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Le titre d’Apple ne dérougit pas

Jean Gagnon|Édition de la mi‑octobre 2024

Le titre d’Apple ne dérougit pas

Selon Daniel Yves, Apple pourrait vendre plus de 240 millions d’iPhone durant son année financière 2025. (Photo: Adobe Stock)

La BOUSSOLE BOURSIÈRE est une rubrique qui traite d’un événement marquant et de son effet sur le marché boursier en s’appuyant sur l’analyse d’experts. Cette analyse pourra être autant fondamentale que technique.

boussole(Illustration: Camille Charbonneau)

Nul doute que l’examen du graphique des cinq dernières années d’Apple (AAPL, 228,25 $ US) nous envoie une image très positive. Une solide tendance à la hausse est bien en place depuis le passage de la pandémie de COVID-19 à l’hiver 2020, comme l’illustre bien la flèche sur le graphique.

Cette tendance est soutenue par quelques autres facteurs intéressants, signale Monica Rizk, analyste technique senior à Phases & Cycles. D’abord, le cours de l’action se situe bien au-dessus de sa moyenne mobile de 200 jours (ligne grise), qui est le reflet de sa tendance à long terme. Mais aussi, les sommets atteints en juillet et en décembre 2023 vont maintenant constituer un solide niveau d’appui (ligne ombragée rose) qui pourrait freiner une éventuelle correction et garder intacte la tendance à la hausse, explique l’analyste.

Supercycle de remplacement de l’iPhone

Apple lançait il y a quelques semaines son iPhone 16. Il était très attendu, puisqu’il allait permettre l’arrivée d’applications propulsées par l’intelligence artificielle (IA). Aux dires de plusieurs observateurs, dont Daniel Ives, analyste à Wedbush, il s’agit d’un événement marquant qui déclenchera un supercycle de remplacement de l’iPhone.

L’analyste estime que 300 millions des 1,5 milliard d’iPhone dans le monde n’ont pas été remplacés depuis au moins quatre ans, ce qui offre à Apple une occasion rêvée de faire la promotion de son nouvel appareil.

Certains sceptiques signalent le peu de fonctionnalités de l’Apple Intelligence (l’IA d’Apple) annoncées jusqu’à présent. Daniel Ives rétorque que la société de Cupertino, en Californie, s’occupe surtout actuellement à bâtir un solide trimestre qui culminera avec la saison des fêtes, tout en présentant de nombreuses fonctionnalités au cours des prochains mois. Selon lui, Apple pourrait vendre plus de 240 millions d’iPhone durant son année financière 2025.

De bonnes ventes

Le fournisseur de services de télécommunications T-Mobile US tenait le 18 septembre sa journée des analystes. À ce moment, selon Erik W. Woodring, analyste à Morgan Stanley, le PDG de l’entreprise, Mike Sievert, signalait que malgré le peu de fonctionnalités de l’Apple Intelligence, les ventes du nouvel appareil semblaient déjà plus fortes que celles de l’an dernier qui, elles-mêmes, avaient été robustes. Le phénomène devrait d’après lui s’accélérer au fur et à mesure que les nouvelles fonctionnalités d’IA apparaîtront.

Daniel Ives va jusqu’à prévoir que plus de 20 % de la population consommatrice mondiale va éventuellement interagir avec l’IA par l’entremise d’un appareil d’Apple au cours des prochaines années. Il estime que le cours de l’action d’Apple touchera 300 $ US d’ici 12 mois.

Le titre est-il devenu trop cher ?

Si l’enthousiasme est palpable chez certains analystes, il n’en convient pas moins d’examiner un peu plus froidement l’environnement dans lequel évalue présentement Apple. L’action du fabricant de l’iPhone performe très bien et se négocie actuellement à neuf fois son chiffre d’affaires, soit un nouveau sommet historique, constate Cimon Plante, gestionnaire de portefeuille à la Financière Banque Nationale et qui suit de près les titres des secteurs de croissance.

« Tout cela dans un environnement où les dépenses de consommation discrétionnaire sont sous pression à la suite d’une période de taux d’intérêt élevés et d’une mollesse de l’économie en général », dit-il.

Le bénéfice par action annuel d’Apple a doublé depuis cinq ans, passant de 3,00 $ US à 6,00 $ US, mais le cours de l’action a quadruplé durant cette période, montrant bien par cette expansion du ratio cours/bénéfice la forte surenchère à laquelle le titre est soumis.

Le gestionnaire ne doute pas de la qualité de la direction de l’entreprise ni de son habileté à renouveler ses produits, tout en s’appuyant sur un gigantesque programme de rachat d’actions de 110 milliards de dollars américains (G $ US).

Il souligne toutefois que l’ampleur du supercycle de remplacement des téléphones intelligents reste à déterminer.

Une ombre au tableau, des poursuites anticoncurrentielles tiennent Apple à la merci, entre autres, de décisions qui seront rendues par les régulateurs quant à l’utilisation exclusive du moteur de recherche de Google par les utilisateurs d’iPhone.

Si Apple perdait sur ce point, on parlerait d’un manque à gagner de 20 G $ US, soit environ 5 % du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise, souligne Cimon Plante.

Changement de thème

On surfe depuis 12-13 ans sur le thème de la numérisation, observe le gestionnaire. Si bien que le secteur de la technologie occupe maintenant 50 % de la valorisation boursière de l’indice
S&P 500.

Ce ne sera peut-être pas la prochaine tendance, et des titres comme Apple pourraient avoir de la difficulté à suivre le même rythme et doubler en valeur au cours des trois prochaines années.

Les grands gestionnaires de fonds sont toujours à l’affût des nouveaux cycles d’investissement et pourraient être enclins à chercher d’autres industries vers lesquelles diriger une plus grande partie de leurs actifs sous gestion, croit Cimon Plante.