Un an après avoir lancé le cycle de relèvement des taux le plus rapide de leur histoire, de 4,25 points de pourcentage à ce jour, les gardiens de l’euro ont maintenu le cap. (Photo: 123RF)
Francfort — La Banque centrale européenne (BCE) a relevé jeudi son taux d’intérêt de référence à son plus haut niveau depuis mai 2001, mais a ouvert la porte à une possible pause dans les mois à venir, alors que l’effet du resserrement monétaire pèse sur l’économie.
Un an après avoir lancé le cycle de relèvement des taux le plus rapide de leur histoire, de 4,25 points de pourcentage à ce jour, les gardiens de l’euro ont maintenu le cap.
L’augmentation des taux de 0,25 point de pourcentage décidée jeudi, comme en juin, porte le taux de dépôt des liquidités bancaires à la BCE, qui fait référence, à 3,75%, au plus haut depuis le printemps 2001.
«L’inflation continue de ralentir» en 2023, mais «devrait toujours rester trop forte pendant une trop longue période», a justifié la BCE dans un communiqué détaillant ses décisions.
Russie
Elle a jugé que la suspension par la Russie de l’accord sur les exportations de céréales ukrainiennes via la mer Noire pourrait contribuer à accélérer la hausse des prix.
Dans le même temps, l’institut monétaire a marqué une inflexion significative.
Après neuf hausses successives de taux d’intérêt, il a laissé entendre qu’il pourrait faire une pause lors de la prochaine réunion.
«Nous avons une attitude ouverte concernant les décisions qui seront prises en septembre et lors des réunions suivantes», qui dépendront des données économiques disponibles, a déclaré la présidente de la BCE, Christine Lagarde, lors d’une conférence de presse à Francfort.
«Nous passons à une période où nous serons dépendants des données économiques», a-t-elle ajouté, et ce sont elles qui décideront «si nous relevons (les taux) ou si nous faisons une pause», a expliqué Christine Lagarde.
«Ce pourrait être une hausse, ou une pause», a-t-elle ajouté, «cela dépendra des réunions».
Elle a assuré que le conseil des gouverneurs en tout état de cause ne baisserait pas ses taux dans les réunions à venir.
En zone euro, l’inflation est certes en recul, à 5,5% sur un an en juin, mais surtout grâce au tassement des prix de l’énergie, et en restant très au-delà de l’objectif de 2% fixé par la BCE.
Critiques
La porte ouverte à une pause s’explique par le fait que les hausses précédentes commencent à faire ralentir la hausse des prix et pèsent sur l’activité économique.
Christine Lagarde a jugé que les perspectives économiques de la zone euro s’étaient «détériorées».
La politique des taux élevés est «risquée» et pourrait «prolonger la phase de faiblesse économique en Europe et en Allemagne que nous vivons actuellement», a déclaré le président de l’institut berlinois DIW Marcel Fratzscher jeudi à un groupe de médias allemand.
Le gouverneur de la Banque des Pays-Bas, Klaas Knot, indiquait récemment qu’une nouvelle hausse des taux à la rentrée est «au mieux, une possibilité, mais certainement pas une certitude».
En septembre l’institut disposera de nouvelles projections économiques et aura pris connaissance de l’évolution de l’inflation jusqu’en août.
Aux États-Unis, la Réserve fédérale a montré la voie mercredi en décidant d’une nouvelle hausse de son taux directeur, d’un quart de point à 5,5%, la onzième depuis mars 2022. Le taux est à son plus haut depuis 2001.
En zone euro, les effets de la hausse cumulée des taux sont déjà perceptibles: la demande de crédit, provenant en particulier des entreprises, a atteint son niveau le plus bas depuis 20 ans lors du deuxième trimestre, avait indiqué la BCE mardi.
La zone euro est tombée en légère récession l’hiver dernier, mais les dernières prévisions du Fonds monétaire international voient le PIB (produit intérieur brut) de la région progresser de 0,9% (+0,1 point) en 2023, malgré un recul en Allemagne (-0,3%), seul pays du G7 qui devrait voir la récession perdurer.
Le resserrement monétaire est critiqué par certains gouvernements.
Cette politique pourrait créer «une situation plus difficile pour la croissance au niveau européen», a déclaré mi-juillet le ministre des Finances du Portugal Fernando Medina.
La cheffe du gouvernement italien Giorgia Meloni a critiqué fin juin la «recette simpliste» consistant à augmenter les taux d’intérêt pour lutter contre l’inflation, craignant que «le remède se révèle plus dommageable que la maladie».