Quartier en pleine mutation, le District Central situé au cœur de l’arrondissement Ahuntsic-Cartierville a une belle carte à jouer dans le secteur de l’agriculture urbaine, avec notamment de nombreux locaux vacants propices au déploiement de cette activité en plein essor.
«Le District Central n’a rien à envier aux autres quartiers sur sa capacité à nourrir Montréal.» Pour Jean-Philippe Vermette, président de la Centrale agricole (une coopérative de solidarité regroupant des producteurs urbains), cet ancien secteur industriel en pleine métamorphose possède un profil architectural adéquat pour cette activité florissante. Le changement de zonage opéré dans le secteur de l’Acadie est aussi une aubaine pour en accroître son développement.
Le Carrefour de recherche, d’expertise et de transfert en agriculture urbaine (CRETAU) a publié en juin dernier le premier portrait de l’agriculture urbaine commerciale au Québec, dont vous êtes l’un des auteurs. Que faut-il en retenir ?
On assiste à un véritable boom de l’agriculture urbaine commerciale depuis les 10 dernières années. Lors de la publication de cette étude, le Québec comptait 50 entreprises d’agriculture urbaine, dont une grande partie à Montréal, mais ce chiffre ne cesse d’augmenter. Ce qu’il sera intéressant d’analyser par la suite, c’est la survie de ces entreprises, leur développement et leur place sur l’échiquier agroalimentaire. Est-ce que cela va se faire au détriment de petites fermes biologiques en région, ou vont-elles développer leur propre marché ?
Le succès des Fermes Lufa, présentes sur le territoire du District Central, est un bel exemple de cet engouement. Comment expliquer cet essor ?
Cela s’inscrit dans un mouvement de fond à l’échelle mondiale. Les gens veulent se rapprocher de la nature, et donc de leur alimentation. Ils veulent plus de proximité et de transparence.
Le quartier du District Central semble avoir une belle carte à jouer en matière d’agriculture urbaine. Quels atouts possède-t-il pour favoriser son développement ?
L’agriculture a trop besoin d’espaces pour que ce soit viable en ville. Il faut donc trouver d’autres solutions. Le District Central a un profil intéressant, car il possède beaucoup de toits plats, mais aussi des bâtiments suffisamment robustes pour accueillir ce type d’activité. Pour prendre l’exemple de la Centrale agricole, nous avons un toit de 40 000 pieds carrés, dont 10 000 pieds ont été transformés en jardins. Il reste de la marge. Il faut ajouter à ça de nombreux locaux vacants avec des loyers intéressants. Il s’agit souvent d’espaces industriels en requalification, dont les intérieurs n’ont pas été trop aménagés, donc propices à accueillir des installations agricoles.
Diriez-vous que l’architecture est la principale alliée du District Central ?
L’architecture, mais aussi des propriétaires immobiliers motivés, qui ont envie de louer. C’est un quartier qui se cherche encore, mais on sent que tous les ingrédients sont réunis pour une implantation durable de l’agriculture urbaine.
Quel est le profil des entreprises ou organismes qui ont pris racine dans le District Central ?
On retrouve deux grandes catégories d’agriculture urbaine. D’un côté, une agriculture urbaine entrepreneuriale, avec des jeunes start-up qui développent des solutions high-tech ou innovantes. De l’autre, des entreprises d’économie sociale, qui vont faire de l’insertion ou distribuer une partie de leurs récoltes à des banques alimentaires. On peut citer l’exemple du Marché Ahuntsic-Cartierville, qui n’est pas producteur mais fait de la distribution solidaire dans le quartier. On veut garder cet équilibre entre les entreprises à but lucratif et les organismes à caractère social ou coopératif.
Dans un contexte de densification urbaine galopante, l’agriculture des villes représente-t-elle une alternative à celle des champs ? Pour reprendre une des phrases du CRETAU, « un terreau fertile pour cultiver la ville du 21e siècle » ?
L’agriculture des champs, c’est beaucoup de soja, de maïs, de blé et de viande. En ville, on ne peut pas avoir tout ça. Mais on sent que c’est en train de changer, les gens consomment de moins en moins de viande et de blé. Si l’humain du 21e siècle change son alimentation pour des protéines végétales ou d’insectes, mange moins de farine et plus de fruits et légumes, on pourrait imaginer que la ville puisse nourrir l’humain du 21e. Pour l’instant, quand on regarde l’assiette du consommateur moyen, c’est une grosse portion de viande, une grosse portion de féculents et une petite de fruits et légumes.
Quelles sont aujourd’hui les productions présentes sur le site de la Centrale agricole, et celles qui pourraient se développer à l’avenir ?
Nous avons actuellement des insectes, des champignons et des maraîchers, qui sont des filières de production intéressantes en ville, tout comme les micro-pousses et l’aquaponie. L’industrie du cannabis pourrait aussi se développer dans le District Central.
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