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Solid State of Mind veut révolutionner l’IA

Emmanuel Martinez|Publié le 10 janvier 2024

Solid State of Mind veut révolutionner l’IA

«Il est possible de bâtir une IA qui utilise moins d’énergie et moins de données en se basant sur la biologie, la psychologie cognitive et les neurosciences pour développer une nouvelle approche», affirme le président et cofondateur de Solid State of Mind, Maxime Julien. (Photo: Solid State of Mind)

L’intelligence artificielle (IA) a fait des pas de géants, mais elle doit changer de paradigme, afin de mieux s’adapter au monde réel et pour progresser, selon la start-up montréalaise Solid State of Mind. Elle propose donc une nouvelle direction qui pourrait révolutionner cette industrie. 

«Prendre des sentiers différents peut mener à de grandes innovations, croit son président et cofondateur Maxime Julien, en entrevue. Je suis tanné d’entendre que si c’était faisable Google l’aurait fait.»  

C’est avec cette conviction et munie de premiers résultats probants concernant sa technologie que cet entrepreneur en série est à Las Vegas, au prestigieux Consumer Electronic Show, pour tâter le pouls du marché et jeter les bases de nouveaux partenariats.

L’entreprise montréalaise a pour mission de construire une IA en s’inspirant de la manière dont le cerveau humain fonctionne plutôt que de gaver la machine de données avec de l’apprentissage profond («deep learning»). Son approche est nommée «deep meaning», soit de développer de la signification.

«En ce moment, le seul moyen qu’on a d’améliorer l’IA, c’est de faire des modèles de plus en plus gros, mais on atteint des dimensions complètement ingérables, affirme l’homme d’affaires. Le MIT a évalué que seulement pour opérer ChatGPT, on consomme l’équivalent en électricité de la ville de Granby. »

«On s’est dit qu’il est possible de bâtir une IA qui utilise moins d’énergie et moins de données en se basant sur la biologie, la psychologie cognitive et les neurosciences pour développer une nouvelle approche, ajoute-t-il. Il y a des possibilités de faire mieux en regardant ailleurs.»

Début impressionnant

En fin 2022, Solid State of Mind a testé sa solution face à une machine qui était, selon son patron, au sommet de ce qui se faisait en IA. Les deux machines avaient pour tâche de trouver le scénario idéal pour ramasser des balles dans un labyrinthe virtuel lors de cet exercice d’apprentissage par renforcement.

«On a battu l’autre IA qui avait un taux de réussite de 75% après un million d’essais, tandis qu’on a obtenu un taux de 90% en seulement 370 essais, note Maxime Julien. On a eu recours à 10 000 fois moins de données et 100 000 fois d’énergie.»  

Celui qui a cofondé la start-up Sky Motion Research, vendue en 2013 à AccuWeather, vante aussi les capacités d’adaptation de sa solution dont les codes restent secrets.

«Lors de ce test, on a modifié un peu la tâche, poursuit-il. L’autre machine a dû refaire un million d’essais pour le même taux de succès, tandis que la nôtre avait appris et n’a nécessité que dix tentatives pour atteindre un taux de réussite de 90%. On n’a pas à reconditionner notre système comme pour ceux fonctionnant en apprentissage profond.» 

Il estime que sa technologie fonctionne un peu comme l’humain qui doit ramasser des tomates, puis qui doit ensuite cueillir des fraises. Même si ces deux fruits sont différents, l’humain n’a pas besoin d’un énorme ajustement. Toutefois, l’IA fonctionnant sur un mode d’apprentissage profond doit tout réapprendre si la récolte change.

«On était un peu le mouton noir dans la communauté de l’IA en ne faisant pas de l’apprentissage profond, mentionne-t-il. On a fait rire de nous au début, mais avec ces résultats on nous prend davantage au sérieux.»

Des réserves jusqu’en 2026

Solid State of Mind croit que son intelligence artificielle serait utile en robotique autonome, par exemple sur un chien robot ou des robots pour ramasser des récoltes. Elle s’intégrerait aussi très bien à des véhicules autonomes et des engins médicaux. Il y a également toutes les applications infonuagiques, notamment pour des engins de recommandations web ainsi que dans le monde du jeu vidéo afin d’affronter des ennemis beaucoup plus coriaces.

Le patron espère que sa solution sera utilisée dans un de ces domaines d’ici 14 mois. D’ici là, la jeune pousse a assez d’argent pour se développer jusqu’en 2026. Elle compte développer sa technologie et augmenter sa valeur avant de solliciter d’autres fonds.

«Aux États-Unis, les investisseurs sont moins frileux, croit Maxime Julien. On explique que le chemin est long et ardu. On commence maintenant à tisser des liens, car il faut apprendre à se connaitre avant de se marier.»

Celui qui en est à sa sixième start-up sait que rien ne sert de se précipiter. Il estime que la petite taille de sa jeune pousse, qui compte seulement trois employés, ne la désavantage pas pour créer.

«C’est plus facile d’aller avec le vent que contre le vent, dit-il. Surtout dans les grandes entreprises. Nous, on essaye, on fait des erreurs. On n’a pas besoin de se justifier à notre patron. Les grandes innovations peuvent venir de n’importe où.»

Et la prochaine en IA sera peut-être québécoise.