L’action d’UBS reculait de 6% à la mi-journée et celle de Credit Suisse se négociait un peu en dessous des 76 centimes proposés par la première banque de Suisse, soit 3 milliards de francs en actions UBS. (Photo: Getty Images)
Le rachat dans l’urgence de Credit Suisse par UBS pour une bouchée de pain et de solides garanties financières des autorités est fort critiqué lundi en Suisse, les détracteurs y voyant de l’amateurisme et un coup porté à la réputation de la place financière suisse.
Les investisseurs n’étaient pas non plus rassurés, dans un contexte mondial très défavorable au secteur bancaire frappé de plein fouet par les hausses de taux d’intérêt des grandes banques centrales.
L’action d’UBS reculait de 6% à la mi-journée et celle de Credit Suisse se négociait un peu en dessous des 76 centimes proposés par la première banque de Suisse, soit 3 milliards de francs en actions UBS.
Celle-ci n’a endossé qu’à contrecœur dimanche la cape de sauveteur de sa rivale, sous la pression intense des autorités suisses, elles même poussées par leurs grands partenaires économiques, qui craignent une coûteuse contagion.
Honte pour la Suisse
Ni la presse ni un grand nombre de responsables politique ne mâchaient leurs mots sur cette fusion, qui crée une super banque et suscite des interrogations sur son poids en Suisse et les conséquences économiques qui en découlent, en particulier pour l’emploi, à cause des nombreuses redondances entre les deux banques.
La lenteur des autorités est aussi dénoncée. Il aura fallu attendre l’annonce de l’accord dimanche à 18 h 30 GMT pour que le gouvernement prenne la parole sur le sujet après une semaine de crise et plusieurs réunions d’urgence.
La banque centrale et le gendarme des marchés ont laissé la Bourse s’emballer mercredi avant d’agir seulement en début de soirée.
Le président de la droite libérale Thierry Burkhart, parle de « honte pour la Suisse » et il évoque dimanche comme une « journée noire pour la place financière suisse et pour la Suisse dans son ensemble ».
Pour la Tribune de Genève « c’est un gâchis social (pour les emplois), économique (pour la réputation de ce pays) et une honte politique pour des dirigeants trop lents à agir ».
Mais ils sont tout aussi nombreux à dénoncer la lenteur de l’identification des risques et de la réaction, du parti des Verts libéraux à l’éditorialiste du quotidien Le Temps.
Beaucoup de responsables politiques et d’éditorialistes reconnaissent toutefois qu’il n’y avait guère d’autres choix, le gouvernement ayant évoqué une nationalisation comme seule alternative en cas d’échec des négociations avec UBS.
Quant à la droite radicale (UDC), la première formation politique de Suisse, elle estime que l’aventurisme à l’étranger a été fatal, là où la branche helvétique de Credit Suisse est très profitable. Elle dénonce aussi l’influence des régulateurs et les autorités de surveillance étrangère sur le plan de sauvetage.
Et UBS dans tout ça?
UBS arrive dans ce mariage forcé en pleine santé — elle a fait plus de 7 milliards de bénéfice net en 2022 — et avec une stratégie qui a fait ses preuves. Mais la fusion n’est pas sans risque pour l’établissement zurichois.
« Il y a beaucoup d’incertitudes et des risques significatifs », a réagi Andreas Venditti, analyste chez Vontobel, qui souligne que la façon dont les investisseurs évaluent UBS va changer « substantiellement ».
UBS était déjà le numéro un mondial de la gestion de fortune, mais ce rapprochement va faire naître un mastodonte du secteur à la tête de 3 400 milliards de dollars d’actifs sous gestion.
Les actionnaires d’UBS n’ont pas voix au chapitre du rachat, pour pouvoir aller vite.
La fusion risque également d’être lourde de conséquences en Suisse sur l’emploi compte tenu des doublons notamment dans leurs activités de détail dans le pays alpin.
UBS s’appuie sur un réseau de près de 200 agences dans le pays alpin contre 95 chez Credit Suisse.
Les deux banques font de la gestion d’actifs.
La branche helvétique de Credit Suisse, considérée comme l’un des joyaux, est active notamment dans les hypothèques et les crédits aux PME.
« Un zombie a disparu, mais un monstre est né », a titré le quotidien zurichois NZZ.