Vickie Joseph: exploiter ses forces dès son premier emploi
Catherine Charron|Mis à jour le 05 juillet 2024Vickie Joseph est cofondatrice du groupe 3737, PDG de V Kosmetik et présidente du conseil d’administration de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. (Photo: Martin Flamand)
À la tête des plus grandes entreprises du Québec, ces PDG sont bien souvent entrés sur le marché du travail en occupant des postes au bas de l’échelle. Voici les leçons tirées de ces premières expériences qui teintent encore aujourd’hui leur leadership.
LA PREMIÈRE JOB DU BOSS. Faire bouger les choses figure au haut de la liste pour Vickie Joseph, cofondatrice du groupe 3737, PDG de V Kosmetik et présidente du conseil d’administration de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. L’agence de placement du centre-ville de Montréal qui lui a donné sa première chance dans le monde du travail l’a vite compris.
C’est grâce au Carrefour jeunesse emploi de Montréal-Nord, où une cellule avait été créée pour aider les adolescents de la communauté à se trouver des petits boulots pour l’été, qu’elle a déniché ce poste. Mue par un désir d’indépendance et la coquetterie, elle souhaitait gagner et économiser un peu d’argent de poche.
Lire aussi – Vickie Joseph: ouvrir grandes les portes à la diversité
«Jeune, j’ai compris la valeur de l’argent en voyant mes parents pour qui ce n’était pas facile. Je savais qu’il fallait que je garde des sous de côté pour combler mes besoins pendant l’année scolaire», indique-t-elle.
Matin et soir, cinq jours par semaine pendant l’été de ses 14 ans, elle voyageait pendant une heure dans les transports en commun pour jouer les paper pusher. Le temps pouvait être long pour une personne comme elle qui n’aime pas les tâches répétitives ou la routine, confie-t-elle bien des années plus tard.
«Je m’occupais de la numérisation, de scanner des documents, d’imprimer, d’aller chercher du café pour les autres employés, de répondre à certains appels et d’envoyer les lettres aux clients. Je devais aussi classer les dossiers. Un vrai travail d’organisation», énumère-t-elle.
Méthodique et productive, elle parvenait assez rapidement à accomplir la liste de tâches qui lui était confiée, lui laissant le loisir d’occuper son temps comme elle l’entendait. Et c’est vers ses collègues de travail qu’elle aimait se tourner.
«J’ai vite compris que c’était un endroit à potins. J’étais celle qui écoutait toutes leurs histoires. D’un tel qui divorce, d’une autre qui avait une ennemie jurée», se remémore-t-elle en riant, sourire dans la voix.
Fenêtre sur les défis que tous rencontrent dans leur vie quotidienne, elle constate que ce milieu de travail en apparence très sérieux est en réalité composé d’humains aux multiples émotions. Un laboratoire foisonnant pour celle qui aime comprendre comment les gens réfléchissent.
«En tant qu’entrepreneur, aujourd’hui, j’aime toujours autant comprendre les choses, trouver des solutions à tout, et déjà, j’aimais en proposer à mes collègues qui avaient pourtant 40, 50 ans.»
Elle constate aussi à l’époque que les gestes qu’elle pose peuvent avoir des retombées positives dans la vie des gens, que sa bienveillance et son empathie peuvent changer la culture organisationnelle.
Encore aujourd’hui, son style de leadership en est empreint. Créer un milieu de travail sécuritaire permet à ses différentes équipes d’avancer.
«C’est vraiment à ce moment que j’ai compris l’importance de l’humain, de l’empathie envers l’autre.»
Il n’y a d’ailleurs pas que les membres du personnel qui avaient droit à ses conseils, l’organisation également. Elle était particulièrement friande de trouver et d’implanter des manières d’optimiser certains processus, dont le classement des documents, pour en faciliter la consultation.
«On ne s’en rend pas compte à ce moment-là, mais on a des traits de caractère qui se manifestent et nous suivront toute notre vie, constate-t-elle avec du recul. Déjà, j’étais quelqu’un qui voulait bouger, amener de nouvelles idées, et organiser.»
Oser prendre des risques
Vickie Joseph recommande aux nouveaux travailleurs de prendre des initiatives, de se voir comme «une entreprise» et d’apporter de la valeur ajoutée à l’organisation qui l’emploie. Non seulement c’est bénéfique pour l’individu, car ses efforts seront remarqués, mais ce le sera aussi pour l’entreprise qui profitera de cet ajout.
C’est notamment en étant attentif aux petites choses que l’on accomplit différemment, à ces gestes et traits de caractère qui nous rendent uniques, que l’on pourra les exploiter.
«Tout le monde veut aller voir ou être servi par cette caissière qui va au-delà de sa description de poste. Il faut se voir comme des personnes qui créent de la valeur et des opportunités. Trop de jeunes se disent qu’ils vont s’appliquer lorsqu’ils sortiront des bancs d’école et auront leur “vrai job”. Pourtant, déjà, tu développes ton éthique de travail», martèle-t-elle.