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Le courant ne passe plus entre BCE et ses investisseurs

Jean Gagnon|Édition de la mi‑octobre 2024

Le courant ne passe plus entre BCE et ses investisseurs

(Photo: Adobe Stock)

La BOUSSOLE BOURSIÈRE est une rubrique qui traite d’un événement marquant et de son effet sur le marché boursier en s’appuyant sur l’analyse d’experts. Cette analyse pourra être autant fondamentale que technique.

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(Illustration: Camille Charbonneau)

Lorsque les taux d’intérêt sont tombés à près de zéro à la suite de l’arrivée de la pandémie de COVID-19, le titre du géant canadien du secteur des télécommunications BCE (BCE, 45,64 $) est vite devenu un favori des investisseurs canadiens, surtout chez ceux à la recherche de revenus.

Le dividende était attrayant, même très attrayant aux dires de la plupart des analystes et des conseillers financiers. Les affaires étaient alors bonnes, soutenues par les changements de comportements des individus déclenchés par le confinement.

La musique s’est toutefois brusquement arrêtée au printemps 2022. Après le choc pandémique, la concurrence dans le secteur de télécommunications est devenue brutale et plusieurs économistes commençaient déjà à annoncer une remontée des taux d’intérêt.

Le graphique des fluctuations hebdomadaires du cours de l’action de BCE au cours des cinq dernières années ne laisse aucun doute sur la sévérité de la chute du titre au cours des deux dernières années.

Sans oublier que celle-ci s’est produite pendant que les indices boursiers nord-américains atteignaient sans cesse de nouveaux sommets historiques.

Mis à part un court épisode au printemps 2023, le titre s’est continuellement maintenu en deçà de sa moyenne mobile de 200 jours (ligne grise) qui est le reflet de sa tendance à long terme, note Monica Rizk, analyste technique senior à Phases & Cycles.

Les deux tentatives de remontée du cours de l’action cette année, en janvier et en juillet, se sont butées à cette moyenne mobile sans pouvoir la franchir. « Cela indique que le titre n’a pas encore retrouvé la faveur des investisseurs et laisse croire que la baisse pourrait fort bien se poursuivre », dit-elle. Une zone de support existe à 42,50 $, mais il semble plutôt fragile, selon elle.

Résultats à venir

C’est le 7 novembre que les dirigeants de BCE dévoileront les résultats du troisième trimestre de l’entreprise. S’il faut en croire les analystes, ces résultats risquent fort de ne pas trop plaire aux investisseurs.

Les prévisions du consensus des analystes sont trop élevées, selon Adam Shine, analyste à la Financière Banque Nationale, qui annonçait le 30 septembre qu’il réduisait les siennes, lui dont les prévisions étaient auparavant supérieures à celles de ce même consensus.

Il prévoit pour le troisième trimestre que les revenus totaux atteindront 5,99 milliards de dollars (G $) alors que la prévision du consensus se situe à 6,08 G $. Pour l’ensemble de l’année 2024, Adam Shine prévoit des revenus de 24,46 G $, en baisse de 0,9 % par rapport à ceux de 2023.

De son côté, la direction de BCE prévoit une croissance qui se situe entre 24,67 G $ et 25,66 G $, soit entre 0 % et 4 % sur un an. Notons que la direction aura le loisir de modifier cette prévision lors de la divulgation de ses résultats trimestriels.

Sans attendre ces résultats, l’analyste de la Financière Banque Nationale abaisse sa recommandation sur le titre de BCE de « surperformance » à « performance égale au secteur » et diminue son cours cible sur un an, qui passe de de 52 $ à 48 $.

Même nos voisins du Sud semblent prudents quant aux prochains résultats de BCE. Sebastiano Petti, analyste chez JP Morgan, réduit lui aussi ses prévisions de revenus et de bénéfices.

Pour l’ensemble de l’année 2024, il prévoit que les revenus consolidés diminueront de 1,2 % sur un an. Quant au bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement (BAIIA), il sera en hausse de 1,3 % selon l’analyste, ce qui est néanmoins inférieur à la fourchette de prévisions de la direction de la société, qui table sur une hausse de 1,5 % à 4,5 %.

L’analyste de JP Morgan préfère pour l’instant demeurer sur les lignes de côté compte tenu de l’intense concurrence qui persiste dans les écosystèmes des secteurs de la téléphonie mobile et filaire. Son cours cible d’ici décembre 2025 est de 47 $, soit près du niveau auquel le titre se négociait au début du mois d’octobre.

« On ne sait pas où est la fin »

C’est la réponse que nous donne Jean-Paul Giacometti, vice-président et gestionnaire de portefeuille à Claret Gestion de placements, lorsqu’on lui demande si le titre de BCE peut constituer une occasion d’achat après un recul d’environ 40 % depuis deux ans.

Le gestionnaire note que les revenus totaux de la société, qui atteignaient 21,5 G $ en 2015, seront d’environ 24,5 G $ en 2024 selon les prévisions autant de la direction que des analystes. C’est une bien mince augmentation d’environ 14 % en neuf ans, note-t-il.

La question du dividende occupera bien sûr l’attention le 7 novembre. La direction n’a manifesté aucun signe permettant de prévoir une possible coupure à ce moment.

Au cours actuel du titre, le rendement du dividende est de 8,7 %. « Il s’approche du niveau de 9 %-10 % où quelque chose devra se passer », croit le gestionnaire de Claret.

Un rendement de dividende aussi élevé est habituellement un signe de désaveu des actionnaires envers un titre, et la direction de la société devra tôt ou tard s’y attaquer.