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Tommy Ouellet

Investir en l'avenir

Tommy Ouellet

Expert(e) invité(e)

Combien ça coûte, investir responsablement?

Tommy Ouellet|Publié le 22 août 2024

Combien ça coûte, investir responsablement?

Il faut noter que les fonds responsables sont souvent moins exposés à certaines industries, comme l’énergie et les services publics, et plus exposés à d’autres industries, comme la santé, le secteur industriel et les technologies de l’information. (Photo: 123RF)

Bien souvent, lorsqu’un investisseur envisage de se tourner vers l’investissement responsable, l’une des premières questions qu’il se pose est de savoir combien cela pourrait lui coûter. En d’autres mots, quel rendement est-ce qu’on laisse sur la table quand on décide d’investir responsablement?

Que ce soit par conviction personnelle, pour contribuer à influencer positivement la société ou pour simplement sauver la planète, les raisons sont nombreuses pour se tourner vers l’investissement responsable, fréquemment désigné par l’appellation ESG (Environnement, Social et Gouvernance).

Toutefois, en restreignant l’accès à certaines compagnies ou à des secteurs entiers de l’économie, il est légitime de se demander si nous sommes en train d’amputer nos rendements futurs. Après tout, à moins d’être une fondation ou autre organisme de bienfaisance, la performance financière de notre portefeuille demeure un élément central de toute bonne stratégie de placement, même en aidant la planète.

En fait, la réalité est exactement l’inverse. 

Coup d’oeil historique

D’entrée de jeu, il apparaît important de mentionner qu’au cours des dernières années, de nombreux fonds et stratégies de type ESG ont obtenu des rendements non pas inférieurs, mais plutôt similaires et souvent supérieurs aux indices de référence traditionnels comme le S&P/TSX et le S&P 500.

D’ailleurs, un récent rapport de l’Institut pour l’investissement durable de Morgan Stanley rapportait qu’en 2023, les fonds dits responsables ont obtenu en moyenne des performances 4% supérieures aux fonds dits traditionnels, selon les paramètres de classification de Morningstar. De plus, les fonds responsables ont battu les fonds traditionnels 8 fois sur les 10 derniers semestres, selon la même étude.

Il faut noter que les fonds responsables sont souvent moins exposés à certaines industries, comme l’énergie et les services publics, et plus exposés à d’autres industries, comme la santé, le secteur industriel et les technologies de l’information. Ces différences d’exposition sectorielle exercent donc toujours une influence sur les rendements obtenus d’une année à l’autre, selon l’environnement économique.

Malgré cela, en analysant plusieurs régions géographiques sur plusieurs années, de nombreux rapports et analyses concluent que les fonds responsables ont tendance à surperformer les fonds traditionnels plus souvent qu’ils ne sous-performent, et ce, à travers la plupart des périodes et des classes d’actifs. 

Outil de gestion des risques

Dans de nombreuses stratégies d’investissement responsables, un élément central de l’analyse d’une opportunité d’investissement est la compréhension des enjeux de nature ESG, et l’analyse des effets que ceux-ci peuvent avoir sur les activités d’une compagnie à travers le temps.

Ignorer les éléments reliés aux facteurs ESG reviendrait ainsi à ne pas tenir compte de certains facteurs de risque pouvant influencer les activités et performances financières futures d’une compagnie. À l’inverse, analyser, étudier et comprendre ces différents aspects est un puissant outil de gestion des risques afin de se prévenir au maximum des mauvaises surprises et des scandales futurs.

En investissant dans des compagnies qui se comportent comme de bons citoyens corporatifs et qui gèrent bien leurs risques ESG, un investisseur maximise ainsi son potentiel de rendement à long terme tout en limitant les possibilités de pertes subites liées à des événements imprévus.

Changement de paradigme

Depuis plusieurs années déjà, beaucoup de grandes institutions financières et autres entités publiques font les manchettes pour leurs engagements et promesses liées à leurs investissements.

Par exemple, certaines grandes caisses de retraite ont décidé de désinvestir complètement des énergies fossiles, de limiter leur exposition aux entreprises qui ont une empreinte néfaste sur l’environnement et la biodiversité, ou encore d’éliminer les investissements dans les compagnies qui ont un mauvais dossier relatif au respect des droits humains et des relations de travail.

Que ces décisions soient influencées par les pressions des actionnaires, des consommateurs, des employés ou des gouvernements, la conclusion est la même : les entreprises qui font piètre figure en matière de respect de l’environnement ou du droit social se font de plus en plus pénaliser par les marchés financiers.

Cette tendance lourde, bien que très politisée au sud de la frontière, n’est pas près de disparaître à l’échelle mondiale. En effet, celle-ci ne fait que s’accélérer, alors que plusieurs nouvelles normes et réglementations continuent de voir le jour partout sur la planète, incluant ici même au Canada.

En tant qu’investisseur, il est primordial de tenir compte de cet important changement de paradigme lorsque vient le temps d’analyser une compagnie et d’établir ses objectifs de rendement à long terme.

Le coût de l’ignorance

Certains investisseurs se demandent donc combien cela peut-il coûter, en termes de rendement, d’investir responsablement par rapport à de l’investissement dit traditionnel.

À cette question, il faudrait plutôt répondre : combien cela peut-il coûter d’ignorer des facteurs de risques importants pouvant affecter la performance financière future des compagnies?

Ou encore : combien cela peut-il coûter de ne pas tenir compte des grandes tendances mondiales pouvant affecter la demande future des investisseurs du monde entier?

La gestion des risques est souvent le nerf de la guerre lorsqu’on souhaite construire un portefeuille d’actifs avec une vision à long terme. Investir dans des compagnies qui gèrent bien leurs propres risques, ESG ou autre, est habituellement un très bon indicateur de la performance future d’un portefeuille.