Les intentions et les démarches entrepreneuriales ont globalement triplé entre 2009 et 2018, selon les résultats de l’indice entrepreneurial québécois dévoilés en novembre dernier. Une tendance mondiale qui peut masquer toutefois certaines déconvenues. «C’est devenu cool d’être entrepreneur, mais 100 % des nouveaux venus sont surpris de voir que c’est plus difficile qu’ils ne le pensaient», constate Jean-François Ouellet, professeur à HEC Montréal.
«Attention de ne pas aller en affaires pour les mauvaises raisons, prévient Marc-Antoine Ducas, de Netlift : soit pour passer à l’émission Dans l’oeil du dragon, soit pour accéder plus rapidement à l’autonomie financière. Créer une entreprise devrait être le dernier recours pour résoudre un problème, car c’est excessivement difficile !» Des propos que confirment Dominic Gagnon de Connect&Go : «En conférence, je dis toujours en rigolant, ne soyez pas entrepreneur, c’est la pire chose au monde ! Car je sais que les vrais entrepreneurs se lanceront quand même…»
Un chemin fait de hauts et de bas
Mais de quelles difficultés parle-t-on ? «La première, c’est de trouver l’adéquation produit/marché», annonce d’emblée Frédéric Lalonde, cofondateur de Hopper. «La fameuse première vente est cruciale, abonde Claude Ananou, professeur à HEC Montréal. Cela veut dire qu’il y a du poisson dans le lac, que j’ai comblé le besoin d’au moins une personne et que mon produit ou service a été valorisé». Avant de poursuivre : «Entreprendre, c’est aussi être prêt à apprivoiser l’incertitude.» Julien Smith, de Breather, le relate en d’autres termes : «Tu es constamment confronté à des problèmes pour lesquels tu n’as pas la solution. Et plus ton entreprise croît, plus tu as des problèmes à résoudre.»
D’où cette sensation unanime de vivre dans des montagnes russes en permanence. «Tu alternes entre un jour où tu reçois des coups et tu te dis que cela ne marchera jamais et, le lendemain, où tu reçois une bonne nouvelle et tu y crois plus fort que tout», témoigne M. Ducas. «Tout le monde vit des hauts et des bas dans sa vie. Mais l’amplitude est bien plus grande pour un entrepreneur, explique M. Ouellet. Il faut se mettre dans une posture où l’on ne perd jamais : soit on gagne, soit on apprend.»
La passion comme fil conducteur
Autre difficulté couramment vécue : la solitude. «Tu ne peux pas parler de manière ouverte et honnête de tes problèmes à beaucoup de personnes», explique en effet M. Smith. «On entend plusieurs personnes qui se coupent par exemple de leur groupe d’amis, car leur entreprise devient leur obsession. Il ne faut pas négliger pour autant son réseau de soutien moral», affirme Liette Lamonde, de la Fondation Montréal inc.
Stephanie Liverani, de Unsplash, voit ici un avantage de s’être lancée en affaires avec son mari. «Cela aurait été compliqué, sinon, de lui expliquer pourquoi je travaille tout le temps. La somme de sacrifices à faire est vraiment importante.» L’entrepreneuriat devient alors une épreuve de persévérance.
«Quand les temps deviennent difficiles, la plupart abandonnent, sauf ceux qui ont un attachement personnel, durable et profond au problème qu’ils veulent résoudre», affirme M. Ouellet, également auteur d’un livre intitulé Le bonheur comme plan d’affaires. «Je ne perds jamais de vue l’objectif central qui est de réduire le nombre d’automobiles sur les routes. C’est comme une obligation morale», atteste M. Ducas. «La détermination et la passion sont deux très grandes qualités pour entreprendre», conclut Mme Lamonde.
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