(Photo: 123RF)
RÉSIDENCES POUR AÎNÉS. La construction de milieux de vie privés pour ainés est en pleine effervescence et tente de répondre à la demande, toujours plus grande. En effet, on estime qu’en 2031, un Québécois sur 4 aura plus de 65 ans. D’ici là, la province doit donc s’assurer de pouvoir répondre aux besoins de sa population, en proposant le plus de places possibles, au public comme au privé.
En ce moment, on dénombre 28 projets privés en construction à travers la province. Ils totaliseront à terme 5 870 unités locatives, tous types confondus. Certaines de ces résidences pourraient accueillir leurs premiers locataires dès cet automne, d’autres les années suivantes. « La majorité de ces résidences sont de grands complexes avec plus de 100 unités » détaille Sara Girard, présidente fondatrice du site Bonjour Résidences qui répertorie tous les milieux de vie pour ainés du Québec.
Parmi les nouvelles constructions, on remarque un certain engouement pour les résidences situées plus loin des grandes villes. « Les gens réalisent qu’ils n’ont pas forcément besoin d’être à Montréal pour vivre en résidence », poursuit la présidente. Les RPA en construction s’étendent à travers la province, de l’Estrie à Lanaudière en passant par Chaudière-Appalaches. Les prix moyens de location de ces futurs logements varient selon la région. En moyenne, il faut compter 3700$ pour un logement avec soins à Montréal contre 2500$ pour la même chose dans les Laurentides par exemple.
En plus des résidences privées, 46 maisons des ainés devraient voir le jour dans le système public québécois d’ici la prochaine année. Celles-ci représentent 3468 personnes, dont 2600 dès l’automne 2022. Elles sont situées à travers le Québec, tant dans de petits villages que de grandes villes. De nombreux autres projets sont en développement sur les planches à dessin un peu partout au Québec. « C’est un marché florissant, conclut Sara Girard. On compte des dizaines et des dizaines de projets, encore au stade de l’élaboration. Le Québec connait une forte croissance dans le développement de résidences privées pour ainés ».
Repenser le vocabulaire
Les mots tels que « placer », « mettre », « forcer » viennent rapidement à la bouche de la famille des ainés qui cherchent un milieu de vie. Or, c’est un terme que dénonce l’écrivaine Marie-Claude Giguère qui vient de publier le livre pour enfants « La place de Mamie ». « J’aimerais qu’on arrête d’utiliser ce terme. Parler de changement d’autonomie est aussi plus positif que de dire perte d’autonomie », explique celle qui a fondé Services d’Aide aux Ainés il y a maintenant 22 ans.
Pendant toutes ces années, elle a discuté avec de nombreux ainés et a observé leurs réactions lorsqu’ils entendaient leur entourage parler d’eux. « Il suffit de changer quelques mots dans notre façon de parler pour faire en sorte que les aînés se sentent plus à l’aise ; pour qu’ils se sentent perçus pour ce qu’ils sont aujourd’hui et non pas pour ce qu’ils ont perdu avec les années », poursuit l’écrivaine.
Elle explique aussi que le changement d’autonomie ou des nouvelles réalités concernant le quotidien engendrent la plupart du temps un grand stress chez l’ainé. « C’est à ce moment que nous devons être vraiment très attentifs aux mots que nous employons pour ne pas mettre de l’huile sur le feu », poursuit-elle.
Avec son entreprise Services d’Aide aux Ainés, Marie-Claude Giguère accompagne les ainés dans tout le processus de déménagement. « Parfois, c’est difficile de parler de ça à ses proches alors j’offre un service de consultation pour comprendre les besoins de la personne », explique-t-elle. Par la suite, elle propose plusieurs endroits qui pourraient convenir à l’ainé mais aussi divers services personnalisés. « Je suis là pour eux. Je peux aider à faire les boites, à trier les objets, à s’installer… être là pour signer le bail aussi et même leur faire les courses ou les amener chez le médecin », détaille-t-elle.
Bien qu’elle focalise sur les RPA, Marie-Claude Giguère observe toutes les options possibles, selon les envies de la personne. « Chaque situation est différente. Parfois, je vais recommander d’être en contact avec CLSC ou de regarder du côté des CHSLD privés. Ça dépend vraiment de la personne, moi je regarde tout », ajoute-t-elle.
De moins en moins de choix
On constate que la diversité des milieux de vie pour ainés diminue d’année en année, les grandes RPA représentant la majeure partie des nouvelles constructions. C’est notamment ce qu’observe le Réseau FADOQ. « Les petites résidences ont du mal à survivre pour plein de raisons : financières, organisationnelles, etc… Et dans le secteur public, les listes d’attente sont interminables », se désole le directeur général Danis Prud’homme. En effet, en 2004, on dénombrait 2200 petites RPA contre 1700 aujourd’hui.
Selon lui, il est primordial que le Québec puisse offrir une variété de choix pour ses ainés, qui n’ont pas tous les mêmes envies ni les mêmes capacités financières. « Lorsque les petites résidences ferment, les ainés doivent souvent se tourner vers des moyennes ou grandes résidences qui parfois leur coûtent jusqu’à 30 ou 40% de plus en loyer ! », ajoute-t-il.
En plus de vouloir modifier le crédit d’impôt accordé aux ainés pour inclure davantage de personnes à bas revenus, le réseau FADOQ préconise aussi que le budget de la santé soit orienté vers les soins à domicile et non le curatif. « Ça permet de la prévention et on sait que les gens demeurent en santé beaucoup plus longtemps quand ils restent chez eux, explique le directeur. Actuellement, 70% du budget du gouvernement est dédié au curatif ».
Enfin, Danis Prud’homme estime que la construction de logements abordables qui offrent des services accrédités serait une bonne alternative aux grandes RPA. « Les OBNL d’habitation sont des alternatives privées à but non lucratif. Ça permettrait de diversifier l’offre de logement, notamment pour les personnes moins aisées », conclut-il.