le segment «trop difficile» et les y abandonnent. Au cours de la bulle des dot-coms, M. Buffett s’est imaginé professeur dans une école de commerce. Mon examen final, a-t-il dit, consisterait à demander aux étudiants d’établir la valorisation d’une société de l’Internet. Tout étudiant ayant répondu à la question recevrait une note éliminatoire.

Par ailleurs, les investisseurs s’attendent à ce que Morningstar leur donne un avis sur une partie la plus grande possible du marché, et nous n’avons donc pas eu le luxe d’offrir un segment «trop difficile». Nous avons même proposé à cette époque une valorisation de beaucoup de sociétés Internet, quoiqu’habituellement à des niveaux tellement inférieurs au cours de leur action que nos boîtes aux lettres se sont remplies de lettres d’injures.

M. Buffett, M. Munger, et la façon dont Morningstar gère ses affaires

L’influence de MM. Buffett et Munger sur Morningstar dépasse de loin la recherche sur les actions.

Lorsque Morningstar est entrée à la bourse en 2005, nous avons gardé le langage de nos dépôts de textes officiels aussi près que possible du style de communication simple de M. Buffett, et nous aspirons toujours à la même clarté. Et nous non plus, nous n’avons pas participé à des appels-conférences avec des analystes de Wall Street: un autre trait distinctif de Berkshire Hathaway, nous en remettant plutôt à des questions-réponses par écrit avec les investisseurs chaque mois. Nous pensons que cette méthode favorise une approche à plus long terme et un dialogue plus approfondi que des appels-conférences qui se concentrent souvent de façon beaucoup trop importante sur les bénéfices du trimestre prochain. Et si vous écoutez notre PDG actuel Kunal Kapoor et la manière dont il parle des affaires de Morningstar, vous y trouverez partout des accents de Warren Buffett.

 

Par où commencer vos lectures sur MM. Buffett et Munger

Si vous trouvez intimidante l’idée de lire 50 ans de rapports annuels, il y a des façons plus faciles de commencer. Deux ouvrages que je recommande chaleureusement sont The Essays of Warren Buffett: Lessons for corporate America, publié par Lawrence Cunningham, and Poor Charlie’s Almanack: The Wit and Wisdom of Charles T. Munger, publié par Peter Kaufman. Chaque livre offre une sélection organisée respectivement pour MM. Buffett et Munger, et vaut 20 autres ouvrages sur la finance. Je dois admettre que je ne n’ai pas tenu le rythme effréné des publications sur MM. Buffett et Munger, mais ces deux-là ont été à l’épreuve du temps.

Pour les purs et durs, je recommanderais aussi les lettres rédigées par M. Buffett dans ses partenariats de placement, qui datent d’avant sa prise en charge de Berkshire Hathaway. Autrefois, il fallait connaître quelqu’un qui connaissait quelqu’un pour se procurer un exemplaire racorni de ces lettres. Maintenant, on les trouve sur Google. M. Buffett était un type d’investisseur très différent à cette époque, très axé sur la valeur stricte, de grosses mises et une dose d’arbitrage, en grande partie parce qu’il disposait d’un vivier d’actifs beaucoup plus faible, donc d’un ensemble d’opportunités beaucoup plus vaste. Comme dans ses lettres plus tardives, il offre une éducation fascinante sur les marchés, sur la valorisation des sociétés, et sur l’attitude à adopter pour être un bon investisseur.

Vous trouverez dans ces lectures un foisonnement d’idées: des leçons sur les placements, sur la réussite, sur la valeur dans les marchés et les valeurs de la vie. Je le sais, je suis passé par là.