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Des chantiers virtuels pour plus de performance

Emilie Laperrière|Édition de la mi‑mars 2023

Des chantiers virtuels pour plus de performance

Les travailleurs de Pomerleau côtoient deux collègues à quatre pattes, les robots SPOT. (Photo: courtoisie)

CONSTRUCTION. Modélisation des données du bâtiment (BIM, pour Building information modeling), intelligence artificielle, capteurs intelligents, robots et logiciels divers : les entreprises en construction disposent désormais d’une panoplie de technologies pour les assister de la conception à l’édification d’un bâtiment, en passant par son éventuelle démolition.

Le virage numérique en construction ne se limite pas qu’aux drones et aux exosquelettes. « Il peut aider les entreprises à explorer des solutions de façon virtuelle avant de mettre les pieds sur le chantier. Les technologies permettent aussi de partager des informations à jour à tout le monde », illustre Ivanka Iordanova, professeure au Département de génie de la construction à l’École de technologie supérieure (ETS).

Plusieurs technologies font déjà partie du coffre à outils des entreprises en construction, même si elles n’ont pas toutes été adoptées par l’ensemble de l’industrie. « Mis à part les innovations sur le chantier, la transformation numérique inclut la préfabrication. Les processus de construction en usine limitent les erreurs sur le site et facilitent également le travail et l’apprentissage. On en voit de plus en plus. »

L’innovation du secteur passe également par la construction verte, selon Ivanka Iordanova. Le Groupe de recherche en intégration et développement durable en environnement bâti (GRIDD), dont elle fait partie, se penche donc sur la réutilisation des matériaux et sur l’adaptabilité des bâtiments. « On essaie de créer certains outils d’aide à la conception pour les architectes et ingénieurs, entre autres pour la préfabrication en bois. On a aussi plein de projets autour du BIM », ajoute-t-elle.

 

Propulser l’industrie vers le futur

Sur les chantiers de Pomerleau, les travailleurs côtoient deux collègues quadrupèdes : les chiens-robots SPOT. Le chef de file est devenu, en 2020, la première entreprise au monde à utiliser les petites bêtes intelligentes de Boston Dynamics dans ce contexte. 

Alors que les robots servaient au départ seulement à prendre des photos 360 pour suivre l’évolution du chantier, ils sont maintenant équipés d’un numériseur laser pour capturer la réalité de façon autonome. « On peut aussi ajouter des senseurs pour détecter l’humidité ou prendre des photos pour repérer les problèmes. SPOT est en fait une plateforme avec plein de possibilités », explique Éric Lessard, vice-président à l’innovation et à la technologie. 

Les nouvelles technologies ne font évidemment pas peur à l’entrepreneur général. « On s’est lancés dans l’aventure du BIM il y a environ 12 ans, relate-t-il. À l’époque, on était des pionniers. » L’entreprise compte désormais une équipe de plus de 100 personnes qui se consacre à l’innovation. Celle-ci se concentre sur trois axes de développement : l’Internet des objets, la robotique et l’intelligence artificielle. « Dans le premier volet, on essaie par exemple les capteurs pour analyser le bruit ambiant ou la poussière sur le terrain. On a aussi réussi à créer un jumeau numérique du chantier », raconte Éric Lessard. La robotique, elle, prend le relais des humains pour les tâches répétitives. L’intelligence artificielle est pour sa part utilisée pour automatiser les processus afin notamment de détecter les anomalies dans les contrats. 

Son laboratoire d’innovation aXLab permet en outre à l’entreprise de tester les nouvelles technologies et de les déployer rapidement. 

Pomerleau espère convaincre l’ensemble de l’industrie à prendre le virage numérique. « On doit collaborer pour s’assurer que la construction évolue, pour construire des bâtiments et des infrastructures durables à moindre coût, avec des échéanciers courts au Québec. »

 

Petite équipe, grandes ambitions 

Construction Durand fait déjà partie des convaincus. Malgré sa taille réduite, l’entreprise de 25 employés a adopté avec enthousiasme les technologies dans les dernières années. Le directeur des opérations n’y voit que des avantages. « On a saisi l’opportunité de standardiser nos processus pour augmenter notre performance. Ça nous permet de nous distinguer de la concurrence et d’optimiser notre service aux clients », estime Gabriel Durand. 

L’entrepreneur général a intégré une plateforme collaborative qui partage les informations à tous les intervenants du projet. « On a accès aux nouvelles feuilles de plan, par exemple. Pour les projets BIM, on a des maquettes 3D directement sur le chantier sans avoir besoin d’une connexion Internet. »

Afin de capturer des images et des vidéos aériennes du chantier, Construction Durand se sert de drones. « On les utilise aussi pour l’inspection des travaux en hauteur. Avec l’aide du logiciel OpenSpace et d’une caméra 360 degrés que l’on pose sur un casque, on peut avoir des images du chantier sous tous les angles pour vérifier que tout est conforme. » 

Le projet qui incarne le virage numérique de l’entreprise est sans doute l’édifice F.X.-Drolet, à Québec. « C’est un vieux bâtiment des années 1800 qu’on est en train de transformer en poste de police de quartier. Avec le BIM et les maquettes 3D, on a découvert que plusieurs éléments différaient des plans. La technologie a été très utile pour détecter les contraintes. »