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MTY résiste bien, mais les analystes espéraient encore mieux

Dominique Beauchamp|Publié le 19 février 2021

MTY résiste bien, mais les analystes espéraient encore mieux

La pizzéria américaine Papa Murphy's a fourni 31% du chiffre d'affaires total en 2020. (Photo: 123rf)

Groupe d’alimentation MTY tire bien son épingle du jeu comme en témoigne ses flux de trésorerie record de 1,78$ par action et ses profits inchangés de 0,81$ par action au quatrièeme trimestre, mais la reprise reste empreinte d’incertitudes.

C’est pourquoi deux analystes relèvent légèrement leur cours cible à 47$ pour MTY (MTY, 47,84$), mais ne recommandent pas l’achat du franchiseur de 7001 restaurants dont le titre a déjà atteint leur objectif.

Derek Lessard, de TD Valeurs mobilières, maintient un cours cible plus élevé de 56$, mais juge que l’évaluation du titre, qui a retrouvé celle d’avant la pandémie, intègre déjà le rétablissement prévu des ventes que suscite la vaccination. Le titre a triplé depuis le creux pandémique de mars 2020.

Pour sa part, Glen Michael, de Raymond James, fait remarquer que les enseignes américaines ont procuré 61% du chiffre d’affaires du réseau. Sans les chaînes américaines Cold Stone Creamery et Papa Murphy’s, ce chiffre d’affaires aurait baissé de 18% au lieu de 13%, au quatrième trimestre, précise pour sa part Sabahat Khan, de RBC Marchés des capitaux.

Ces deux chaînes contribuent respectivement 31% et 18% du chiffre d’affaires total du réseau de MTY. Taco Time, Thaï Express et Baja Mexican Grill sont les troisième, quatrième et cinquième plus importantes enseignes du réseau, chacune générant individuellement moins de 10% du chiffre d’affaires.

Abstraction faite de l’achat de Papa Murphy’s, les revenus de franchisage auraient diminué de 11% aux États-Unis en 2020, peut-on aussi lire dans le rapport de gestion.

C’est dire à quel point le reste du groupe souffre des restrictions sanitaires, surtout au Québec et en Ontario qui représentent respectivement 18% et 9% du réseau.

MTY précise que ses restaurants ont perdu 30 222 ouvrables au seul quatrième trimestre. Le 17 février, 408 établissements étaient encore fermés, soit 6% du réseau.

Dans le contexte actuel, «la santé financière des franchisés reste précaire et certains fermeront leurs portes», prévient Derek Lessard, qui prévoit une contraction d’encore 5% du nombre de franchisés en 2021.

Contrôle diligent des coûts

La hausse d’un pourcent à 44 millions des flux de trésorerie libres au quatrième trimestre indique que MTY a pris les «moyens nécessaires» pour contrôler ses coûts et «maximiser» les fonds que procure son exploitation, mais Glen Michael rappelle que certains programmes d’aide du gouvernement canadien arriveront à échéance au cours des prochains trimestres.

L’analyste s’attend donc à ce que les marges «soient sous pression» au cours des prochains trimestres.

Enfin, Papa Murphy’s, dont les pizzas prêtes à cuire à la maison ont été très en demande pendant le confinement, se butera à des résultats comparatifs plus difficiles à soutenir à partir du deuxième trimestre, craint-il.

Pour sa part, Nick Corcoran, d’Acumen Capital, attribue une part de la chute initiale de 7% du titre de MTY à l’ouverture en Bourse, le 18 février, à la réalisation que certaines des économies de 10,7 millions de dollars dégagées au troisième trimestre ne seront pas permanentes, puisque MTY rappelle des employés mis en congé forcé.

Les marges d’exploitation de 27,7% du quatrième trimestre, au lieu des 29,8% qu’il prévoyait, correspondent mieux à ce qu’il faut attendre au cours des prochains trimestres, dit aussi cet analyste. 

Malgré tout, Nick Corcoran ose espérer que les investisseurs apprécieront les flux de trésorerie record en pleine pandémie et la capacité de MTY à bénéficier de la reprise. Il recommande l’achat du titre, mais abaisse son cours cible de 62 à 60$ parce que les mesures sanitaires auront plus d’effet que prévu sur les résultats de 2021.

Il réduit ses prévisions de bénéfice de 2,75 à 2,50$ par action pour 2021 et instaure une première estimation de 2,83$ en 2022. Au cours actuel, le titre s’échange à 17 fois ce bénéfice potentiel.

Fortes ventes en ligne

Sabahat Khan de RBC salue le fait que la part des ventes réalisée en ligne atteigne le quart du chiffre d’affaires de tout le réseau, soit le double d’un an plus tôt.

Les ventes numériques ont triplé en 2020 à 636 millions de dollars (M$) grâce aux investissements dans les commandes en ligne et la livraison. Heureusement, dit-il, une bonne part de ces ventes proviennent de commandes à emporter qui sont plus rentables pour MTY que la livraison par des tiers, tels que Uber Eats ou DoorDash.

«La COVID-19 continuera à altérer le chiffre d’affaires réseau et les ventes par restaurant comparable au premier semestre de 2021. La société s’attend à une éventuelle reprise», indiquent les dirigeants dans le rapport de gestion.

La bonne situation financière du groupe permet aux investisseurs de patienter jusqu’à ce que la vaccination puisse ramener les consommateurs aux restaurants, croit RBC.

Dans l’intervalle, MTY a remboursé 109 M$ de sa dette en 2020 et a racheté 18,9 M$ de ses actions à un prix moyen de 51,72$ chacune, en 2020. Ce remboursement a économisé des frais d’intérêts de 1,9 M$, précise le rapport de gestion.

Michael Glen s’attend à ce que l’endettement diminue davantage en 2021 et que le ratio passe de 3,3 à 2,4 fois le bénéfice d’exploitation.

Le groupe a terminé l’année avec une encaisse de 44 M$ et un accès à des prêts de 260 M$, précise Sabahat Khan. Certaines contraintes imposées par ses banquiers seront allégées ce qui permettra à MTY d’envisager de rétablir son dividende ou le rachat des actions.

Le franchiseur reste à l’affût d’acquisitions, de taille moyenne surtout, mais aborde le marché avec prudence étant donné la forte concurrence de la part d’autres acquéreurs, ont aussi expliqué les analystes.