Les employés non vaccinés bientôt victimes de ségrégation?
La Presse Canadienne|Publié le 29 juin 2021Alors que les lieux de travail commencent à rouvrir, les employeurs se demandent comment y assurer la sécurité de tous, y compris ceux qui ne sont pas vaccinés. (Photo: La Presse Canadienne)
Les travailleurs non vaccinés qui retourneront au bureau pourraient être tenus de continuer à porter des masques, d’éviter les espaces communs ou d’avoir des horaires décalés – ou même être invités à rester à la maison, selon les experts.
Alors que les lieux de travail commencent à rouvrir, les employeurs se demandent comment y assurer la sécurité de tous, y compris ceux qui ne sont pas vaccinés.
C’est une situation qui risque de stigmatiser les personnes plus réfractaires aux vaccins et de déclencher potentiellement de l’anxiété au travail pour certains, selon les experts en ressources humaines.
Certains employeurs ont mis en place des mesures incitatives pour encourager leurs travailleurs à se faire vacciner contre la COVID−19, par exemple des congés payés pour les vaccinations et des prix comme des cartes−cadeaux et des cadeaux d’entreprise après une injection.
D’autres envisagent des politiques qui font de la vaccination une condition d’emploi nécessaire, ce qui pourrait occasionner des pertes d’emploi pour des travailleurs qui choisissent de ne pas se faire vacciner pour des raisons personnelles.
«Nous avons eu des clients qui travaillent dans un bureau et qui souhaitent proposer une politique de vaccination obligatoire sur leur lieu de travail», a indiqué Olivia Cicchini, spécialiste du droit du travail chez Peninsula Canada, une société torontoise de conseil en ressources humaines et en santé et sécurité.
«Si vous pouvez prouver que vous avez besoin de cette exigence, par exemple si vos employés voient des clients ou si vous n’avez pas assez de place pour établir une distance physique, alors vous pourrez peut−être le justifier.»
Cependant, les personnes qui ne peuvent pas être immunisées pour des raisons médicales ou religieuses, protégées par la législation sur les droits de la personne, seraient exemptées de vaccins obligatoires. En outre, la plupart des travailleurs syndiqués ne sont pas obligés, eux non plus, d’être vaccinés, a−t−elle souligné.
«Si votre lieu de travail est au Canada et qu’il n’est pas syndiqué, les employeurs peuvent licencier des employés pour n’importe quelle raison à tout moment, tant que cette raison n’est pas discriminatoire», a précisé Mme Cicchini.
«Si un employé choisit de ne pas se faire vacciner simplement en raison d’un choix personnel, l’employeur pourrait choisir de le licencier sans motif et de lui verser son indemnité de licenciement.»
Confidentialité et stigmatisation
Cependant, les règles qui distinguent les employés qui ont choisi de ne pas se faire vacciner – comme les masques obligatoires, les quarts de travail décalés ou la ségrégation des travailleurs non vaccinés à certains étages ou zones du bureau – soulèvent des inquiétudes au chapitre de la confidentialité et la stigmatisation, estiment des experts.
«Leur statut vaccinal devient très évident pour tout le monde au bureau», a observé David Zweig, professeur agrégé de comportement organisationnel et de gestion des ressources humaines à l’Université de Toronto.
«Cela devient un peu un problème de confidentialité parce que tout à coup, tout le monde sait que vous n’avez pas été vacciné.»
Les employeurs devraient d’abord développer des programmes incitatifs pour encourager les employés hésitants à recevoir le vaccin, a−t−il affirmé.
Par exemple, les Compagnies Loblaw offrent aux travailleurs jusqu’à trois heures de congé payé pour une vaccination, tandis que les Aliments Maple Leaf ont organisé plusieurs cliniques de vaccination sur les lieux de travail pour leurs employés.
Pourtant, bien qu’il soit utile de réduire les obstacles à l’obtention d’un vaccin et de fournir des mesures incitatives, la priorité absolue d’un employeur reste la sécurité collective de tous les employés, a fait valoir M. Zweig.
«Cela signifie que si vous n’êtes pas vacciné, vous devrez probablement porter (un équipement de protection individuelle, EPI) lorsque vous retournerez au bureau», a noté M. Zweig. «C’est une attente raisonnable pour protéger la sécurité de toutes les autres personnes vaccinées.»
Il a ajouté: «La clé ici est que les employeurs fassent tout ce qui est nécessaire pour s’assurer que les gens sont en sécurité et se sentent en sécurité et atténuent certaines des angoisses entourant le retour au travail.»
Si les travailleurs non vaccinés sont mal à l’aise d’être distingués au bureau, M. Zweig croit qu’il pourrait y avoir des options pour les accommoder raisonnablement avec des mesures telles qu’un espace de travail séparé, des journées de travail décalées, différents espaces communs ou un travail continu à domicile.
Pourtant, il pourrait y avoir des répercussions sur la carrière des travailleurs qui choisissent de continuer à travailler à domicile pour éviter d’être vaccinés, a−t−il estimé.
«Il est probablement certain que cela aura un impact sur votre progression de carrière», a noté M. Zweig. «Si vous travaillez à domicile, mais que votre équipe est de retour au bureau, vous n’êtes pas dans le coup.»
En fin de compte, si quelqu’un choisit de ne pas se faire vacciner pour des raisons personnelles, «il a un choix à faire», a−t−il affirmé.
«Ils doivent faire face aux conséquences de leurs actions», a tranché M. Zweig. «Ils devront porter des EPI lorsqu’ils seront au travail et si un non−vacciné est mal à l’aise avec cela, alors il aura un choix à faire.»