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Peu d’engouement pour les entrées en Bourse d’Arm ou Birkenstock

AFP|Publié le 23 octobre 2023

Peu d’engouement pour les entrées en Bourse d’Arm ou Birkenstock

Pour une experte, le cas Birkenstock est un bon exemple «de la déconnexion sur la valorisation», entre des postulants à la Bourse qui se voient plus beaux qu'ils ne le sont et des investisseurs toujours prudents. (Photo: 123RF)

La série d’introductions en Bourse majeures qu’a connue Wall Street depuis mi-septembre s’est soldée par des performances en demi-teinte et n’a pas suscité le déclic attendu par les investisseurs, la prudence restant de mise.

Vendredi, les cours des quatre nouveaux venus de la cote, Arm, Instacart, Klaviyo et Birkenstock, se situaient tous en deçà de leur prix d’introduction.

«Quand les trois premières (Arm, Instacart et Klaviyo) ont monté, cela a suscité beaucoup d’optimisme, de l’euphorie», observe Richard Truesdell, avocat spécialiste des introductions en Bourse au sein du cabinet Davis Polk & Wardwell.

Au soir de leur première journée sur la place new-yorkaise, Arm (+24%), Instacart (+12%) et Klaviyo (+12%) faisaient ainsi tous figures de vainqueurs.

«Du coup, des gens qui ne se voyaient pas entrer en Bourse au quatrième trimestre ont essayé d’accélérer les choses», poursuit l’avocat. «Malheureusement, [les trois nouveaux venus] sont tombés dans le rouge, puis Birkenstock a baissé d’entrée (-12% pour sa première séance).»

«Les séances suivantes n’ont pas été bonnes, et c’est important pour les candidats […] qui peuvent geler leurs projets» de cotation, explique Avery Spear, du cabinet Renaissance Capital.

Depuis que Birkenstock a trébuché dès son premier galop, aucun grand nom ne s’est enregistré publiquement auprès du régulateur américain, la SEC (Securities and Exchange Commission), en vue d’une cotation.

Le réseau social Reddit, le spécialiste de la gestion de données Databricks ou la société de paiements dématérialisés Stripe, attendus depuis plusieurs mois, restent en retrait.

Wall Street n’a vu aucune introduction en Bourse de plus de 20 millions de dollars américains cette semaine.

 

Le spectre du «shutdown»

«L’environnement actuel n’est pas favorable aux sociétés fragiles qui veulent aller en Bourse», souligne Avery Spear, «mais il n’est pas non plus propice aux entreprises solides, parce qu’elles ne parviennent pas à obtenir le prix qu’elles veulent.»

Pour elle, le cas Birkenstock est un bon exemple «de la déconnexion sur la valorisation», entre des postulants à la Bourse qui se voient plus beaux qu’ils ne le sont et des investisseurs toujours prudents.

Pour Jay Ritter, professeur à l’université de Floride et spécialiste des «IPO» (initial public offering, le terme anglais des introductions), le faible volume des introductions, malgré l’arrivée récente de quatre poids lourds, tient autant au manque d’appétit du marché qu’aux réserves des candidats, qui «ne veulent pas accepter une remise à niveau des valorisations».

Pour Richard Truesdell, «si vous n’avez pas déposé votre dossier cette semaine, il est assez improbable que vous puissiez entrer en Bourse avant le « shutdown »», c’est-à-dire la possible suspension d’une partie des activités du gouvernement américain, faute d’accord budgétaire.

Initialement fixée au 30 septembre, la limite a été repoussée au 17 novembre, mais beaucoup craignent que le blocage ne soit pas résolu d’ici là, d’autant que la majorité républicaine n’a plus de chef de file depuis plusieurs semaines.

La SEC a indiqué qu’un «shutdown» entraînerait la suspension de l’examen de tous les dossiers d’entrée en Bourse.

Outre cette perspective, les opérateurs ont en tête la détérioration de l’environnement économique, sous l’effet du resserrement monétaire brutal entamé l’an dernier, relève Avery Spear. Les turbulences géopolitiques consécutives à la guerre entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas ont aussi assombri l’horizon.

«Même si le contexte actuel est difficile, avec des vents défavorables, les choses se sont un peu améliorées», a déclaré la semaine dernière, Jeremy Barnum, directeur financier de JPMorgan Chase, évoquant les activités de banque d’investissement, qui comprennent les entrées en Bourse.

«Les gens sont inquiets de la vitalité du marché au quatrième trimestre, mais il y a l’espoir que le premier trimestre (2024) constitue un nouveau départ et que les choses s’améliorent», avance Richard Truesdell.

Pour Jay Ritter, «la situation reste instable» et comparable à la sortie des grandes dégringolades du passé, que ce soit l’explosion de la bulle internet, en 2000, ou la crise financière de 2008.

«La trajectoire semble assez similaire», dit-il. «Il va nous falloir encore une année d’activité relativement faible avant que les choses ne reviennent à la normale.»