(Photo: courtoisie Dutailier)
DESIGN INDUSTRIEL. Les designers industriels sont vraiment bien placés pour percevoir l’évolution des comportements des consommateurs. «Quand on est impliqué dans les phases d’observation et d’analyse, on est aux premières loges de la compréhension de leurs besoins», atteste Jonathan Côté, président de Morelli Designers.
Une position qui a par exemple permis à la firme montréalaise de proposer au fabricant de chaises berçantes québécois Dutailier une solution inattendue au moment de concevoir un produit spécifiquement destiné aux milléniaux. « On n’aurait jamais dessiné de cette façon cette nouvelle chaise et l’entreprise n’aurait jamais validé ce design si on n’avait pas interrogé directement les consommateurs au préalable », souligne-t-il.
L’analyse a effectivement fait ressortir une préférence des personnes interrogées pour un style vintage des années 1950 et pour une chaise à berceaux plutôt qu’oscillante… Ce que faisait Dutailier depuis 40 ans! «C’était radical, mais il fallait aller dans cette direction. Il y avait des faits qui nous ont permis de prendre cette décision», conclut M. Côté.
L’écoconception au centre des préoccupations
Quand on parle des préoccupations de demain, un sujet qui revient avec force : la protection de l’environnement. Selon une étude récente menée par les agences Canidé, Callosum et Passages Marketing, c’est l’enjeu de société qui préoccupe principalement les Québécois francophones de 13 à 24 ans, loin devant l’accès à la santé.
«Honnêtement, c’est pour cette raison que je me suis orienté dans ce domaine, révèle Jean-Philippe Clermont, designer industriel chez Creaform Ingénierie. J’avais envie d’avoir un impact sur les décisions. Il est de notre devoir de faire que le produit soit responsable. Si on ne le propose pas au client, il ne sera pas porté à le faire lui-même, à moins qu’il soit légalement contraint de le faire.»
Caroline Gagnon, professeure agrégée à l’École de design de l’Université Laval et directrice du baccalauréat en design de produits va encore plus loin. «L’écoconception devient essentielle. Que les usagers le demandent ou pas, je pense que c’est une nécessité. Il faut aller au-delà des attentes du consommateur et faire appel à son éthique professionnelle».
«Il ne faut plus juste penser à une fonction du produit, mais à tout son cycle de vie», poursuit M. Clermont. Et gare aux fausses bonnes idées. En août, CNN s’est rendu compte que McDonald’s avait remplacé au Royaume-Uni et en Irlande ses pailles en plastique, qui étaient recyclables, par des pailles en papier… qui ne le sont plus ! Pensées pour être résistantes une fois mouillées, les pailles en papier en étaient devenues trop épaisses pour les recycleurs.
Ainsi, le designer industriel doit adopter une ligne de pensée globale en amont. Et aussi convaincre ses clients ou les décisionnaires des changements à adopter. «On doit évidemment saisir toutes les opportunités de faire en sorte que les clients se tournent davantage vers l’écoconception… mais la décision finale leur revient toujours, admet David Mitchell, vice-président de l’agence GENIAdesign. La clé de voûte se trouve toujours – et seulement – quand ils peuvent y voir une profitabilité.»