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Comment bien préparer une reprise?

Philippe Jean Poirier|Édition de la mi‑mai 2021

Comment bien préparer une reprise?

Les repreneurs potentiels doivent établir leur marge de financière, pour s’assurer de cibler des entreprises qui sont à leur portée. (Photo: 123RF)

TRANSFERT D’ENTREPRISE: GROS PLAN SUR LE REPRENEURIAT. A-t-on l’étoffe d’un entrepreneur ? Est-on prêt à travailler sans compter les heures et à faire une variété de tâches — parfois ingrates — pour le bien de son entreprise ? Possède-t-on des compétences minimales en gestion et en comptabilité ? Voilà une des nombreuses questions à se poser avant — et non après — de se lancer dans un projet de reprise entrepreneuriale. 

« Dans une démarche de repreneuriat, bien se connaître est fondamental », prévient Christine Lavoie, conseillère au Centre de transfert d’entreprise du Québec. Clarifier les ambitions, mais aussi les attentes des repreneurs est une des premières étapes d’accompagnement du CTEQ, à la suite d’une nouvelle inscription à leurs services. 

Ceux qui n’ont pas d’expérience entrepreneuriale doivent se demander si c’est un style de vie qui leur conviendra. Et aussi, s’ils ont le soutien de leurs proches dans ce projet exigeant, qui comporte sa part de risque. 

Bien sûr, les repreneurs doivent s’entourer de certaines personnes clés dans le processus de reprise: un comptable, un avocat, un notaire et si besoin est, un coach d’affaires. Toutefois, ils doivent aussi faire l’examen de leurs propres compétences de gestion et de comptabilité. 

« Quatre-vingt-quinze pour cent des entreprises québécoises sont des TPE ou des PME, rappelle Christine Lavoie. La plupart de ces entreprises n’ont pas comité. C’est une même personne qui contrôle la plupart des aspects de l’entreprise. » Comprendre une notion comme « le coût de revient » est primordial pour éviter de vendre ses produits à perte, illustre la conseillère.

 

Définir ce qu’on cherche 

Des repreneurs potentiels se présentent au CTEC en affirmant qu’ils sont à la recherche d’un « coup de cœur ». « Nous les invitons à pousser la réflexion un peu plus loin, explique Christine Lavoie. Les repreneurs doivent aussi se demander s’ils ont une connaissance suffisante du secteur d’activité dans lequel ils veulent se lancer. Parfois, la réponse est non. » 

Enfin, les repreneurs potentiels doivent établir leur marge de financière, pour s’assurer de cibler des entreprises qui sont à leur portée. « Les repreneurs rédigent un bilan financier personnel, pour avoir une idée de la mise de fonds à leur disposition. De plus, ils doivent établir le revenu personnel nécessaire à tirer de l’entreprise pour maintenir leur style de vie. » 

 

Découvrir l’autre partie 

Avec ces informations préalables en main, les repreneurs sauront dans quels secteurs et quels types d’entreprises rechercher. Leur attention doit ensuite se porter sur les cédants qui croiseront leur route. 

« Souvent, ce que le repreneur oublie de faire, c’est de bien cerner les intentions du cédant, explique Sylvain Houde, directeur général de la firme-conseil spécialisée en transfert d’entreprise Evoluo. Veut-il rester ou non ? Parfois, un cédant qui reste trop longtemps peut retarder la transition, parce que les employés vont continuer de s’identifier à son leadership. » 

Les repreneurs ont aussi intérêt à s’intéresser à la dimension émotive de la transaction. « Si on prend le scénario d’une reprise familiale, on doit s’assurer d’impliquer toute la famille. Ce n’est pas le genre de conversation qui se fait un dimanche soir en soupant. » Les partis doivent officialiser le processus et tenir compte de l’avis de chacun. 

Dans le processus de rachat, les repreneurs évalueront bien sûr la bonne marche des opérations ainsi qu’à la santé financière de l’entreprise. Toutefois, un aspect trop souvent négligé est la composante « RH » de l’équation. Dans quel état d’esprit sont les employés de l’entreprise que l’on veut reprendre ?

« Malheureusement, ce n’est pas assez courant de mener une due diligence en ressources humaines, constate Sylvain Houde. Pour notre part, nous avons développé un questionnaire de satisfaction permettant aux employés de s’exprimer de manière anonyme. Lorsque les employés sont mobilité, ça peut venir ajouter de la valeur à l’entreprise. »

Le conseiller en repreneuriat encourage aussi les acheteurs à demander à voir les taux de roulement et d’absentéisme de l’entreprise. « Ce sont des données factuelles qui parlent. Si les taux d’absentéisme et de roulement sont élevés, ça peut lever un drapeau rouge sur l’ambiance qui règne dans l’entreprise. »

 

Considérer l’option du maillage entrepreneurial

En connaissant bien ses forces et ses faiblesses, le repreneur ouvre la porte à la possibilité d’effectuer un maillage avec un autre repreneur qui pourrait amener une contribution complémentaire au projet.

« Il peut nous arriver de proposer le maillage de deux repreneurs qui ont des compétences complémentaires, illustre Christine Lavoie. On peut imaginer un repreneur de type gestionnaire-comptable qui fera équipe avec un repreneur qui est ingénieur de profession, qui lui, va beaucoup mieux maîtriser l’aspect des opérations. »

Pour qu’un tel projet aille de l’avant, il devra bien sûr y avoir un « fit » de valeurs. D’où l’importance, encore une fois, de bien se connaître !