Les banques abordent le trimestre avec des attentes élevées des investisseurs
La Presse Canadienne|Publié il y a 5 minutes(Photo: Nathan Denette / La Presse Canadienne)
La majorité des grandes banques canadiennes s’apprêtent à publier leurs résultats du quatrième trimestre cette semaine, en pleine confiance, alors que les craintes liées aux défauts de paiement des prêts hypothécaires et à une récession s’apaisent.
Mais les analystes affirment que les banques devront démontrer qu’il y a suffisamment de croissance des bénéfices à venir pour justifier les valorisations actuelles, qui se situent dans le haut de la fourchette des tendances historiques.
«Nous pensons que les banques doivent maintenant prouver leur thèse», a déclaré Matthew Lee, analyste chez Canaccord Genuity, dans une note.
L’indice bancaire S&P/TSX est en hausse d’environ 12 % depuis les résultats du dernier trimestre, y compris un gain de 19 % pour la Banque Scotia et une hausse de 17 % pour la CIBC.
L’exception est la Banque TD, qui a été condamnée à une amende de 3 milliards $ US et à des limites de croissance aux États-Unis en raison de ses lacunes en matière de lutte contre le blanchiment d’argent. Son action est en légère baisse ce trimestre à cause de ces difficultés.
Selon Matthew Lee, dans l’ensemble, les banques se négocient actuellement à un niveau «élevé» de 12,1 fois les bénéfices, un niveau justifié par un environnement de croissance constructif, des positions de capital robustes et des carnets de prêts qui semblent raisonnablement sains, mais elles devront améliorer leurs marges à l’avenir pour maintenir le prix de leurs actions.
«Les valorisations du secteur étant pleines, nous pensons que la prochaine étape de la hausse devra venir de la croissance des bénéfices», a indiqué Matthew Lee.
Selon Meny Grauman, analyste à la Banque Scotia, les investisseurs qui ont soutenu les actions des banques regardent déjà au-delà des fondamentaux du crédit qui continuent de se dégrader et de la faible croissance des prêts, pour se tourner vers le redressement qui s’annonce.
«Les actions des banques canadiennes ont connu une bonne dynamique depuis l’été, alors que le scénario d’un atterrissage en douceur des économies américaine et canadienne s’est imposé. Le rebond actuel est moins lié aux résultats des banques au quatrième trimestre qu’à leurs perspectives pour l’année prochaine et au-delà», a-t-il déclaré.
Même la TD semble prometteuse à plus long terme, selon Meny Grauman.
«Nous continuons d’apprécier le profil risque-récompense de la TD, mais ce n’est pas du tout un consensus.»
Même si les organismes de réglementation américains ont limité la croissance des actifs de la TD, M. Lee croit que la TD ne sous-performerait pas radicalement à moyen terme, grâce à des leviers tels que la croissance des prêts hypothécaires et ses activités de gros aux États-Unis, qui contribueront à générer des gains.
La banque a connu un remaniement de sa direction alors qu’elle s’efforce de combler les lacunes constatées par les organismes de réglementation. D’autres changements sont à venir, alors que le chef de la direction, Bharat Masrani, a annoncé qu’il quitterait ses fonctions l’an prochain.
Compte tenu de tous les changements en cours à la banque et de ses prévisions limitées jusqu’à présent pour l’exercice 2025, les analystes surveilleront de près ses perspectives, a souligné M. Lee.
Moins de craintes
À part pour la TD, la perception des banques canadiennes a considérablement changé par rapport aux derniers trimestres, au cours desquels les actions des banques étaient sous pression en raison des craintes d’une augmentation des défauts de paiement, alors que les emprunteurs pliaient sous la pression des taux d’intérêt élevés.
Les prêteurs ont commencé à constituer des provisions pour pertes sur prêts à mesure que les banques centrales augmentaient les taux d’intérêt. L’une des principales craintes était que des propriétaires renouvelant leur prêt hypothécaire à des taux plus élevés ne soient pas en mesure de compenser la différence dans leurs paiements mensuels.
La Banque du Canada avait prévenu en mai que le renouvellement des prêts hypothécaires constituait l’un des principaux risques pour le système financier du pays, en particulier en cas de récession.
Cependant, jusqu’à présent, le marché de l’emploi n’a connu qu’un ralentissement progressif, plutôt qu’un grand choc, ce qui a contribué à apaiser les craintes du secteur financier.
Les emprunteurs ont également été aidés par des conditions financières plus souples que prévu, a déclaré TD Economics dans un rapport publié la semaine dernière.
«Les détenteurs de prêts hypothécaires se sont éloignés du bord de la falaise», a écrit l’économiste Maria Solovieva dans le rapport.
La baisse des taux d’intérêt a également joué un rôle important. La Banque du Canada a réduit son taux directeur de 1,25 point de pourcentage depuis juin pour le ramener à 3,75%.
La combinaison de taux plus bas et d’une concurrence féroce entre les prêteurs sur les prêts hypothécaires signifie que les paiements hypothécaires globaux devraient diminuer de 1,2 % l’année prochaine, alors qu’auparavant, on s’attendait à ce qu’ils augmentent de 0,5 %, a souligné Mme Solovieva.
Les emprunteurs ont également fait preuve de prudence pour préparer le renouvellement de leur prêt hypothécaire. Ils ont augmenté leurs mensualités et réduit leurs dépenses ailleurs afin de libérer plus d’argent pour rembourser leur dette, a-t-elle indiqué.
«Les détenteurs de prêts hypothécaires canadiens, confrontés à des renouvellements à des taux beaucoup plus élevés, ont pris des mesures préventives pour réduire l’impact sur leur budget.»
Ces mesures ont permis de maintenir les défauts de paiement des prêts hypothécaires en dessous des niveaux antérieurs à la pandémie et d’atténuer les craintes concernant le crédit, qui constituaient une menace importante pour les actions des banques.
Les provisions pour pertes de crédit diminuent
Selon John Aiken, analyste chez Jefferies, les inquiétudes concernant le crédit s’apaisent également, mais resteront d’actualité, car les investisseurs cherchent à savoir dans quelle mesure les provisions pour pertes de crédit diminuent.
Au cours du dernier trimestre, les banques ont mis de côté environ 4,4 milliards $ au total pour les pertes potentielles sur les prêts, soit une augmentation de 23 % par rapport à l’année précédente.
Compte tenu de la faiblesse du marché du travail et de l’économie, M. Aiken s’attend à ce que les provisions atteignent un sommet au cours du premier semestre de 2025, avant d’amorcer une lente descente.
Les baisses de taux de la Banque du Canada ne devraient pas encore soutenir de manière significative les prêts personnels, mais les prêts commerciaux pourraient connaître une croissance plus forte au cours du trimestre.
«La prochaine hausse des évaluations des banques canadiennes se produira probablement lorsque la croissance des prêts à la consommation reprendra, ce qui devrait se produire dès le premier semestre de 2025», a déclaré M. Aiken.
La Banque Scotia donnera le coup d’envoi à la publication des résultats mardi, suivie de la Banque Nationale et de la Banque Royale mercredi. De leur côté, la BMO, la TD et la CIBC publieront leurs résultats jeudi.