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José Boisjoli: de la ferme à la direction de BRP

Catherine Charron|Mis à jour le 23 juillet 2024

José Boisjoli: de la ferme à la direction de BRP

José Boisjoli, PDG de BRP (Photo: Martin Flamand)

À la tête des plus grandes entreprises du Québec, ces PDG sont bien souvent entrés sur le marché du travail en occupant des postes au bas de l’échelle. Voici les leçons tirées de ces premières expériences qui teintent encore aujourd’hui leur leadership.

La première job du boss
(Illustration: Camille Charbonneau)

LA PREMIÈRE JOB DU BOSS. C’est en prenant soin de poules et de dindons, ou encore en livrant du grain aux autres fermiers du Centre-du-Québec que José Boisjoli, PDG de BRP, a appris à faire preuve de débrouillardise et de résilience, des qualités qui lui servent encore aujourd’hui, confirme le principal intéressé.

En grandissant sur la ferme Doria Boisjoli — dont son père et ses oncles étaient les propriétaires — il était presque naturel que les enfants mettent l’épaule à la roue à la hauteur de leurs capacités, indique celui qui dirige un de plus grands fabricants de véhicules récréatifs. «On ne pouvait pas se cacher, s’il y avait des choses à faire on devait s’en occuper», indique-t-il bien des années plus tard.

C’est pourquoi il lui est aujourd’hui difficile de trancher sur l’âge exact auquel il a commencé à travailler, estimant plutôt qu’il devait avoir environ dix ans. La première paye, elle, est gravée dans sa mémoire, assure-t-il: «J’étais payé 1$ de l’heure. À l’époque je trouvais ça fantastique!»

Les tâches étaient multiples sur cette ferme où y étaient élevés six millions de poulets chaque année — «un par Québécois par année», se plaisait-on à dire à l’époque — et un million de dindons et de porcs. On y distribuait aussi de la moulée et du grain Purina aux agriculteurs de la région de Wickham.

José Boisjoli pouvait donc autant aider à la livraison au fermier du coin et à l’entretien ménager des installations de Doria Boisjoli qu’à accueillir les clients au comptoir de vente.

«Le magasin ouvrait à 7h00 le matin et fermait à 6h00 le soir, six jours par semaine. Mon père disait toujours d’arriver trente minutes avant l’ouverture et de partir trente minutes après. J’ai été élevé là-dedans», raconte-t-il.

Donner un coup de main aux clients était ce qu’il aimait particulièrement faire, lui qui appréciait tout spécialement côtoyer la clientèle. La flexibilité dont il jouissait pour organiser son temps lui plaisait également.  «C’était très valorisant, car on se  sentait comme notre propre patron. Quand tu devais aller livrer du grain au client, tu t’organisais pour que ce soit le plus efficace possible.»

Des aléas de la ferme à ceux d’une entreprise manufacturière

Entre les animaux malades et les aléas de la température, le milieu agricole en est un qui exige de ses artisans un dévouement presque constant, comme a pu le constater de très près José Boisjoli. Un terreau fertile pour permettre aux qualités de PDG de germer, selon lui.

«Très vite, sur une ferme, tu apprends à gérer tout ça, à prendre des décisions et à te débrouiller, et à prendre des responsabilités», dit celui qui a déjà eu à livrer en urgence un 25 décembre au matin le grain qu’un éleveur avait oublié de commander.

Son premier rôle de leadership, c’est justement sur la ferme qu’il l’a campé à 15 ans. Son père l’avait alors mandaté d’accompagner les 90 000 dindons du poulailler à leur champ en quelques semaines à peine. Une tâche compliquée par les intempéries, se remémore José Boisjoli.

«On était une douzaine de jeunes étudiants dans cet emploi d’été. J’étais chef de l’équipe, je devais organiser les tâches, le nombre de personnes par équipe, déterminer qui faisait quoi. On manoeuvrait des machines, donc je devais savoir quoi faire quand il y avait un bris mécanique», raconte celui qui dirige aujourd’hui une organisation de 20 000 employés.

La résilience et la débrouillardise acquises au cours de ces étés passés sur la ferme à plus petite échelle lui sont aujourd’hui salutaires, alors qu’il mène une organisation qui vend ses produits dans 130 pays et dont les fournisseurs se trouvent un peu partout sur le globe. «Lorsqu’on a connu l’explosion à notre centre de R&D, ça a pris trois ans à rebâtir. […] Mon travail sur les fermes m’a aidé à gérer des situations et à prendre des décisions avec les équipes.»

À l’époque pourtant, il n’avait aucune idée que son chemin le mènerait jusqu’à la tête de BRP. C’est pourquoi il recommande aux jeunes qui, contraints de le faire ou pas, commencent à travailler de trouver une manière d’en retirer du plaisir, convaincu qu’un emploi est une belle occasion de croissance. «Ça va toujours vous amener quelque part», rappelle-t-il.