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Que peut faire la Fed pour contrer les effets du coronavirus?

AFP|Publié le 02 mars 2020

Le monde économique a les yeux rivés sur la Fed.

Le monde économique a les yeux rivés sur la Fed, alors que l’épidémie de nouveau coronavirus paralyse une partie de l’activité et a fait six morts sur le sol américain. Mais que peut faire la Banque centrale américaine ?

Question : Pourquoi la Fed a-t-elle envoyé un communiqué vendredi, un fait rare, disant qu’elle se tenait prête à agir si nécessaire ?

Réponse : Alors que les marchés financiers ont connu leur pire semaine depuis la crise de 2008, et que le président américain Donald Trump la pressait de nouveau à agir, la Fed a rappelé dans ce communiqué la solidité de l’économie américaine.

Elle relevait toutefois les risques que l’épidémie de Covid-19 faisait peser sur l’activité économique, et se disait prête à agir si nécessaire. Les marchés y ont immédiatement vu la promesse d’une baisse prochaine des taux d’intérêt.

« La Fed essaie de montrer à la population qu’elle (…) se sent concernée, et soutiendra l’économie lorsqu’elle en aura besoin », a analysé Alan Blinder, économiste et ancien gouverneur de la Fed, lundi sur la chaîne CNBC.

Q : Pourrait-elle abaisser ses taux lors de sa prochaine réunion monétaire ?

R : L’outil classique de la Fed, et le plus efficace, est de jouer sur les taux d’intérêts, qui déterminent le coût du crédit aux États-Unis : elle les augmente en période d’expansion, pour ralentir l’inflation, et les abaisse en période de ralentissement, pour rendre le crédit moins cher et soutenir l’économie par la consommation.

La décision est prise lors d’une réunion ordinaire du comité monétaire, toutes les six semaines. La prochaine a lieu les 17 et 18 mars.

Le président Donald Trump, qui réclame régulièrement des baisses de taux, a estimé lundi que la Fed « aurait déjà dû se réunir ».

Mais beaucoup d’économistes alertent sur le fait qu’abaisser des taux déjà bas — actuellement dans une fourchette de 1,50 à 1,75 % — prive d’une marge d’action pour relancer l’économie en cas de ralentissement économique.

L’outil est d’autant plus inefficace selon eux que les effets du coronavirus ne touchent pas la demande, mais l’offre.

« Une baisse (des taux) dans deux semaines sera encore liée à un mouvement de panique (…) et ne fera rien pour permettre à l’économie de faire face à une crise sanitaire », a indiqué à l’AFP l’économiste Joël Narroff.

Q : Peut-elle les abaisser en dehors de cette réunion, dès cette semaine par exemple ?

R : Lorsque la situation est grave, par exemple au pic de la crise financière de 2008, l’institution n’attend pas sa réunion. Elle montre ainsi sa réactivité, mais peut aussi attiser un vent de panique déjà existant.

« Les outils dont dispose la Fed sont particulièrement mal adaptés pour résoudre les aspects à court terme » des effets du coronavirus, estime David Wilcox, du Peterson Institute for International Economics, ancien directeur de recherche à la Fed. 

« Aucune baisse des taux (et il y a peu de marge pour les abaisser) ne persuadera les autorités locales de ne pas fermer les écoles (…) ou les industriels de rouvrir leurs usines », a-t-il ajouté.

Q : Quels sont les autres outils dont dispose la Fed ? Peut-on imaginer une action au niveau mondial ?

R : La Fed peut, lorsque rien ne va plus, injecter des liquidités sur les marchés financiers. Mais cela a peu de chances de se produire dans la situation actuelle.

Les banquiers centraux et ministres des Finances peuvent aussi joindre leurs forces pour établir une réponse commune. C’est ce qui devrait se produire mardi, avec une réunion téléphonique du G7 sur le coronavirus.

Pour Gregory Daco, d’Oxford Economics, les acteurs de cette réunion vont surtout « essayer d’éviter » une « crise de confiance qui aurait des impacts beaucoup plus importants (…) si du jour au lendemain les entreprises ne parvenaient plus à se financer sur les marchés », du fait notamment de la débâcle boursière.