Ça se chamaille dans le secteur bancaire canadien pour attirer les start-up technologiques. Sur les talons du rachat par RBC Ventures du site montréalais Smart Reno, voilà que Desjardins profitait de la Conférence de Montréal pour annoncer la création d’un nouveau fonds d’investissement de 45 millions $ destiné exclusivement à investir, développer ou carrément acquérir des jeunes pousses prometteuses de partout dans le monde, à la seule condition qu’elles aient un lien avec la technologie financière.
En un mot, Desjardins a les fintechs à l’œil. «Notre objectif est d’améliorer la qualité des services qu’on offre à nos 7 millions de membres», résume en entrevue Guy Cormier, président et chef de la direction de l’institution québécoise. «On souhaite d’abord accélérer notre transformation numérique et accroître notre productivité. On n’a pas d’objectif de rendement avec ce fonds, mais on espère aider les start-up à croître.»
Ceci n’est pas du capital de risque
En d’autres mots, ceci n’est pas un fonds de capital de risque. Desjardins Capital, qui est responsable du projet, a déjà dans son portfolio d’autres fonds d’investissement orientés vers la croissance du capital. Vu de l’extérieur, c’est un peu le prolongement de ce que la coopérative fait déjà depuis quelques années avec son Lab Desjardins et son Coopérathon, une compétition d’innovation ouverte annuelle fort prisée des jeunes entrepreneurs.
On pourrait aussi ajouter à la liste la part de 25M$ investie par Desjardins dans la firme Luge Capital. Celle-ci a eu droit à un autre 50M$ provenant de la Caisse de dépôt et placement du Québec et d’autres groupes financiers.
Bref, avec cette nouvelle enveloppe, Desjardins pense à elle en premier. D’où son terrain de jeu limité aux technologies bancaires. Ou d’assurances. Ou de paiement. Ou de chaîne de blocs. Ou…
«Notre offre de produits est déjà plutôt vaste, et on sent un besoin du côté de ces petites entreprises de vouloir aller plus loin» avec un partenaire institutionnel comme le groupe Desjardins, poursuit M. Cormier, qui précise que tous les programmes de son entreprise qui touchent de près ou de loin l’écosystème des start-up demeurent indépendants, mais qu’il existera tout de même une certaine communication d’un à l’autre.
Flinks, Hardbacon, Roost, Finaeo, sont autant de jeunes pousses dans lesquelles Desjardins a déjà investi dans le passé, et qui pourraient cadrer (ou pas) dans le contexte de ce nouveau fonds. Mais Martin Brunelle, vice-président de la transformation pour Desjardins, préfère citer en exemple des outils déjà existant à l’interne pour illustrer ses attentes face à cet investissement.
Un de ceux-là est l’application Radar, de Desjardins Assurances, qui alerte les utilisateurs d’une intempérie majeure à venir (comme une tornade, par exemple), ce qui peut réduire les dommages sur leur résidence, et donc, la taille des réclamations par la suite. Un autre est cet outil bancaire qui avertit les clients qui doivent effectuer un paiement qu’ils n’ont pas les fonds nécessaires pour honorer un éventuel chèque, leur laissant 24h pour corriger la situation et, ainsi, ne pas avoir à défrayer les fameux frais de virement sans fonds…
La banque du futur
«Il y a beaucoup de ‘hype’ dans les technos. Ça a été l’IA, le blockchain, la reconnaissance faciale… Notre travail sera de trouver les nouvelles technologies qui ajouteront une valeur réelle à nos services», explique le dirigeant. «Je pense que la banque du futur est celle qui va trouver le juste équilibre entre la technologie et le contact humain.»
Autrement dit, on n’est pas à la veille d’entrer dans une succursale du Mouvement Desjardins et de tomber face à face avec une caméra qui nous identifiera sur-le-champ, puis qui refilera nos données à un robot-conseiller. Les 7% d’opérations bancaires que les membres de Desjardins font encore en personne sont aussi importantes que le reste, assure Guy Cormier.
Mais l’accès aux services pourrait être facilité, ou élargi, grâce à la technologie. La sécurité des données aussi, dans un contexte où on voit bien les dérives possibles de ce côté dans d’autres secteurs d’activité. Et à ce jeu, on peut dire que Desjardins se tire déjà plutôt bien d’affaires. L’entreprise n’est pas celle qui abuse le plus des robots conversationnels (chatbots), mais en a quand même un en service sur sa plateforme en ligne. Elle recourt à l’authentification biométrique dans son application mobile.
Plein de petites choses qui donneront un indice aux entrepreneurs de ce que la Caisse et son nouveau fonds recherchent : des innovations ciblées et stratégiques pour ses services financiers de demain.
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