TI: la recherche d’emplois commencerait à être plus longue
La Presse Canadienne|Publié le 05 mai 2023Les mises à pied annoncées jeudi chez Shopify auront pour effet d’ajouter une multitude de nouveaux travailleurs au bassin des gens à la recherche d’un emploi. (Photo: La Presse Canadienne)
Toronto — Les mises à pied annoncées jeudi chez Shopify auront pour effet d’ajouter une multitude de nouveaux travailleurs au bassin des gens à la recherche d’un emploi, alors même que des experts observent que les candidats commencent à mettre plus de temps à trouver leur prochain poste.
«La question est de savoir s’ils trouveront immédiatement ce (prochain emploi)? Peut-être pas», a prévenu Tricia Williams, directrice de la recherche au Centre des compétences futures de l’Université métropolitaine de Toronto.
«Il pourrait y avoir des […] perturbations dans la transition, alors qu’ils réfléchissent à leur prochaine décision.»
Cette plus longue recherche d’emploi est en partie causée et exacerbée par une vague de mises à pied qui a commencé l’année dernière et s’est poursuivie en 2023 chez de grandes entreprises comme Google, Amazon et Meta, qui ont réduit leurs effectifs.
De nombreuses entreprises qui ont procédé à des réductions d’effectifs ont attribué ces mesures à une mauvaise évaluation de la demande pour leurs produits, alors que les gens renouaient avec leurs habitudes prépandémiques.
Cependant, le chef de la direction du géant des logiciels de commerce électronique Shopify, établi à Ottawa, a expliqué que les mises à pied annoncées jeudi visaient à recentrer l’entreprise sur sa mission principale et à réduire les «quêtes secondaires» distrayantes.
La société a refusé de donner un nombre précis d’employés touchés par les nouvelles coupes, mais elle a indiqué qu’il s’élevait à environ 20 du personnel.
Dans un document réglementaire produit à la fin de 2022, Shopify a indiqué qu’elle comptait 11 600 employés. Ainsi, une proportion de 20% de cet effectif représenterait environ 2300 personnes.
Malgré les mises à pied, Mme Williams a souligné que les travailleurs de la technologie étaient toujours en forte demande au Canada, ce que April Hicke, cofondatrice du collectif de technologie et d’embauche pour femmes Toast, constate également.
Cependant, les deux ont déclaré que le marché du travail auquel les personnes licenciées du secteur sont confrontées a changé depuis avant et même pendant les premiers stades de la pandémie.
Alors que l’embauche est stable pour les rôles du développement de logiciels, de cybersécurité et d’intelligence artificielle, Mme Hicke a observé que les emplois dans les ventes, les ressources humaines et les produits étaient moins demandés et plus susceptibles de faire partie des licenciements.
En outre, ceux qui perdent leur emploi n’en trouvent plus un nouveau aussi rapidement qu’au début de la pandémie, lorsque les valorisations technologiques grimpaient en flèche.
«À Toronto, nous constatons qu’environ six mois, c’est le temps qu’il faut aux gens pour trouver autre chose, et encore plus à Calgary. Je dirais neuf mois environ», a indiqué Mme Hicke.
Et plusieurs acceptent une réduction de salaire ou de titre juste pour retrouver un emploi.
Alors que les travailleurs de cette industrie pouvaient sauter, au plus fort de la pandémie, d’un emploi à un autre pour gagner 60 000$ à 100 000$ de plus, Mme Hicke voit maintenant certains candidats subir des réductions de salaire de 10% à 20%.
Un rapport de force en mouvement
Le salaire moyen des travailleurs du secteur technologique l’année dernière était de 133 000$, indique Hired, une plateforme d’emploi qui compile les salaires annuels moyens.
Ses données, qui s’appuient sur 907 000 entrevues réalisées pour de plus de 47 750 postes actifs disponibles entre janvier 2019 et juin 2022 aux États-Unis, au Canada et au Royaume-Uni, ont révélé que près de 42% des travailleurs du secteur technologique pensaient que les employeurs avaient plus de pouvoir et doutaient que cela ne change à court terme.
Environ 27% des répondants estimaient que les chercheurs d’emploi avaient plus de pouvoir, mais s’attendaient à ce que cela change à court terme.
Mais Mme Williams n’est pas tout à fait prête à dire que les employeurs ont encore le dessus.
«Nous avons à la fois une pénurie de main-d’œuvre, mais aussi une pénurie de compétences, de sorte que les personnes qui cherchent du travail n’ont généralement pas les compétences demandées sur le marché», a-t-elle observé.
«Mais j’ai assez bon espoir qu’une grande partie de la main-d’œuvre de Shopify aura des compétences pertinentes pour le marché du travail au sens large.»
Cependant, elle a prévenu que certains travailleurs mis à pied pourraient se retrouver dans les emplois technologiques moins traditionnels ou chez des entreprises moins grandes que les géants technologiques pour lesquels ils ont eu l’habitude de travailler.
Cela signifie que des travailleurs de la technologie pourraient réémerger dans des postes technologiques de secteurs complètement différents, comme l’agriculture, a illustré Mme Williams.
«Ils ne trouveront peut-être pas un emploi spécifiquement dans la technologie, mais la technologie s’infiltre dans tous les types d’économie.»