«Ce n'est pas le moment de réduire des gens au silence.»
Plus de 300 employés d’Amazon ont signé de leur nom dimanche des critiques contre le géant américain de la distribution en ligne, notamment sa politique environnementale, en guise de défiance du règlement intérieur qui suppose une autorisation préalable de la hiérarchie.
La publication de ces témoignages sur le site Medium a été organisée par le groupe Amazon Employees for Climate Justice (AECJ), qui pousse l’entreprise à aller plus loin dans son plan de mitigation annoncé à grand renfort de publicité en septembre.
Les membres du groupe ont critiqué l’entreprise publiquement et plusieurs d’entre eux se sont vu rappeler à l’ordre par la direction, au risque d’un licenciement.
« Cette action a été menée pour protester contre le règlement récemment rafraîchi qui interdit aux employés de s’exprimer publiquement sur les activités de l’entreprise sans autorisation préalable », souligne un communiqué de AECJ.
« En tant qu’employés d’Amazon, nous sommes responsables non seulement du succès de l’entreprise, mais encore de son impact. C’est notre responsabilité morale de parler haut et fort et les changements dans le règlement nous empêchent d’exercer cette responsabilité », écrit ainsi Sarah Tracy, ingénieur informatique chez Amazon.
« Bien que tous nos employés soient invités à s’engager de manière constructive avec l’une des nombreuses équipes d’Amazon qui travaillent sur ces sujets, nous appliquons notre politique de communication externe et nous ne permettrons pas aux employés de dénigrer publiquement l’entreprise ou de dénaturer le travail de nos équipes qui développent des solutions à ces problèmes complexes », a indiqué un porte-parole d’Amazon dans un courriel à l’AFP, rappelant les engagements pris en septembre contre le changement climatique.
Il est commun que les entreprises exigent — comme Amazon — un devoir de réserve de leurs employés quand il s’agit de discuter publiquement de leurs activités et plus encore de les remettre ouvertement en cause.
Amazon comptait près de 650 000 employés permanents à la fin 2018, selon le rapport annuel de la société.
Si l’environnement est l’objet de nombreuses critiques postées dimanche, Amazon se voit aussi reprocher d’autres activités comme par exemple la mise à disposition de ses capacités en intelligence artificielle pour des entreprises du secteur pétrolier.
Amazon est souvent critiqué pour son empreinte carbone en raison de la consommation d’énergie de ses immenses fermes de serveurs pour ses activités très lucratives dans le « cloud » (l’informatique dématérialisée).
Et bien sûr l’entreprise a bâti son succès sur un énorme réseau logistique de transport routier pour assurer des livraisons de plus en plus rapides ce qui génère beaucoup de gaz à effet de serre, les principaux coupables du changement climatique.
Le 19 septembre, Jeff Bezos, fondateur de l’entreprise et accessoirement l’homme le plus riche du monde, a pris des engagements publiquement en matière d’environnement promettant notamment qu’Amazon atteindra la neutralité carbone en 2040.
« Nous prévoyons également d’utiliser 100 % d’énergies renouvelables d’ici 2030, et des milliers d’employés travaillent sur des initiatives de développement durable dans toute l’entreprise », souligne encore le porte-parole.
C’est insuffisant selon l’AECJ.
Mark Hiew, directeur marketing chez Amazon juge que « ce n’est pas le moment de réduire des gens au silence. Nous avons besoin de règles qui encouragent un discours plus ouvert, plus de solutions et une action plus déterminée et concertée sur le changement climatique et ses causes ».
Amazon insiste sur les nombreux canaux d’expression à la disposition des employés en interne, que ce soit des groupes d’intérêt, la possibilité de soumettre des idées à la direction, des déjeuners avec le management et même un courriel direct à Jeff Bezos.