Les obligations sont vues comme un actif moins risqué que les actions et sont généralement privilégiées dans un contexte d’incertitudes économiques. (Photo: 123 RF)
Paris — Les taux d’intérêt des dettes des États baissaient fortement jeudi sur le marché obligataire, un signe que les investisseurs penchent de plus en plus pour le scénario d’une récession prochaine.
Le mouvement a commencé mercredi et touche surtout les taux européens: le rendement de la dette allemande à dix ans, qui fait référence en zone euro, tombait à 1,458% vers 6h30, heure du Québec, contre 1,76% à la clôture de mardi, soit plus de 30 points de base perdus en deux jours.
Celui de la dette française repassait même sous le seuil des 2%, à 1,99%, en baisse de 17 points de base sur la séance.
Les taux souverains des autres pays européens reculaient aussi 15 à 20 points de base, et le mouvement touchait également les emprunts à échéance plus rapprochée, comme à deux ou cinq ans.
La tendance s’explique par deux facteurs. D’une part, les obligations sont vues comme un actif moins risqué que les actions et sont généralement privilégiées dans un contexte d’incertitudes économiques. Ce mouvement fait monter le prix des obligations et baisser mécaniquement les taux d’intérêt.
D’autre part, selon Nordine Naam, stratégiste obligataire de Natixis, le marché obligataire est en train «de revoir un peu à la baisse» ses prévisions de hausse des taux de la Banque centrale européenne à moyen terme, avec le scénario d’un ralentissement de l’activité.
Le sévère resserrement monétaire engagé par les banques centrales pour lutter contre l’inflation fait craindre aux investisseurs et économistes une récession. Même Jerome Powell, le patron de la Réserve fédérale (Fed) américaine a jugé mercredi cette hypothèse «certainement» possible.
Un scénario sur lequel «le marché obligataire table» en prévoyant une baisse des taux d’intérêt à long terme, selon Lionel Melka, directeur de la recherche chez Homa Capital.
La publication jeudi des indices PMI composites S&P Global pour la zone euro a amplifié ces craintes, montrant un fort ralentissement de la croissance de l’activité économique en juin, à un plus bas depuis 16 mois.
Les PMI avaient pourtant bien résisté jusque-là, note M. Naam, restant à un haut niveau entre mars et mai malgré le contexte de la guerre en Ukraine.
La dette américaine semblait moins sensible jeudi, avant la publication d’un indicateur d’activité. Mais le taux d’intérêt du bon du Trésor à 10 ans était de 3,11% vers 8h30, heure du Québec, loin des 3,49% touchés le 14 juin.
Toutefois, depuis le début de l’année, les taux d’intérêt des États ont connu une spectaculaire envolée: le taux américain à 10 ans n’était que de 1,63% au 1er janvier, le taux allemand à -0,12%.