Le président d’UBS Colm Kelleher a précisé lors de la conférence de presse avec les autorités suisses que la banque comptait réduire la taille de la banque d’investissement de Credit Suisse. (Photo: Getty Images)
Berne — Le rachat de Credit Suisse par sa rivale UBS, annoncé dimanche, va donner naissance à un géant bancaire sans précédent dans l’histoire de la Suisse et vise à rétablir la «confiance» des marchés.
Voici les grands axes de cette transaction à 3 milliards de francs suisses (3,03 milliards d’euros), qui a été conclue à l’issue d’intenses négociations avec le gouvernement fédéral.
Préserver le système financier
Deuxième banque du pays, Credit Suisse est dans la tourmente depuis deux ans et fait partie des trente établissements financiers au niveau mondial considérés comme trop gros pour faire faillite («too big to fail», en anglais).
«Son destin n’est donc pas uniquement décisif pour la Suisse, pour nos entreprises, pour les clients privés, pour ses propres employés, mais également pour la stabilité de l’ensemble du système financier», a déclaré le président de la Confédération Alain Berset dimanche en annonçant l’accord.
À ses côtés, la ministre des Finances Karin Keller-Sutter a déclaré que la faillite de Credit Suisse aurait pu provoquer «des dommages économiques irréparables». «Pour cette raison, la Suisse doit assumer ses responsabilités au-delà de ses propres frontières.»
Un mastodonte de la gestion de fortune
L’union des deux plus grandes banques suisses va faire émerger un géant à la tête de plus de 5 000 milliards de dollars d’actifs investis.
Les activités de gestion de fortune d’UBS, déjà numéro un mondial du secteur, vont s’en trouver encore renforcées avec quelque 3 400 milliards de dollars d’actifs sous gestion.
UBS estime que cette fusion devrait lui permettre de réaliser des économies annuelles de plus de 8 milliards de dollars d’ici 2027.
Pas de vote des actionnaires
La transaction va se faire par le biais d’un échange en actions pour un montant de 3 milliards de francs suisses, valorisant le titre Credit Suisse à 0,76 franc, loin derrière son dernier cours de clôture.
À la fermeture de la Bourse vendredi, l’action s’échangeait à 1,86 franc suisse après s’être effondrée durant ce qui a été l’une des pires semaines de son histoire en Bourse.
Cette alliance ne sera toutefois pas soumise à un vote des actionnaires comme habituellement, conformément à un accord conclu avec les autorités suisses et d’autres autorités de régulation.
La Commission de la concurrence n’aura pas non plus son mot à dire au regard du caractère exceptionnel de ce rapprochement.
Protection des déposants assurée
L’union des deux banques devrait être réalisée «si possible» d’ici fin 2023, a précisé Credit Suisse dans un communiqué.
D’ici là, la banque va continuer à mettre en œuvre sa restructuration «en collaboration avec UBS», a-t-elle ajouté.
Toutes les activités commerciales des deux banques peuvent ainsi être poursuivies sans restriction et sans interruption, souligne l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (Finma), précisant que la «protection des déposants est ainsi assurée».
AT1 sans valeur
Le rachat de Credit Suisse par UBS va faire perdre 16 milliards de francs suisses à des détenteurs d’obligations à risque dites Additionnal Tier 1, a indiqué le gendarme suisse des marchés dans le communiqué approuvant la fusion.
Le soutien exceptionnel de l’État fédéral helvétique «déclenche un amortissement complet de la valeur nominale de tous les emprunts AT1 de Credit Suisse pour un volume d’environ 16 milliards de francs», a expliqué la Finma, ajoutant que cela permettrait une augmentation des fonds propres de base de la banque.
Ces titres de dette, aussi connus sous le nom de CoCo, ont été créés dans le sillage de la crise financière de 2008 et entrent dans le calcul des fonds propres d’une banque.
Les détenteurs de ces titres de dettes arrivent normalement avant les actionnaires dans l’ordre de priorité de remboursement en cas de faillite.
Or les autorités suisses ont tout simplement décidé de leur faire porter une partie du fardeau financier dans le cadre du rachat de Credit suisse par son rival.
À l’inverse, les actionnaires vont toucher au total 3 milliards de francs suisses ou 76 centimes par action.
Pas de précision sur l’emploi
UBS va reprendre la gestion de fortune, la gestion d’actifs ainsi que la banque universelle suisse, qui englobe les activités de banque de détail et de crédits aux PME de Credit Suisse.
Le président d’UBS Colm Kelleher a toutefois précisé lors de la conférence de presse avec les autorités suisses que la banque comptait réduire la taille de la banque d’investissement de Credit Suisse.
Les deux banques n’ont pas donné de précisions sur l’emploi, le président d’UBS assurant toutefois vouloir faire en sorte que la période d’incertitude pour les salariés soit «la plus courte possible».
100 milliards CHF de liquidités
Pour faciliter ce rachat, la Confédération helvétique accorde une garantie de 9 milliards de francs suisses à UBS, l’objectif étant de réduire les risques que ce rachat lui fait courir.
La banque centrale va par ailleurs allouer des aides importantes aux deux banques sous la forme de liquidités allant jusqu’à 100 milliards de francs suisses.