Une autre raison pour le fondateur d’une entreprise de faire appel à un avocat est son réseau étendu. (Photo: 123RF)
DROIT DES AFFAIRES. Quand vient le temps de décider s’il veut utiliser une dette ou des capitaux pour financer les opérations de son entreprise en démarrage, l’entrepreneur trouvera bien utile de faire appel à un avocat.
Selon ses besoins, il pourra par exemple choisir de s’orienter vers un financement par voie de dette, c’est-à-dire un emprunt qu’il devra rembourser.
Les avocats seront alors capables de l’aider à aller chercher de la dette auprès de prêteurs ou d’institutions financières, incluant des fonds d’investissement en capital de risque ou bien d’autres facilités de crédit, comme le crédit d’impôt pour la recherche et le développement, explique Me Ali El Haskouri, associé chez Lavery. « Si le client attend des crédits d’impôt et qu’il a besoin de liquidité, on peut aussi l’aider à obtenir du financement intermédiaire », ajoute le membre du groupe Droit des affaires du cabinet.
Me Ali El Haskouri, associé chez Lavery (Photo: courtoisie)
L’entrepreneur peut néanmoins préférer un financement par capitaux, c’est-à-dire par achats d’action.
« Souvent, il ne va pas avoir le « cash flow » pour supporter la dette, explique Me Ryan Tomicic, associé chez Borden Ladner Gervais (BLG). Mais il doit se demander “Qui est mon meilleur partenaire ?” Ça peut être « glamour » d’avoir des investisseurs, mais dès qu’on accepte de l’argent, le risque est de voir l’investisseur exiger de siéger au conseil d’administration de l’entreprise et d’y exercer de la pression. »
Selon Me El Haskouri, il faut plutôt choisir son investisseur selon ce qu’on cherche à faire.
« Un fonds privé de capital de risque est là pour faire du rendement rapide, rappelle-t-il. C’est bien pour obtenir de l’argent rapidement, mais ça peut venir avec des droits faramineux à accepter — comme des droits de liquider ou de déménager l’entreprise. Alors que des investisseurs institutionnels québécois ou canadiens vont plus avoir à cœur le développement économique. »
Selon lui, l’entrepreneur devra également bien structurer son financement. « Il est trop risqué pour les investisseurs de s’engager dans une entreprise non structurée. Le travail de l’avocat va donc consister à la rendre attrayante sur le marché des investisseurs. »
Ils vont ainsi examiner la structure du capital-actions — en s’assurant par exemple que les droits liés aux actions de l’entreprise ne sont pas trop onéreux, ce qui pourrait décourager les investisseurs —, mais aussi la structure juridique de l’entreprise. Un avocat s’assurera par exemple que les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) sont respectés ou que la protection des informations personnelles est adéquate.
Des contacts précieux
Une autre raison pour le fondateur d’une entreprise de faire appel à un avocat est son réseau étendu. « On va le connecter avec des investisseurs, des fonds et différents joueurs de l’écosystème », explique Me Tomicic.
Un atout de taille que confirme Me El Haskouri, lui-même en contact tant avec des investisseurs privés que des clients institutionnels. « Notre connaissance approfondie du modèle d’affaires de l’entreprise ou de la technologie et du produit développés fait que nous sommes très bien placés pour déterminer comment on peut l’intégrer à ce réseau. »
Néanmoins, il faut faire preuve de prudence, nuance Me Marie-Eve Ferland, associée à Novalex. « On peut diriger les entrepreneurs et leur offrir des pistes, mais on ne joue pas aux entremetteurs, afin notamment d’éviter les situations de conflit d’intérêts. »
Faire appel aux avocats en amont
Une erreur répandue est de faire appel aux avocats une fois que les fonds sont sécurisés, alors que les entrepreneurs devraient le faire avant même d’accepter les modalités de la lettre d’intention des prêteurs ou des investisseurs, fait remarquer Me Tomicic.
« Souvent, le client se retrouve avec des conditions plus ou moins intéressantes pour la société et ça peut être très difficile de les réorienter en sa faveur ».
Types de remboursement trop lourds, clauses qui interdisent l’émission d’actions, etc. : autant de choix que l’avocat aurait pu mieux négocier, ajoute Me El Haskouri. « En préparant de bonnes bases, le but est toujours le même : s’assurer de l’attrait de l’entreprise pour les prochains investisseurs. »
La structure de financement d’une entreprise en démarrage est telle que plus on avance dans les rondes de financement, plus il est difficile de convaincre un nouvel investisseur. Selon l’associé chez Lavery, la perspective de rendement est moindre en raison de la valorisation de l’entreprise. L’investisseur va alors vouloir se protéger davantage et, donc, se montrer plus exigeant.
À ce stade, l’avocat est encore un partenaire de choix, fait valoir Me Ferland, qui a représenté tant des investisseurs que des entrepreneurs. « Je connais les deux côtés de la médaille, note-t-elle. Lors de la négociation d’une transaction, je serai capable de comprendre les besoins des deux parties, mais aussi d’anticiper les points de négociation. »
Elle confirme l’importance d’être conseillé par un avocat avant de solliciter un investisseur. « C’est un marché compétitif. Quand il magasine son financement, l’entrepreneur n’a pas mille chances de bien paraître. »