Dans quelle mesure la Banque du Canada réduira-t-elle ses taux?
Morningstar|Publié le 30 septembre 2024Lors d’une conférence tenue mardi dernier, le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, a déclaré qu’il était raisonnable de s’attendre à de futures baisses de taux. (Photo: Getty Images)
La Banque du Canada n’a probablement pas besoin de raisons supplémentaires pour continuer à réduire les taux d’intérêt, mais comme la Réserve fédérale américaine s’est jointe à la fête en procédant elle aussi à une réduction importante, la banque centrale canadienne pourrait désormais être incitée à abaisser davantage les taux.
Les économistes et les experts en investissement n’excluent pas totalement la possibilité d’une réduction d’un demi-point, même si l’on s’attend généralement à une réduction plus modeste de 0,25% lors des prochaines décisions sur les taux, le 23 octobre et le 11 décembre. Jusqu’à présent, la Banque du Canada a abaissé ses taux à trois reprises, chaque fois d’un quart de point de pourcentage.
Lors d’une conférence tenue mardi dernier, le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, a déclaré qu’il était raisonnable de s’attendre à de futures baisses de taux, car les données relatives à l’indice des prix à la consommation indiquent que les efforts déployés par la banque centrale pour maîtriser l’inflation portent leurs fruits.
«Nous voulons désormais la maintenir près du centre de notre fourchette de maîtrise de l’inflation, qui va de 1 à 3 %. Nous sommes arrivés à bon port, nous devons maintenant jeter l’ancre», a-t-il déclaré, dans ses premières remarques depuis que les données ont montré que l’IPC est tombé à 2 % en août, son niveau le plus bas depuis plus de trois ans.
Voici ce qui, selon trois économistes, pourrait inciter la Banque du Canada à adopter une politique d’assouplissement plus agressive.
Eric Lascelles, économiste en chef, RBC Gestion mondiale d’actifs
La Banque du Canada a déjà réduit son taux d’intérêt de 25 points de base à trois reprises consécutives, et l’augmentation continue du taux de chômage plaide en faveur d’autres mesures. Je prévois une réduction de 25 points de base en octobre et une autre de 25 points de base en décembre. La Banque du Canada pourra alors poursuivre son assouplissement sur une grande partie de l’année 2025, ramenant le taux directeur à un niveau légèrement inférieur à 3%.
Mais il est possible que la réunion d’octobre donne lieu à un mouvement plus important de 50 points de base, d’une part parce que la Fed vient de créer un précédent, d’autre part parce que le taux de chômage du pays est maintenant clairement élevé, mais aussi parce que l’inflation globale est tombée à 2 %.
Cependant, il n’est pas certain que la Banque du Canada suive la Fed: cette première a commencé son assouplissement bien plus tôt et elle a déjà effectué un mouvement plus important que celui de 50 points de base effectué par la Fed. Mais la voie est définitivement ouverte pour un mouvement plus important. L’économie canadienne montre des signes de faiblesse et il y a une certaine urgence à réduire l’ampleur de la restriction monétaire alors que les prêts hypothécaires canadiens seront réinitialisés en masse au cours des deux prochaines années.
Une baisse de taux de 50 points de base est également souhaitable si le taux de chômage du pays continue d’augmenter.
Sal Guatieri, économiste principal, BMO Marchés des capitaux
Nous prévoyons des baisses de taux d’un quart de point à chacune des sept prochaines réunions de politique monétaire, ce qui ramènera le taux directeur global à 2,5 % d’ici juillet 2025. Nous prévoyons une inflation moyenne de 2,4 % cette année et de 1,8 % en 2025. [Une réduction massive] n’est pas notre scénario de base, mais nous estimons qu’il y a presque autant de chances que la Banque du Canada réduise son taux de 50 points de base en octobre. Ces taux augmenteraient si l’économie ne se raffermit pas, si le taux de chômage fait un nouveau bond ou si l’inflation mesurée par l’IPC chute à nouveau fortement en septembre.
Shailesh Kshatriya, directeur, Stratégies d’investissement, Investissements Russell Canada
La dégradation du niveau de vie et la hausse du chômage ont contraint la Banque du Canada à réduire son taux directeur à trois reprises cette année, la première banque centrale du G7 à le faire au cours de ce cycle. Nous pensons que la Banque du Canada ne fait que commencer et qu’une détérioration de la croissance économique ou de la croissance de l’emploi pourrait l’inciter à assouplir sa politique de manière plus agressive.
Les risques de baisse sont clairs et présents sur le marché du travail. La Banque du Canada a reconnu que les embauches ont été faibles et que l’augmentation du chômage des jeunes est particulièrement préoccupante. Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, a indiqué qu’une croissance plus forte de l’emploi était nécessaire pour « absorber l’offre excédentaire dans l’économie ».
La combinaison d’une économie faible et d’une croissance démographique substantielle a contribué à la hausse du taux de chômage, qui est passé de 5,0 % en janvier 2023 à 6,6 % en août 2024. Historiquement, une augmentation aussi forte du chômage aurait presque certainement été associée à une récession. Bien qu’aucune récession officielle n’ait encore été déclarée, on peut affirmer que le niveau de vie des Canadiens est déjà en récession.
Le taux de chômage atteignant un niveau psychologiquement important de 7 %, par exemple, pourrait inciter la banque à assouplir sa politique de manière plus agressive, en réduisant les taux par paliers de 50 points de base. Le fait que la Banque du Canada n’a pas hésité à prendre des mesures audacieuses par le passé rend cette éventualité tout à fait probable. Rappelons que la Banque du Canada a fait monter son taux directeur de 100 points de base en une seule réunion, en juillet 2022, alors qu’elle s’efforçait de lutter contre la hausse de l’inflation.