Rose Fierimonte aimerait exporter la formule mise sur pied avec les ELLES de la construction d’un océan à l’autre.
FEMMES D’AFFAIRES. En devenant l’une des premières femmes à la tête d’une entreprise de construction au Québec dans les années 1980, Rose Fierimonte a brisé une chasse gardée masculine. Depuis, elle a présidé les Elles de la construction, un organisme pour donner un coup de pouce aux autres femmes du domaine. Une formule qu’elle espère exporter partout au Canada.
« Je m’étais dit qu’à 55 ans, j’allais me retirer en douceur de mon rôle d’entrepreneure générale, après avoir travaillé jusqu’à 120 heures par semaine, au grand froid comme en canicule. Et je suis actuellement dans ce processus », lance d’emblée Mme Fierimonte, en début d’entrevue. Mais, quand elle regarde le chemin parcouru depuis qu’elle s’est lancée en affaires comme copropriétaire d’une entreprise de construction en 1988, elle n’est pas peu fière. « Au début, je n’affichais pas que j’étais la patronne. Plusieurs pensaient d’ailleurs que mon directeur de projet était le président et que moi, j’étais l’adjointe administrative. »
Si elle a commencé dans l’ombre, elle n’a pas tardé à se tailler une place de choix dans cette industrie. Depuis, la propriétaire de DCI (Dorbec Construction) a lancé plusieurs entreprises dont l’une est composée uniquement d’une main-d’oeuvre féminine, Rose Construction, a créé deux sociétés d’investissement spécialisées et est devenue la première femme présidente du conseil d’administration de l’Association patronale des entreprises en construction du Québec après 120 ans d’existence. Sans compter les nombreux prix récoltés, notamment l’hommage Crew M, qui souligne l’excellence des femmes en immobilier commercial.
Bâtir son succès
Elle doit ce parcours réussi à sa capacité à bien s’entourer. « J’ai toujours eu beaucoup de facilité à recruter des talents. Cela permet de bâtir des équipes avec le talent des gens, de créer des synergies. Ma force, ce n’est pas seulement de construire des édifices, mais aussi des relations d’affaires, de confiance. » Une formule qu’elle n’a pas appliquée qu’à son entreprise, mais bien à tout le domaine de la construction.
En effet, Mme Fierimonte ne jure que par le mentorat et le réseautage. La meilleure façon de faire éclore les talents, selon elle. C’est d’ailleurs pourquoi elle a contribué à transformer les Elles de la construction, l’initiative de l’entrepreneure privée Isabelle Perron, en organisme à but non lucratif. « C’était la première association des femmes en construction, et après cinq ans d’existence, elle compte plus de 1 000 membres », s’enthousiasme-t-elle.
L’organisme offre formations, occasions de réseautage, mentorat et autres services pour toutes les femmes gravitant dans le domaine. Un réseau d’entraide extrêmement puissant, estime Mme Fierimonte, qui a elle-même servi de mentor à plusieurs. « Je pense que j’ai influencé cette industrie, que j’ai encouragé les femmes qui s’intéressaient à aller au bout de leur passion. Aujourd’hui, plusieurs ont lancé des entreprises innovantes, qui font les choses différemment. » Elle cite en exemple Gestion Monox, qui se spécialise en prévention des intoxications au monoxyde de carbone sur les sites d’excavation à l’explosif. Fondée par Nadya Michel, cette PME, qui n’a pas d’équivalent au Québec, a contribué à édicter des normes en cette matière, ajoute-t-elle.
Si elle délaisse doucement son rôle d’entrepreneure générale, Mme Fierimonte n’a pas l’intention d’accrocher la serviette pour autant. Actuellement, elle est impliquée dans le comité consultatif du Centre de recherche en construction du CNRC, à Ottawa, et dans l’Association canadienne de la construction, deux instances qui se penchent sur la diversité et l’inclusion dans l’industrie.
De ce fait, Mme Fierimonte aimerait exporter la formule mise sur pied avec les Elles de la construction d’un océan à l’autre, « car ce besoin de briser l’isolement, de se réunir, est présent aussi dans les autres provinces ». Elle estime aussi que l’industrie de la construction doit s’ouvrir non seulement aux femmes, mais également au personnel issu de minorités ethniques et culturelles. Car si la diversité est un gage de qualité, c’est également une solution au problème de relève auquel doivent faire face plusieurs entrepreneurs généraux, dont elle. Une autre bataille qu’elle entend livrer dans les prochaines années.