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S’adapter sans compter (le nombre d’années)

Emilie Laperrière|Publié le 17 juin 2022

S’adapter sans compter (le nombre d’années)

En se concentrant sur les activités préférées plutôt que sur l’âge, les acteurs touristiques devraient réussir à garder la clientèle vieillissante, peu importe ses paramètres. (Photo: 123RF)

Il peut être judicieux d’adapter son service ou son produit aux personnes âgées, mais ce groupe est loin d’être monolithique. Comment fait-on pour maintenir la fidélité de cette clientèle qui change d’une génération à l’autre? Des acteurs de l’industrie touristique se prononcent.

Entre répondre aux besoins d’une personne fraîchement retraitée et ceux d’une autre qui a soufflé ses 80 bougies, il y a tout un monde. Les agences de voyages en sont conscientes.

Malgré tout, l’adaptation varie selon les acteurs. «Le tourisme renferme différents secteurs, comme l’hébergement, les attraits et le transport. Dans un marché de plus en plus fragmenté, on est néanmoins dans une logique de ciblage et d’orientation client», estime Marc-Antoine Vachon, titulaire de la Chaire de tourisme Transat à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal.

Ce dernier constate que l’évolution de l’offre ne se fait pas toujours en fonction de l’âge, et que c’est pour le mieux. «Le ciblage sociodémographique — basé sur le sexe, l’âge ou le revenu — n’est pas stable. Il est surtout beaucoup moins fiable que d’autres variables que l’on dit psychographiques et comportementales.»

 

S’axer sur les champs d’intérêt

Les joueurs de l’industrie ont donc tout à gagner à se concentrer sur les centres d’intérêt de leurs clients, sans tenir compte de leur nombre d’années. «Si je suis actif, que j’aie 60 ou 18 ans, je suis attiré par le sport. Si j’aime la nature, j’aime les activités de plein air, peu importe mon revenu», illustre Marc-Antoine Vachon.

«De toute façon, plus on est vieux, plus on se voit jeune, ajoute-t-il en riant. Le tourisme est une industrie hédoniste, on veut rappeler aux gens qu’ils ont le cœur jeune. On ne va pas leur dire qu’ils ne peuvent plus faire de randonnées après un certain âge.»

Le titulaire de la Chaire de tourisme Transat recommande aux agences de voyages de procéder à un exercice de veille pour se tenir au courant des nouveautés. Le personnel en contact avec les clients est aux premières loges. Il peut aider les entreprises à s’ajuster et à comprendre les besoins changeants de la clientèle.

Voyages Gendron semble suivre les conseils de l’expert. L’agence de Salaberry-de-Valleyfield a développé différentes spécialités. «On a commencé en étant une agence de ski, raconte Marc-Olivier Gagné, directeur aux développements numériques. On a ensuite ajouté d’autres cordes à notre arc, comme le golf. Le défi, c’est de faire en sorte que la clientèle d’un type de produit chez nous soit éventuellement attirée par nos autres produits.»

Les conseillers de Voyages Gendron essaient de garder leurs clients à long terme, d’évoluer avec eux, en leur proposant des excursions adaptées à leurs goûts et à leurs besoins du moment. «En variant les produits, que ce soit le Sud ou l’autocar, les retraités restent avec nous.»

Voyageurs du monde l’a aussi compris. Les 200 conseillers de l’agence — basée au Québec, mais aussi en France, en Belgique et en Suisse — créent des voyages au gré des envies de leurs clients. «Chaque voyage est différent. Nos outils sont adaptés en fonction des besoins de nos clients, peu importe la génération», assure la directrice pour le Canada, Aurélie Cartier.

 

Modifier son offre

Alta Voyages fait présentement l’exercice. «On réfléchit à la façon de s’adapter, admet la directrice générale, Geneviève Morin. On fait affaire avec des associations de personnes âgées, comme la FADOQ, qui ont aussi de la misère à renouveler leurs membres.»

L’agence de voyages, qui n’offre pour l’instant que des voyages organisés, veut proposer d’autres destinations, notamment outre-mer, et d’autres genres de voyage pour les jeunes retraités. «On pourrait concevoir des voyages avec plus de choix d’activités ou plus de temps libre. On pourrait aussi changer notre modèle d’affaires pour offrir des voyages “ouverts”, et non seulement pour une association.»

Les séjours linguistiques ont été ajoutés avec le même objectif de plaire aux nouveaux vieux. «On sent un engouement des jeunes retraités pour ça. Ça leur permet de parfaire leur anglais et d’être capables de voyager par eux-mêmes ensuite», remarque Geneviève Morin. 

L’Alliance de l’industrie touristique du Québec abonde dans le même sens. «C’est surtout le type de voyage qui change en vieillissant, croit son PDG, Martin Soucy. Heureusement, les infrastructures existantes peuvent souvent répondre à tous les groupes d’âge. Pour attirer les aînés, il faut miser sur certains services, les chambres d’hôtel plus luxueuses par exemple, et miser sur l’accessibilité.»

En se concentrant sur les activités préférées plutôt que sur l’âge, les acteurs touristiques devraient réussir à garder la clientèle vieillissante, peu importe ses paramètres.