Les minières doivent composer avec des enjeux de sécurité
La Presse Canadienne|Publié le 17 janvier 2019(Photo: 123rf)
La mort d’un cadre d’une minière canadienne au Burkina Faso à la suite de son enlèvement vient rappeler les enjeux de sécurité auxquels sont confrontées les entreprises du secteur des ressources naturelles présentes dans des régions instables.
Kirk Woodman, originaire d’Halifax et à l’emploi de Progress Minerals, de Vancouver, a été retrouvé sans vie tard mercredi. Son corps avait été criblé de plusieurs balles. Ses ravisseurs n’ont pas encore été identifiés.
Bien que rare, cet incident est survenu alors que la menace des insurgés est croissante dans la région de l’Afrique de l’Ouest, où de nombreuses minières canadiennes sont présentes, particulièrement dans le secteur aurifère.
Généralement, le travail réalisé par des expatriés est très encadré afin de limiter les risques.
Le géologue et vice-président de la firme Effigis, Michel Rhéault, a été plus d’une fois au Burkina Faso de 2016 à 2018 dans le cadre d’un projet de coopération internationale de cartographie géologique.
« Lorsque nous étions présents dans certaines régions, il y avait un programme et un itinéraire établis dès le départ, a-t-il expliqué au cours d’un entretien téléphonique. La gendarmerie nationale burkinabè était avec nous sur le terrain constamment. »
Rien n’indique que l’industrie minière est ciblée par des groupes affiliés à Al-Qaïda ou Daech (le groupe armé État islamique), mais le secteur minier est l’un des rares où les expatriés sont présents en dehors de la capitale, Ouagadougou.
Selon M. Rhéault, le thème de la sécurité est néanmoins beaucoup plus à l’ordre du jour depuis l’attentat survenu en janvier 2016 dans un hôtel de la capitale du pays et ayant coûté la vie à six Québécois.
Pour l’instant, la mort de M. Woodman ne semble pas avoir modifié les plans de sociétés aurifères présentes au Burkina Faso comme Semafo, Iamgold et Roxgold. Elles ont indiqué jeudi que leurs activités se poursuivaient normalement.
Année mouvementée
Établie à Montréal, Semafo, qui compte 1200 salariés, dont 85 expatriés, dans ses sites de Mana et Boungou, a été confrontée à des enjeux de sécurité l’an dernier sur des routes menant à ses installations.
Un employé ainsi qu’un sous-traitant ont notamment été tués en août dernier lorsque l’autobus transportant des travailleurs avait été ciblé par des bandits et cinq gendarmes avaient perdu la vie lors d’une autre attaque quelques jours plus tôt.
Puis, le mois dernier, le producteur d’or avait indiqué que les forces de sécurité gouvernementales avaient été la cible d’une attaque sur une route située à environ 40 kilomètres de sa mine de Boungou.
« Nous avons renforcé nos mesures de sécurité suite aux incidents survenus l’année dernière afin d’assurer un niveau maximal de sécurité à nos employés et à nos actifs, a indiqué une porte-parole, Ruth Hanna. Nous continuons de suivre de très près la situation au Burkina Faso avec nos partenaires. »
Dans un courriel, elle a ajouté que la sécurité du personnel « demeure notre priorité ».
Semafo a également mis à jour sa politique de sécurité afin que tous ses employés expatriés soient désormais transportés par hélicoptère entre les sites miniers et la capitale. L’entreprise a également dit qu’elle continuait de discuter de sécurité avec le gouvernement burkinabè.
Iamgold et Roxgold emploient respectivement 2200 et 800 salariés au Burkina Faso.
Moins d’intérêt ?
Si la mort de M. Woodman n’a pas bousculé les activités des trois minières, cet incident, ainsi que les turbulences traversées par Semafo l’an dernier, pourraient refroidir les ardeurs d’investisseurs qui songent à mettre des projets de l’avant dans la région.
Une réflexion s’est amorcée chez 48e Nord International, qui épaule des entreprises québécoises du secteur minier et qui a œuvré sur un programme de positionnement stratégique au Burkina Faso.
« Actuellement, nous sommes en réflexion pour voir si l’on peut amener des gens sur le terrain, a expliqué son directeur général et commissaire à l’international, Éric Boucher. Si on accompagne des entrepreneurs là-bas, nous avons des responsabilités. »