6 principes à connaître sur l’économie sociale
Conseil d’économie sociale de l’île de Montréal (CESIM)|Mis à jour le 12 juin 2024Vous l’ignorez peut-être, mais vous faites probablement déjà affaire avec une entreprise d’économie sociale. Et contrairement aux sociétés cotées en Bourse, les notions de revenus et de profits ne sont pas les principaux objectifs de ce type d’organisation. Au Québec, la Loi sur l’économie sociale adoptée en 2013 témoigne de la vitalité de ce modèle d’entrepreneuriat et vient définir certains principes directeurs nous permettant d’en apprécier la teneur. Ouvrez l’œil, l’économie sociale est partout, et plus présente que vous ne le pensez !
Alors, l’économie sociale, de quoi s’agit-il ? « C’est une façon d’entreprendre autrement. Une entreprise d’économie sociale, c’est une coopérative, un organisme à but non lucratif ou une mutuelle qui vend des produits et des services avec une finalité sociale. Les entreprises qui adoptent ce modèle choisissent une forme de gestion collective. Il n’y a pas de propriétaire unique, mais plutôt un principe selon lequel chaque membre possède un droit de vote. Une telle communauté se donne une capacité d’agir et les moyens d’assurer sa pérennité dans le temps », explique d’entrée de jeu Anyle Côté, directrice générale du Conseil d’économie sociale de l’île de Montréal (CESIM).
Nous sommes tous, ou presque, membres d’une entreprise d’économie sociale.
La preuve ?
Desjardins, cette grande coopérative bien de chez nous, est considérée comme une pionnière en la matière. « Ce désir d’aider est ancré dans notre ADN et reflète bien notre mission », rappelle Driss Akrab, directeur principal, chaîne d’approvisionnement et gouvernance des fournisseurs, pour l’institution. Et il y a probablement d’autres organisations que vous fréquentez et qui vous viennent en tête : le Cinéma Beaubien et le Cinéma du Parc, les magasins Renaissance ou CycloChrome, qui assure l’entretien des vélos Bixi, par exemple.
« L’économie sociale contribue de façon significative au développement du Québec, et particulièrement à celui de la région de Montréal. En effet, l’Institut de la statistique du Québec dénombre 2 800 entreprises d’économie sociale sur le territoire montréalais. Celles-ci emploient plus de 67 000 travailleurs, générant du coup 11,7 milliards de dollars de revenus annuels. », ajoute Anyle Côté.
Ces coopératives, mutuelles et organismes à but non lucratif (OBNL) réalisent des activités économiques dans l’objectif de répondre à des besoins sociaux : créer des emplois, favoriser l’insertion socioprofessionnelle ou protéger l’environnement, à titre d’exemple. Les entreprises d’économie sociale sont également reconnues pour leur résilience. En effet, 85 % des entreprises d’économie sociale montréalaise cumulent plus de dix ans d’existence. Elles résistent beaucoup mieux aux soubresauts économiques, parce qu’elles ont l’appui de leur communauté et répondent à leurs besoins. Et cette résilience s’accompagne de plusieurs autres caractéristiques que voici.
Six principes propulsent chaque entreprise d’économie sociale (OBNL, coopératives et mutuelles) au Québec
1- L’obligation de répondre aux besoins de ses membres
La mission sociale est la raison d’être d’une entreprise d’économie sociale. Elle doit servir ses membres et la collectivité, en améliorant leur bien-être et en proposant des emplois de qualité. Les surplus générés sont d’ailleurs réinvestis dans la mission de l’entreprise ou versés à ses membres au prorata des opérations effectuées entre chacun d’eux et l’entreprise.
2- Une autonomie de gestion face à l’État
Une entreprise d’économie sociale n’est pas sous le contrôle décisionnel d’un organisme public. L’État ne doit donc pas s’ingérer dans les décisions prises par le conseil d’administration ou par l’assemblée générale d’une entreprise d’économie sociale.
