Elaine Marin, responsable des données et de l’intelligence artificielle de Levio (Photo: courtoisie)
SPÉCIAL 300. Chez Levio, l’intérêt de tester et de s’approprier l’intelligence artificielle (IA) générative s’est manifesté dès le lancement de ChatGPT, en novembre 2022. La firme de services-conseils en technologies a toutefois dû stopper le premier élan d’usage « individuel », le temps de mettre en place un cadre sécuritaire. La pause a été de courte durée, assure Elaine Marin, responsable des données et de l’intelligence artificielle de Levio.
Quelques mois plus tard, en mai 2023, la firme de Québec déployait en interne la plateforme Copilote avant même que celle-ci soit intégrée à la suite Microsoft. Les premiers usages ont été la création d’un agent virtuel pour répondre à des questions RH et d’un assistant pour aider les programmeurs à documenter leur travail. « À l’origine, le premier usage de l’IA générative était pour écrire des lignes de code », rappelle Elaine Marin.
Après quelques mois à tester différents scénarios, Levio a trouvé un usage hautement « stratégique » pour son organisation : elle a décidé de paramétrer un agent virtuel spécifiquement pour repérer des talents internes et former ses équipes de travail. « En tant que consultant, une grosse partie de nos activités est de placer des gens sur des projets, explique la responsable des données massives. Nous devons nous assurer d’avoir les meilleures personnes sur chaque équipe qui vient en aide aux clients. Avec 2000 employés, ce n’est pas possible de connaître par cœur toutes les compétences de chacun. »
C’est ici que l’IA générative intervient. Ce troisième agent virtuel « fait maison » est alimenté avec les données du système de gestion des employés. Pour que les recommandations soient pertinentes, il faut bien sûr que ceux-ci mettent leurs compétences à jour régulièrement. Toutefois, ils ont une motivation évidente de le faire, s’ils veulent participer à des mandats qui font briller leurs compétences.
L’agent virtuel développé par Levio est entre autres capable « d’inférer » qu’une personne qui a œuvré un certain nombre d’années en base de données sera capable de faire de l’intelligence d’affaires, illustre Elaine Marin. La notion de compétences transversales est donc bien comprise. « Ça va bien au-delà du moteur de recherche traditionnel, assure la responsable IA. Puis nous gagnons énormément de temps. Avant, nous devions demander aux employés seniors de se souvenir quels collègues avaient participé à quels projets. Désormais, on peut repérer des [profils de] qualifications en une fraction de seconde. »
Partenaire d’adoption
En tant que firme de services-conseils en technologies, Levio n’en est pas à ses premières armes dans l’adoption de l’IA. Dans la dernière décennie, elle a mené des projets de longue haleine aux États-Unis — en utilisant du traitement automatique des langues (« natural language processing » ou NLP) pour vérifier la conformité des documents juridiques d’une compagnie d’assurances — et au Canada — en utilisant la vision par ordinateur pour coordonner des mouvements du Bras spatial canadien. « Nous couvrons tout le spectre de l’intelligence artificielle, du prédictif à la robotique en passant par l’IA générative », dit Elaine Marin.
Depuis quelque temps, la responsable IA note un intérêt grandissant de ses clients envers l’IA générative. « En l’utilisant en interne, nous sommes beaucoup plus pertinents dans l’accompagnement que l’on peut leur offrir. S’ils veulent déployer des modèles d’IA générative, nous pouvons les aider, parce que nous avons déjà fait la démarche pour nous-mêmes. »
Penser à l’entraînement et au choix de modèles
Dans l’année à venir, Levio veut tirer son épingle du jeu en aidant les entreprises à comprendre les tenants et aboutissants de cette nouvelle technologie. « Si on utilise un modèle deux-trois fois et qu’on l’abandonne, on passe à côté du potentiel de l’IA générative, prévient Elaine Marin. Pour générer de bons résultats, l’algorithme doit d’abord être entraîné. »
Ce qu’il faut aussi savoir, c’est qu’entraîner soi-même un « grand modèle » d’IA générative peut s’avérer coûteux — tant sur le plan financier qu’environnemental. « Les modèles qui tiennent de plusieurs facteurs demandent une grande puissance de calcul. Ce qu’on voit arriver sur le marché, ce sont de plus petits modèles entraînés sur des expertises bien précises. » Voilà où l’avenir se trouve, selon elle.
Enfin, malgré le déploiement de Copilot en interne, la directrice se dit « agnostique » sur le choix des solutions pour ses clients. Comme elle le fait elle-même remarquer, ce ne sont pas les modèles qui manquent : Claude (Anthropic), Copilot (Microsoft), Gemini (Google), Llama 3 (Meta), AWS (Amazon) sont autant de modèles qui ont vu le jour après ChatGPT (OpenAI). « Nous, on veut trouver ce qui répond le mieux aux besoins du client. Parfois, une bonne vieille recherche Google demeure encore la meilleure façon de trouver une information ! », illustre-t-elle.