Lock out chez ABI: Boulet mise encore sur l’accompagnement
Julien Arsenault, PC|Publié le 11 janvier 2019Le lock-out déclenché il y a un an aurait privé Hydro-Québec d'environ 215 millions $ en revenus.
Même s’il se dit «extrêmement déçu» de voir le lock-out se prolonger à l’Aluminerie de Bécancour (ABI), le ministre québécois du Travail, Jean Boulet, souhaite pour l’instant continuer à miser sur l’accompagnement des parties impliquées dans l’espoir de dénouer l’impasse.
Il écarte ainsi un scénario où son gouvernement accorderait un rabais sur les tarifs d’hydroélectricité payés par l’aluminerie. Il en va de même pour une modification de la clause permettant à ABI de ne pas acheter la totalité du volume d’électricité figurant dans son contrat avec Hydro-Québec en cas de force majeure.
En vertu de l’entente qui remonte à 2014, un lock-out est considéré comme un cas de force majeure. L’aluminerie fonctionne actuellement au sixième de sa capacité en raison du conflit de travail.
«Moi, j’ai constaté l’état des contrats quand je suis arrivé comme ministre (en octobre), a expliqué M. Boulet au cours d’une entrevue téléphonique. Évidemment, l’entente a été négociée il y a longtemps. Notre gouvernement n’était pas au pouvoir.»
Selon le Syndicat des Métallos, le lock-out déclenché il y a un an jour pour jour a privé Hydro-Québec d’environ 215 millions $ en revenus.
Ce conflit de travail oppose quelque 1030 syndiqués et ABI, propriété à 75 pour cent d’Alcoa et à 25 pour cent de Rio Tinto. Les principaux points de discorde sont le régime de retraite ainsi que l’ancienneté entourant les mouvements de main-d’oeuvre.
Les Métallos sont particulièrement irrités par la clause entourant la définition de force majeure du contrat avec Hydro-Québec.
«On dénonce cette entente depuis le début, a expliqué le président de la section locale 9700, Clément Masse, au cours d’un entretien téléphonique. Si l’employeur avait eu à débourser les sommes prévues, je pense qu’il serait à la table avec plus de volonté.»
Pour souligner cette triste journée, les Métallos doivent se rassembler, vendredi après-midi, devant le bureau du député caquiste de Nicolet-Bécancour, Donald Martel. M. Boulet ne participera toutefois pas à l’événement.
En parlant
Même si les deux parties demeurent campées sur leurs positions depuis la fin du processus de médiation le 21 décembre, M. Boulet préfère tenter, pour le moment, de jouer un rôle de «facilitateur».
«À ce stade-ci, il ne serait pas utile de se tourner vers une hypothèse de règlement, a expliqué le ministre. Cela serait prématuré, mais il s’agit d’un outil que je vais pouvoir (éventuellement utiliser).»
Une hypothèse de règlement constitue généralement un projet d’entente soumis au syndicat afin qu’il soit présenté à ses membres dans le cadre d’une assemblée générale à des fins de ratification ainsi qu’à l’employeur.
Pour l’instant, M. Boulet espère que le groupe de travail de trois personnes qu’il s’apprête à compléter sera en mesure de rapprocher les Métallos et la direction d’ABI.
«Nous avons identifié cinq objectifs, soit la flexibilité opérationnelle, l’augmentation de la productivité, la stabilité des emplois, le climat des relations de travail et la pérennité de l’usine, a-t-il dit. Nous espérons aider les parties à cheminer vers l’atteinte de ces cibles.»
Rien n’indique toutefois que cette initiative permettra de réduire le fossé qui sépare les syndiqués et l’employeur. M. Masse a expliqué qu’il ne «comprenait pas encore» le mandat exact de ce groupe de travail.
M. Boulet, qui s’est gardé de critiquer qui que ce soit dans le conflit, a affirmé que pour le moment, il n’avait pas l’intention d’accroître la pression sur les parties impliquées dans le but de favoriser un arbitrage.
«Je n’imposerai pas de solution, a-t-il affirmé. J’ai haussé le ton et j’ai exprimé mon immense déception devant la façon dont les parties se comportaient lors de la médiation. Je ne peux pas faire la job seul.»