La période où Luis Areas a été appelé à vendre Marketel, puis à racheter des parts de l’agence Cartier, est l’un de ces chapitres qui a laissé des traces chez l’homme d’affaires. (Photo: courtoisie))
300 PME: SANTÉ MENTALE DES DIRIGEANTS. Depuis une quinzaine d’années, Luis Areas ne cesse de gravir les échelons dans les agences de publicité et de marketing. Pour autant, son parcours a été émaillé de moments difficiles. Désormais vice-président aux stratégies de canaux et associé chez Cartier, le dirigeant dit avoir beaucoup appris de ces chapitres plus sombres.
La période où il a été appelé à vendre Marketel, puis à racheter des parts de l’agence Cartier, est l’un de ces chapitres qui a laissé des traces chez l’homme d’affaires. « Ça a été deux transactions qui se sont faites l’une après l’autre, se souvient le diplômé en administration des affaires du HEC Montréal. Pendant quatre ans, il y a eu beaucoup de discussions avec des comptables, des fiscalistes, des avocats pour justement trouver un terrain d’entente avec les vendeurs ou les acheteurs. »
Luis Areas décrit cet épisode comme un sprint devenu un marathon. « D’habitude, tu prends une pause pour courir un autre sprint et moi, je n’ai pas pris cette pause-là. C’est devenu une période difficile du point de vue de l’anxiété », témoigne-t-il. À ce moment-là, les négociations qui s’étirent le maintiennent « sur ses gardes », dans un climat où il est facile de « devenir parano ».
Parler à un professionnel
Soucieux de ne pas faire subir ce stress à toute la maisonnée, il en discute sous tous les angles avec sa conjointe, qui le convainc d’avoir recours à des services professionnels. Il se tourne alors vers la Clinique d’anxiété de Montréal, où il rencontre un psychologue. Il commence dès lors à en parler plus ouvertement avec le reste de son entourage.
« J’avais le luxe de pouvoir dire à mes partenaires de travail que j’avais de la fatigue accumulée, que c’était difficile pour moi. » Selon lui, une grande partie de la solution vient du fait d’être capable d’en parler, de s’ouvrir et de reconnaître « qu’on a besoin d’un coup de main ».
La consultation lui permet aussi de normaliser sa situation. Et surtout de prendre conscience de l’ampleur des responsabilités à sa charge, dans toutes les sphères de sa vie.
L’équilibre chez Cartier
Selon Luis Areas, le recours à des soupapes d’évacuation du stress, comme la méditation et l’activité physique, l’a fait grandir en tant qu’humain, mais aussi en tant qu’entrepreneur puisqu’il est devenu plus empathique, notamment envers ses employés.
Dirigée par quatre partenaires ayant tous de jeunes enfants, Cartier vise l’équilibre. L’entreprise n’hésite d’ailleurs pas à proposer des activités autres que des 5 à 7, par exemple en incitant à la pratique du sport ou en proposant des ateliers de yoga ou des défis de marche et de course à pied.
« C’est sûr que j’ai une sensibilité à ce genre de chose à cause de mon expérience. Chez Cartier, on ne valorise pas quelqu’un qui travaille 60 heures par semaine. Nous, on voit plutôt ça comme un problème. »
Ce qu’il souhaite, c’est que Cartier soit un “safe space”. « On a créé un environnement où la santé mentale, la santé et l’équilibre sont super importants. Il ne faut pas attendre un épisode de difficulté en santé mentale pour intervenir », illustre-t-il.
Chaque jour, il combat pour faire tomber les préjugés sur la santé mentale. Issu du milieu hispanophone, Luis Areas espère aussi inspirer et outiller les jeunes de sa communauté. « J’en ai parlé avec mes parents. Ils ont quitté un pays pour réussir à se tailler une place, ont sacrifié des choses. Il y a beaucoup de préjugés [dans la communauté] que j’ai dû défaire. C’est encore un peu stigmatisé. »
Combattre les préjugés des autres, certes, mais il faut d’abord accepter de remettre en question ses propres idées préconçues, croit-il. « Beaucoup de mon discours est dans l’acceptation. Il ne faut pas gérer la santé mentale comme un début et une fin. C’est plus complexe que ça. C’est comme la grippe ou un virus, ce n’est pas parce que tu as la grippe une fois qu’elle ne revient pas. Selon lui, il est important de l’accepter et de savoir bien s’entourer, que ce soit par des professionnels de la santé ou par sa famille. « Chacun sa recette », laisse-t-il tomber.