(Photo: Chip Somodevilla Getty Images)
EXPERT INVITÉ. Avec l’élection de Donald Trump et la majorité républicaine aux deux chambres du Congrès, il y a fort à parier que les initiatives climatiques n’apparaîtront pas au sommet de l’agenda américain. Dans un tel contexte, à quoi faut-il s’attendre de nos investissements verts ou thématiques? Est-ce la fin de l’investissement responsable?
L’élection de Donald Trump en 2016 avait marqué un tournant majeur dans la politique américaine et dans de nombreux domaines économiques, y compris celui de l’investissement responsable.
Ce deuxième terme du président républicain pourrait avoir des répercussions encore plus significatives, étant donné le contexte mondial actuel, les enjeux climatiques urgents, les tensions géopolitiques croissantes et les attentes accrues des consommateurs et des investisseurs en matière de durabilité.
Bien que l’on ne puisse prédire avec certitude l’orientation exacte des politiques économiques et environnementales à venir, il est important d’y réfléchir dès maintenant. Dans un scénario de probables assouplissements réglementaires, l’analyse rigoureuse des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) prendra une place encore plus importante dans la gestion des risques des entreprises.
Dans un tel contexte, les investisseurs alertes et conscients de ces enjeux seront les premiers à tirer leur épingle du jeu.
Vers une dérèglementation
Lors de son premier terme, Trump avait pris des mesures pour réduire plusieurs aspects liés à la réglementation environnementale, y compris dans des secteurs clés comme l’énergie, le charbon, et les émissions de gaz à effet de serre. Il avait, par ailleurs, retiré les États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat, une décision qui a eu des répercussions directes sur les initiatives mondiales de développement durable.
Ce nouveau mandat pourrait ainsi poursuivre cette lancée, notamment en ralentissant les investissements dans les énergies renouvelables et ainsi nuire aux efforts mondiaux de réduction des émissions néfastes. Il faut s’attendre également à un ralentissement, et même un recul, des obligations en matière de divulgations environnementales et sociales des entreprises américaines.
Malgré cela, et comme ce fut le cas durant le premier mandat de Trump, une telle dynamique pourrait catalyser la mobilisation d’acteurs privés, notamment des entreprises et des investisseurs institutionnels, en faveur de l’intégration des critères ESG. Face à un contexte politique qui ne soutient pas activement la transition verte, les entreprises qui promeuvent la durabilité et la responsabilité sociale pourraient attirer davantage d’investissements, au détriment des secteurs plus polluants comme les énergies fossiles.
Un outil de gestion des risques
Même si les obligations liées aux divulgations ESG des entreprises devaient reculer, cela ne ferait pas pour autant disparaître les risques liés aux enjeux environnementaux et aux changements climatiques. Au contraire, non seulement ces risques demeureront existants, mais ils pourraient maintenant être encore plus difficiles de les analyser et d’en comprendre les implications sur les activités des entreprises.
Dans ce contexte, une analyse fondamentale approfondie, combinée à une évaluation exhaustive des risques matériels liés à la transition énergétique et aux répercussions sociales et environnementales, devront faire partie intégrante du coffre à outils des investisseurs.
En l’absence d’une implication gouvernementale forte et engagée, le fardeau de la gouvernance et de la diligence reviendra plus que jamais sur les épaules des entreprises et des autres participants aux marchés financiers.
L’influence croissante des investisseurs internationaux
Si l’administration Trump s’éloigne des engagements internationaux en matière de climat et de développement durable, elle pourrait néanmoins constater une augmentation de la pression internationale pour une plus grande transparence et responsabilité corporative.
L’Union européenne, par exemple, a adopté des réglementations ambitieuses en matière de finance durable, y compris la taxonomie verte européenne, et a renforcé les exigences de divulgations ESG pour les entreprises opérant sur son territoire. L’administration Trump pourrait se trouver confrontée à la nécessité de s’adapter à cette évolution mondiale, sous peine d’isoler davantage les États-Unis des flux d’investissement internationaux.
Par ailleurs, les entreprises américaines qui cherchent à accéder aux marchés européens ou asiatiques devront se conformer aux exigences internationales en matière de durabilité, ce qui pourrait les inciter à des ajustements internes pour répondre aux attentes des investisseurs étrangers.
Un enjeu toujours crucial pour l’avenir
La réélection de Donald Trump en 2024 pourrait marquer un renouveau dans les politiques économiques et environnementales des États-Unis, en particulier en matière d’approche des critères ESG.
Un tel changement de cap pourrait, d’une part, limiter l’engagement du pays en matière de transition énergétique et d’autres initiatives environnementales. D’autre part, cela pourrait avoir l’effet de catalyser des réactions plus fortes et plus engagées de la part des investisseurs institutionnels, des entreprises et des gouvernements locaux et internationaux qui ont à cœur ces enjeux.
L’investissement responsable, loin de s’affaiblir, pourrait ainsi voir son importance accrue dans un environnement politique et économique mondialisé où les défis climatiques, sociaux et de gouvernance continuent de croître. Ainsi, quel que soit l’orientation politique des États-Unis, l’investissement responsable demeurera un levier indispensable pour guider les entreprises vers une croissance durable et équitable.