Même si Lightspeed n'est pas rentable, son titre a triplé de valeur depuis son entrée en Bourse en mars.
L’action de Lightspeed (LSPD, 40,05 $) a presque triplé depuis son entrée en Bourse en mars. Le spécialiste des logiciels de commerce électronique pour détaillants et restaurateurs, qui n’est toujours pas rentable, peut-il encore s’apprécier à la Bourse?
À 21,4 fois les prévisions de ventes des 12 prochains mois, Daniel Chan, Valeurs mobilières TD, reconnaît que le titre n’est pas une aubaine. «Cependant, avec des indicateurs clés de performance très forts, et une adoption des paiements qui s’accélère, nous pensons que l’évaluation peut tenir.»
Les six analystes recensés par l’agence de presse financière Reuters qui suivent le titre sont également partagés. Trois, dont M. Chan, émettent une recommandation d’achat et trois autres qui suggèrent de conserver le titre. Les recommandations se maintiennent, même si le titre qui a fait son entrée en Bourse à 16$, a touché un sommet de 48,61$ le 5 août dernier.
Après avoir visé une collecte de fonds de 200M$ pour son premier appel public à l’épargne (un prix de 13$ à 15$ par action), l’entreprise a pu compter sur une forte demande qui lui a permis de récolter près de 240M$ (16$ par action).
La stratégie de l’entreprise étant de s’établir à l’international, des acquisitions et fusions sont de mises. Pour cela, Lightspeed a déjà procédé à plusieurs achats qui pourraient lui permettre d’élargir sa clientèle et améliorer son efficacité.
Une acquisition phare est celle de iKentoo, son concurrent suisse. Cette transaction (estimée à 35M$, composée de 18M$ en argent et 400 000 actions) a permis à Lightspeed d’accéder aux marchés européen et africain. Elle rajoute ainsi près de 4000 clients dans 14 pays, dont la France, la Suisse et l’Afrique du Sud. L’entreprise basée à Montréal a aussi fait l’achat de Chronogolf, qui rajoute à sa liste de clients 600 opérateurs de sites de golfs, concentrés en Amérique du Nord.
Même si le titre est cher, Thanos Moschopoulos, de BMO marchés des capitaux, pense, lui aussi, qu’il y a encore un potentiel d’appréciation et émet un cours cible de 52$. «Nous n’essayerons pas d’argumenter qu’il reste beaucoup de potentiel pour une augmentation du multiple du titre, mais on voit du potentiel en ce qui concerne les estimations. Nous croyons alors que l’évaluation de LSPD est bien soutenue par son fort taux de croissance».
Pour sa part, Steven Li, de Raymond James, s’appuie sur la performance de l’entreprise démontrée par ses résultats du premier trimestre pour relever ses estimations de revenus. Alors qu’il s’attendait à des revenus de 108M$ pour 2020 et de 160M$ pour 2021, il relève ces estimations à 117M$ et 187M$, respectivement. L’entreprise n’étant pas rentable, les analystes utilisent plutôt les revenus pour mesurer la croissance. Au premier trimestre, ceux-ci ont progressé de 38% par rapport à la même période l’an dernier.
Les estimations à court terme ne représentent pas tout le potentiel de croissance, pense Richard Tse, de Financière Banque Nationale. Il préfère ainsi se fier aux projections sur le long terme, au-delà de 2020. «En ce qui concerne la division de paiements seulement, nous pensons que le groupe montréalais pourrait atteindre une contribution au revenu de 100M$ sur les deux prochaines années (elle qui est de seulement 8M$ cette année)», explique-t-il.
JP Morgan, beaucoup plus pessimiste
Reginald L. Smith, de JP Morgan, est nettement plus pessimiste que ses collègues avec un cours cible sur un an de 37$. Il est le seul analyste qui émet une cible en bas de 40$ (le deuxième plus pessimistes, Steven Li, de Raymond James, l’établit à 41$.) M. Smith ne voit pas la raison de l’enthousiasme entourant Lightspeed, qui profiterait plutôt d’un élan causé par le succès de son entrée en Bourse en mars dernier.
L’analyste qualifie les projections des dirigeants d’«ambitieuses», citant la perte avant impôt, intérêt et amortissement d’entre 18 et 20 millions de dollars prévue pour 2020, contrairement à ses principaux concurrents Square et Shopify qui sont déjà rentables.
En se fondant sur les projections de la direction pour l’année 2020, on s’attend à ce que le titre s’échange à un multiple de 22 fois les revenus de la société. Chez Square et Shopify, on anticipe respectivement des multilpes de 10 fois et de 19 fois.