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Un ancien VP de SNC Lavalin obtient un arrêt des procédures

La Presse Canadienne|Publié le 20 février 2019

Stéphane Roy faisait face à des accusations de fraude de plus de 5000 $ et de corruption d'un agent étranger.

Invoquant l’arrêt Jordan, une juge a ordonné mardi l’arrêt des procédures intentées en 2014 contre un ancien dirigeant de SNC-Lavalin accusé de fraude et de corruption.

La juge Patricia Compagnone, de la Cour du Québec, a affirmé que les délais causés par la Couronne étaient un exemple de la «culture de complaisance» qu’avait dénoncée la Cour suprême du Canada en 2016 dans son arrêt Jordan, qui limite la durée des procédures judiciaires.

Elle a ajouté que les procureurs n’avaient pas réussi à lui démontrer qu’ils avaient tenté d’éviter des délais déraisonnables dans cette affaire, qui a commencé par le dépôt d’accusations contre M. Roy en 2014.

La Cour suprême a établi à 30 mois la période maximale entre le dépôt des accusations et la fin prévue d’un procès criminel en cour provinciale pour les dossiers nécessitant la tenue d’une enquête préliminaire; dans le cas de M. Roy, cette période aurait atteint 64 mois _ plus du double.

Stéphane Roy faisait face à des accusations de fraude de plus de 5000 $ et de corruption d’un agent étranger concernant des relations d’affaires de la firme de génie avec le régime du dictateur libyen défunt Mouammar Kadhafi. Il avait été accusé en 2014 et son procès devait commencer à la fin du mois de mai prochain.

Son cas découlait de la même enquête de la Gendarmerie royale du Canada qui a mené au dépôt d’accusations contre SNC-Lavalin. Ces affaires alimentent la controverse à Ottawa à la suite d’un article selon lequel le cabinet du premier ministre Justin Trudeau aurait fait pression sur l’ex-procureure générale Jody Wilson-Raybould pour éviter à la firme montréalaise des poursuites criminelles, par le biais d’un «accord de réparation» prévu dans la loi.

Sauver le fils de Kadhafi

Une déclaration sous serment déposée par la GRC alléguait que M. Roy était impliqué dans un complot visant à faire passer en fraude au Mexique le fils de Kadhafi, Saadi, et sa famille, en 2011, alors que le régime libyen était vacillant.

Avant d’être limogé en février 2012, M. Roy était vice-président et vérificateur auprès du géant montréalais de l’ingénierie. Il a été par ailleurs acquitté en juillet 2018 d’accusations liées à la gigantesque fraude dans la construction du Centre universitaire de santé McGill, à Montréal.

Le procureur de la Couronne Frédéric Hivon avait peu de commentaires à formuler, mardi, après la décision de la juge Compagnone. Interrogé sur un éventuel appel, il a indiqué que le ministère public prendrait le temps d’analyser la décision.

M. Roy, lui, s’est dit soulagé après ces cinq années d’attente. «Je peux reprendre ma vie», a-t-il dit à sa sortie de la salle d’audience. Son avocate, Nellie Benoît, a souhaité que M. Roy, malgré le brusque arrêt des procédures, puisse dorénavant bénéficier dans cette affaire de la présomption d’innocence, «un concept oublié de nos jours».

Cette présomption d’innocence, a-t-elle soutenu, «continuera à s’appliquer dans le cas de M. Roy parce qu’un procès, c’est l’occasion pour l’État de prouver que quelqu’un est coupable, et c’est aussi l’occasion pour un accusé de prouver qu’il est non coupable. Et dans son cas, puisqu’il y a un arrêt des procédures, on n’aura jamais cette décision-là. Donc, M. Roy doit demeurer présumé innocent, et ce, jusqu’à la fin de ses jours.»