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Les retombées du congé de TPS et du chèque de 250$ accordés par Justin Trudeau

Morningstar|Édition de la mi‑novembre 2024

Les retombées du congé de TPS et du chèque de 250$ accordés par Justin Trudeau

Le premier ministre Justin Trudeau annonce le projet de son gouvernement de suspendre pendant deux mois la TPS sur certains biens et services, au «Vince's Market», une épicerie de Sharon, en Ontario, le jeudi 21 novembre 2024. (Photo: La Presse Canadienne / Chris Young

Cette semaine, en vue des élections de l’année prochaine, le premier ministre canadien Justin Trudeau a annoncé une brève exonération fiscale et une offre d’argent liquide pour soulager les ménages. S’il reste à voir si cette mesure permettra de regagner des électeurs pour le gouvernement libéral, les analystes estiment que l’impact potentiel de ces mesures pourrait faire basculer la décision de la Banque du Canada sur les taux d’intérêt le 11 décembre.

Les économistes ont débattu de la question de savoir si la Banque allait procéder à une deuxième baisse consécutive d’un demi-point de pourcentage de son taux directeur ou à une baisse d’un quart de point (comme elle l’a fait en juin, juillet et septembre). Une réduction de 50 points de base est considérée comme une mesure plus agressive pour soutenir l’économie.

Selon les analystes du marché, si le rapport sur l’inflation récent a fait pencher la balance en faveur d’une baisse des taux moins importante, les nouveaux avantages de la politique monétaire pourraient presque éliminer la possibilité d’une baisse plus importante (ces avantages comprennent un congé fiscal de deux mois et des chèques de remboursement de 250 dollars canadiens pour les Canadiens gagnant moins de 150 000 dollars canadiens par an). Toutefois, des arguments solides ont également été avancés en faveur d’une réduction plus importante, compte tenu du ralentissement de l’économie et des taux d’intérêt plus élevés que la neutralité.

Le congé de TPS va-t-il stimuler la croissance économique?

Royce Mendes, directeur général et responsable de la stratégie macroéconomique chez Desjardins, estime que le montant total des mesures combinées pourrait s’élever à plus de 6 milliards de dollars canadiens, soit environ 0,2% du PIB du Canada. D’un point de vue budgétaire, ces chiffres «pourraient se traduire par un coup de pouce notable à la croissance [de l’économie canadienne] au cours du premier semestre de l’année prochaine», écrit-il dans une note aux investisseurs. «L’annonce devrait pratiquement fermer la porte à une réduction de 50 points de base le mois prochain.» Royce Mendes prévoit une réduction de 25 points de base lors de la prochaine réunion de la banque centrale en décembre, ajoutant que de telles réductions seront la norme en 2025.

Benjamin Reitzes, directeur des taux canadiens et stratège en macroéconomie chez BMO Marchés des capitaux, a exprimé un point de vue similaire dans une note d’analyse. Il affirme que la plupart des chèques de relance seront épargnés, mais que le remboursement de la TPS entraînera des dépenses supplémentaires. En conséquence, il a relevé ses prévisions de croissance du PIB pour le premier trimestre 2025 de 1,7% à 2,5%, tout en prévoyant une hausse similaire pour le quatrième trimestre 2024 et le deuxième trimestre 2025.

«Pour la Banque du Canada, la combinaison des nouvelles mesures de relance, d’une Réserve fédérale américaine plus prudente, d’une inflation ratée à la hausse et d’une révision anticipée à la hausse du PIB devrait renforcer les attentes d’une baisse de taux de 25 points de base en décembre, ce qui exclut pratiquement une baisse de 50 points de base», explique Benjamin Reitzes.

Avery Shenfeld, directeur général et économiste en chef chez Marchés des capitaux CIBC, estime que l’impact économique des mesures fiscales à court terme pourrait inciter les décideurs à réduire le taux d’intérêt d’un quart de point, mais «plus en théorie qu’en pratique». Selon lui, les dépenses publiques (et le coup de pouce qu’elles pourraient donner à l’économie canadienne de 3 000 milliards de dollars canadiens) ne sont pas suffisamment importantes ou permanentes pour faire une différence matérielle. «En proportion du PIB, ces mesures sont faibles — juste des décimales, en fait — et ne modifieront pas de manière significative les prévisions de croissance pour les quatre à six prochains trimestres, ce qui est l’objectif de la Banque du Canada lorsqu’elle fixe les taux d’intérêt.»

Avery Shenfeld souligne en outre qu’il n’est pas certain que les chèques de remboursement, qui doivent être distribués au printemps prochain, seront compensés par des réductions de dépenses dans d’autres domaines. «Si le gouvernement vise un niveau de déficit spécifique pour le prochain exercice financier, il pourrait réduire les dépenses dans d’autres domaines pour compenser», affirme-t-il.

La Banque du Canada pourrait-elle encore réduire ses taux d’un demi-point?

Pour l’instant, Avery Shenfeld demeure dans le camp de la réduction de 50 points de base, contrairement au nombre croissant d’analystes qui ont réduit leurs paris à la suite de la récente remontée du taux d’inflation au Canada. «Nous reconnaissons que les derniers chiffres de l’inflation ont été quelque peu décevants, mais la Banque du Canada tient également compte de la marge de manœuvre de l’économie et de la façon dont elle crée une pression à la baisse sur l’inflation à l’avenir», note-t-il. «Sur cette base, une réduction de 50 points de base est toujours justifiée, puisque les taux d’intérêt actuels restent bien au-dessus de la neutralité.»

L’allégement de la TPS sera en vigueur du 14 décembre au 15 février et ne s’appliquera qu’à certains produits, notamment les vêtements pour enfants, les chaussures, certains jouets, les boissons, les journaux imprimés et les arbres de Noël naturels et artificiels.

Entre-temps, les économistes se concentrent sur les données économiques clés, notamment les résultats du PIB le 29 novembre et le rapport sur l’emploi le 6 décembre, afin de déterminer si la Banque du Canada pourrait être amenée à procéder à une nouvelle baisse substantielle de ses taux.