Employeurs: la refonte des régimes d’avantages sociaux suspendue
Benefits Canada|Édition de la mi‑mai 2022Bien que le programme de soins dentaires permette d’étendre la couverture aux personnes qui n’ont pas accès aux régimes de santé de leur employeur et à certaines personnes à faible revenu, les détails posent problème. (Photo: 123RF)
ASSURANCES COLLECTIVES ET RÉGIMES DE RETRAITE. Les employeurs canadiens qui souhaitent remanier leurs régimes d’avantages sociaux attendent de recevoir plus de détails sur les programmes nationaux d’assurance dentaire et d’assurance médicaments proposés conjointement par le Parti libéral du Canada et le Nouveau Parti démocratique.
En mars, les deux partis ont annoncé leur intention de former une alliance jusqu’en 2025 afin de mettre en place ces programmes, entre autres promesses. Le programme de soins dentaires, que le gouvernement fédéral prévoit déployer en premier, couvrira cette année les enfants de moins de 12 ans. Il s’étendra ensuite aux moins de 18 ans, aux personnes âgées et aux personnes en situation de handicap d’ici 2023, avant d’être pleinement mis en œuvre en 2025. Le programme serait réservé aux familles dont le revenu annuel est inférieur à 90 000$. Les personnes dont le revenu annuel est inférieur à 70 000$ ne paieraient pas de quote-part.
Selon Pam Martin, vice-présidente et conseillère principale au cabinet-conseil Baynes & White, les employeurs veulent savoir comment aborder le remaniement de leur régime d’avantages sociaux en tenant compte du nouveau programme de soins dentaires. «Tout le monde attend de voir quelles conditions seront incluses, note-t-elle. Les efforts d’attraction et de fidélisation des entreprises reposent en grande partie sur leurs régimes d’avantages sociaux, donc ils doivent proposer des offres compétitives.»
Bien que le programme de soins dentaires permette d’étendre la couverture aux personnes qui n’ont pas accès aux régimes de santé de leur employeur et à certaines personnes à faible revenu, les détails posent problème. La main-d’œuvre de nombreux employeurs est composée de personnes se situant dans différentes tranches de revenus, explique Pam Martin, qui souligne que les employeurs ne savent pas s’ils pourront retirer la couverture dentaire des régimes d’entreprise pour les membres qui se situent sous le seuil des 90 000$. Certains de ces employés voudront peut-être conserver leur régime de soins dentaires actuel s’il offre une meilleure couverture que le programme fédéral, ajoute-t-elle.
En outre, les employeurs qui ont deux catégories d’employés — ceux qui sont couverts par le régime public et ceux qui sont couverts par le régime de leur employeur — devront s’assurer qu’ils offrent une couverture équitable et aussi bonne, voire meilleure, que l’option publique, explique la spécialiste.
Elle souligne que les tentatives passées des gouvernements d’offrir des prestations de santé à un sous-ensemble de la population se sont avérées trop coûteuses et ont été réduites par la suite. Par exemple, le programme OHIP+ de l’Assurance-santé de l’Ontario, destiné à l’origine aux personnes à charge de moins de 25 ans, a été limité après la première année aux personnes à charge qui ne sont pas couvertes par des régimes d’employeurs. « L’allègement des coûts n’a tout simplement jamais fonctionné pour les employeurs, indépendamment de l’existence d’un système de santé universel ou du programme OHIP+, et c’est bien dommage », relève Pam Martin.
Au cours des deux dernières années, il y a eu beaucoup de perturbations et les Canadiens sont à la recherche de stabilité, a déclaré l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes (ACCAP) dans un communiqué envoyé par courriel à Benefits Canada. « Nous savons que les Canadiens accordent une grande importance aux régimes d’avantages sociaux fournis par l’employeur, qui permettent à des millions de personnes d’avoir accès à des médicaments sur ordonnance, à des soins dentaires et à des prestations médicales à prix abordable. Nous ne croyons pas que ces avantages devraient être perturbés par cette annonce. »
L’ACCAP a indiqué qu’elle partageait les préoccupations du gouvernement concernant le coût élevé des médicaments et les écarts en matière de couverture, et qu’elle voyait d’un bon œil les efforts déployés, tant au fédéral qu’au provincial, pour faire en sorte que tous les Canadiens puissent avoir accès à ces prestations. Cependant, l’association a également déclaré qu’elle espère que le gouvernement s’efforcera d’étendre la couverture en s’appuyant sur les avantages en milieu de travail qui profitent déjà à 26 millions de Canadiens.
Suivant la mise en place du programme national de soins dentaires, les employeurs pourront restructurer leurs régimes en supprimant la couverture des soins dentaires et en plaçant les économies réalisées dans un compte de dépenses de santé, fait remarquer Pam Martin. Bien que les employés admissibles au programme gouvernemental sortent gagnants dans ce scénario, elle relève que certains pourraient obtenir davantage de fonds dans un compte de dépenses en soins de santé, qu’ils pourraient dépenser en frais dentaires. Toutefois, si le régime gouvernemental ne couvre que les services dentaires de base, les employeurs pourraient choisir de ne couvrir que les interventions chirurgicales majeures. Les deux scénarios pourraient conduire à un écart dans l’équité de la couverture parmi les employés ayant des échelles salariales différentes, note-t-elle.
« Si le régime gouvernemental n’est pas adéquat, les employeurs devront améliorer ou modifier leur offre. Les employeurs veulent vraiment faire ce qu’il faut et offrir un bon régime qui garantit qu’ils couvrent les besoins essentiels, de même que les avantages supplémentaires intéressants. »
Ce texte écrit par Lauren Bailey a été publié à l’origine en anglais par Benefits Canada.