3- Une gouvernance démocratique par les membres
Contrairement à ce qui a cours lorsqu’on détient une participation financière dans une société par actions (où une action offre minimalement un droit de vote), chaque membre d’une entreprise d’économie sociale ne détient qu’un seul vote. Le droit de vote s’exerce donc indépendamment du pouvoir financier d’un membre votant.
4- La viabilité économique est recherchée
Les activités économiques sont réalisées dans une logique entrepreneuriale. À titre d’exemple, sur l’île de Montréal seulement, sur les 11,7 milliards de $ de revenus de l’économie sociale, 90 % proviennent du chiffre d’affaires des entreprises (c’est-à-dire de la vente de biens ou de services et des cotisations des membres). Les revenus générés doivent donc permettre une viabilité économique pour que les entreprises puissent accomplir leur mission. Et les surplus réalisés sont alors utilisés à bon escient !
5- Les surplus n’enrichissent pas des investisseurs
Les règles applicables à l’entreprise d’économie sociale interdisent la distribution des surplus générés par ses activités ou prévoient une distribution des surplus aux membres, au prorata des opérations effectuées entre chacun d’eux et l’entreprise. Ces mêmes surplus peuvent également être réinvestis dans l’entreprise, pour développer un nouveau service, à titre d’exemple, ou soutenir davantage les communautés qu’elles desservent.
6- Une pérennité assurée
Une entreprise d’économie sociale ne peut être vendue ou dissoute sans l’accord de ses membres. En cas de dissolution, le reliquat de ses biens doit être dévolu à une autre personne morale partageant des objectifs semblables. « Comme elle appartient à ses membres et répond aux besoins de sa communauté, une entreprise d’économie sociale ne sera pas délocalisée pour répondre à des impératifs économiques », souligne Anyle Côté.
Une vision d’avenir remplie de promesses
Les entreprises d’économie sociale comptent sur différents types de clientèle, et plusieurs grandes sociétés du Québec se font d’ailleurs un devoir d’être de grands donneurs d’ordres auprès de celles-ci. C’est notamment le cas d’Hydro-Québec, qui souhaite impliquer ses partenaires locaux dans la mise en place d’une chaîne d’approvisionnement plus robuste. À cet effet, des passerelles plus étroites pourraient être mises en place entre les grandes institutions et les entreprises d’économie sociale montréalaises afin d’innover.
« Aujourd’hui, les grandes organisations font affaire avec des entreprises d’économie sociale qui existent déjà. Mais éventuellement, on pourrait même penser à en créer de toutes pièces pour répondre à des besoins dans des créneaux particuliers qui ne sont toujours pas couverts par l’économie sociale. Plusieurs institutions pourraient ainsi mettre la main à la pâte pour développer des entreprises d’économie sociale 2.0, sachant que celles-ci auront ensuite un carnet de commandes garanti avec Hydro-Québec et d’autres sociétés partenaires », explique ainsi Bertrand Gimat, chef des orientations stratégiques en approvisionnement pour Hydro-Québec.
La Ville de Montréal est aussi un acteur important qui soutient l’économie sociale. « Les entreprises d’économie sociale donnent l’exemple et elles achètent auprès de fournisseurs ayant des pratiques responsables. Elles privilégient les circuits courts, limitant d’autant les émissions de gaz à effet de serre (GES). Elles sont proactives, se montrent ouvertes à développer une offre innovante et elles valorisent l’économie circulaire. Un peu comme si cette grande chaîne n’avait plus de maillon faible », conclut France Doire, chargée d’expertise et de pratique principale, approvisionnement responsable pour la Ville de Montréal.
LE COIN DES BONNES ADRESSES :
Répertoire du Conseil d’économie sociale de l’île de Montréal (CESIM)
Le CESIM est l’instance montréalaise de développement en matière d’économie sociale. Sa mission est de faire rayonner et d’amplifier ce mouvement, de promouvoir et de soutenir l’émergence, le dévelop-pement et la croissance d’entreprises et de projets d’économie sociale, en favorisant la concertation et les partenariats avec les acteurs locaux.