Les premières subventions à des chercheurs, militants et ONG seront attribuées cet été.
L’homme le plus riche du monde Jeff Bezos, fondateur du géant du commerce en ligne Amazon dénoncé pour son impact sur l’environnement, a annoncé la création d’un « Fonds Bezos pour la Terre » afin de contribuer à la lutte contre le changement climatique.
Sur son compte Instagram, M. Bezos a annoncé lundi qu’il dotait personnellement ce fonds de 10 milliards de dollars « pour commencer ».
Cette somme représente 7,7 % de sa fortune personnelle, estimée à 130 milliards de dollars par Forbes.
« Cette initiative mondiale financera des scientifiques, des militants, des ONG – soit tout effort qui offre une réelle possibilité d’aider à préserver et à protéger le monde naturel », a ajouté le patron d’Amazon.
Il a précisé que les premières subventions seraient octroyées cet été.
« Nous pouvons sauver la Terre », a-t-il affirmé dans ce message accompagné d’une photo de la planète, plaidant pour « une action collective des grandes et petites entreprises, des États, des organisations mondiales et des individus ».
« Je veux travailler avec d’autres pour accroître les moyens connus et aussi pour chercher de nouvelles façons de lutter contre l’impact dévastateur du changement climatique », a encore fait valoir M. Bezos.
« La Terre est la seule chose que nous ayons tous en commun. Protégeons-la, ensemble », a-t-il conclu.
La somme promise par M. Bezos représente « énormément d’argent », selon Dave Reay, professeur et directeur exécutif du Centre for Carbon Innovation de l’université d’Édimbourg.
« Mais s’attaquer au changement climatique est un défi incroyablement difficile et coûteux. Ces 10 milliards de dollars pourront sans aucun doute avoir un réel impact et c’est très bien de voir que l’accent sera mis sur le renforcement des solutions existantes ainsi que sur la découverte de nouvelles solutions », M. Reay.
L’annonce de M. Bezos survient 20 jours après que 300 employés d’Amazon ont signé des critiques contre leur groupe, notamment au sujet de sa politique environnementale.
Le groupe Amazon Employees for Climate Justice (AECJ) pousse l’entreprise à aller plus loin dans son plan en faveur de l’environnement annoncé à grand renfort de publicité en septembre. Jeff Bezos avait alors promis qu’Amazon atteindrait la neutralité carbone en 2040, avec 10 ans d’avance sur les engagements de l’accord de Paris.
Des millions de tonnes d’équivalent CO2
Amazon, qui a bâti son succès sur un énorme réseau logistique de transport routier pour assurer des livraisons de plus en plus rapides, est un gros producteur de gaz à effet de serre, les principaux responsables du changement climatique.
Les fermes de serveurs d’Amazon, qui a fait du cloud (espace informatique dématérialisé) une autre source très importante de profits, sont elles aussi extrêmement gourmandes en énergie.
Selon la plateforme en ligne Climate Watch, les 44,4 millions de tonnes d’équivalent CO2 produites chaque année par Amazon représentent un peu plus de 10 % des émissions annuelles totales de la France.
Les manifestations pour la protection de l’environnement et contre les grandes sociétés polluantes se sont multipliées partout dans le monde, notamment sous la houlette d’associations comme Greenpeace, de la militante suédoise Greta Thunberg ou du mouvement Extinction Rebellion (XR).
Amazon a ainsi été la cible de plusieurs actions visant à dénoncer la surconsommation et les conséquences écologiques du « Black Friday » en novembre, une des grandes journées de promotion qui contribuent aux revenus colossaux de la multinationale.
Jeff Bezos est aussi le fondateur de la société spatiale Blue Origin, dont le but affiché est, selon le milliardaire, de réduire les coûts d’accès à l’espace afin d’aider l’humanité à coloniser la Lune et d’autres planètes, pour un jour permettre de dépolluer la Terre.
Géants de l’internet, du pétrole ou de l’agroalimentaire multiplient les promesses de réduire leur empreinte environnementale et de s’adapter à une économie bas-carbone. Mais les spécialistes préviennent que nombre de ces annonces relèvent davantage du « greenwashing » (écoblanchiment).
L’ONG altermondialiste Attac France a ainsi accusé M. Bezos de chercher à « se donner bonne conscience » à travers ce nouveau fonds.
« Et si @Amazon commençait plutôt par payer sa juste part d’impôts? », s’est interrogé Attac France sur Twitter, alors que le géant du commerce en ligne est souvent accusé de minorer ses revenus pour réduire ses contributions fiscales.
« Le greenwashing, c’est de la désinformation, un brouillage de la réalité », soulignait pour sa part la patronne de Greenpeace Jennifer Morgan en janvier au Forum économique de Davos, »compte tenu de l’urgence climatique, nous n’avons plus de temps pour le baratin ou l’hypocrisie ».