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L’automatisation, c’est comme une descente de rafting

Karl Rettino-Parazelli|Publié le 15 octobre 2024

L’automatisation, c’est comme une descente de rafting

Nicolas Marcoux, président d'Armoires DLM (Photo: courtoisie)

AUTOMATISATION. À chaque fois qu’il parle de son projet d’automatisation lors d’une rencontre, Nicolas Marcoux utilise la même métaphore : il compare les trois dernières années d’implantation à une descente en rafting.

« Au départ, quand on annonce le projet, tout le monde est sur le bord de la rivière, un peu anxieux. On ne sait pas ce qui s’en vient, on est dans l’inconnu », illustre le président d’Armoires DLM, entreprise familiale de fabrication d’armoires sur mesure située à Saint-Joseph-de-Beauce.

« Tout d’un coup, l’embarcation traverse un petit rapide. Un premier robot arrive, c’est l’fun. Ensuite, il y a de grosses roches et ça va mal. Puis, on perd des joueurs, certains tombent à l’eau, poursuit-il. On a perdu des employés qui n’adhéraient pas à ce qu’on faisait. Ils ont été déstabilisés. »

« Nous ne sommes pas encore arrivés à l’étape où on se retrouve en eaux calmes et où on peut se permettre de soulever la rame dans les airs. Mais c’est ce qu’on souhaite », lance le dirigeant.

Un rêve qui se concrétise

Des robots ont fait leur apparition dans l’usine d’Armoires DLM il y a une dizaine d’années, lorsque l’entreprise a installé des machines permettant de découper des panneaux de mélamine, une technologie aujourd’hui répandue dans l’industrie.

« À partir de ce moment-là, je me suis toujours cassé la tête en me demandant comment j’allais pouvoir passer à la prochaine étape », raconte Nicolas Marcoux, ingénieur de formation habité par un rêve : celui de produire des caissons entièrement assemblés par des robots.

Cette « étape » s’est concrétisée en février 2021, lorsque l’entreprise a commencé à mettre en place sa ligne de production automatisée, un projet de 4,5 millions de dollars financé à 50 % par le programme Innovation Bois du gouvernement du Québec.

Dans l’usine, des tâches autrefois effectuées par des employés sont désormais confiées à des machines : la sélection des pièces, leur distribution dans le bon ordre sur les convoyeurs, l’insertion des goujons de bois, etc. « On a créé une séquence de fabrication grâce à laquelle personne n’a besoin de se demander quoi faire. C’est le système qui pense à tout », affirme Nicolas Marcoux.

Un tout nouveau robot — une « presse » — permettra bientôt au patron de passer du rêve à la réalité : les caissons « spéciaux » (avec des dimensions particulières) continueront d’être assemblés par des humains, tandis que les caissons réguliers seront assemblés à la chaîne par des robots. « L’objectif est de faire travailler les gens là où il y a de la valeur ajoutée », dit-il.

Pas de surprise

Lorsque les employés d’Armoires DLM ont mis les pieds dans l’usine nouvellement robotisée, ils savaient en bonne partie à quoi s’attendre. « On avait conçu un plan de l’usine en trois dimensions qui présentait ce que ça allait donner. Quand les travailleurs sont entrés, ce n’était pas une surprise, affirme le président de l’entreprise. Je pense qu’on a bien géré le changement en communiquant comme il faut. »

Celui qui se décrit comme un « agent d’innovation » n’a cependant pas eu peur de bousculer l’ordre établi, même si cela impliquait de déplaire à certains. Il raconte par exemple comment un électricien s’est présenté un matin à l’usine en annonçant à un employé que la machine qu’il utilisait devait être déplacée. Le travailleur a résisté… et a fini par partir. « Le gars a pris ses affaires et il est parti », dit Nicolas Marcoux.

L’objectif du patron n’est toutefois pas de mettre des employés à la porte. Il est possible que certains travailleurs perdent leur place au profit d’une machine, mais il veut avant tout « faire plus avec ce qu’il a », c’est-à-dire la vingtaine d’employés de son usine. « Le défi, c’est d’augmenter les ventes avec les ressources actuelles », affirme-t-il.

« La main-d’œuvre a été très résiliente, souligne-t-il. Il y a des jours où ça fonctionne et des jours où ça ne fonctionne pas. Les équipes ont embarqué dans le projet. Je suis très fier de ma gang ! »

« Arriver au bout »

Le ralentissement économique a entraîné le report de bien des projets de rénovation, ce qui a nui à Armoires DLM. Nicolas Marcoux a cependant espoir de voir les ventes remonter prochainement, ce qui lui permettrait de tester la capacité de production de sa nouvelle ligne automatisée. Il ne sait cependant pas à quel moment il pourra dire qu’il a pleinement rentabilisé son investissement.

Pour reprendre sa métaphore du rafting : « les rapides sont passés, il y a encore de petites descentes, mais on a hâte que ça finisse, lance-t-il. On est impatients d’arriver au bout. »