Si la règle de distanciation physique ne peut pas être respectée, des équipements de protection individuelle doivent être fournis. (Photo: 123RF)
ESPACES DE TRAVAIL. Tous les employés de l’agence de recrutement GoRockIt disposent d’un poste de travail dans un espace à aire ouverte, situé dans un bâtiment centenaire du centre-ville de Montréal. Même le patron, Cyril Moreau, y a sa place. À quelques semaines de la rentrée, ce dernier envisage un retour au bureau après cinq mois de télétravail, mais pas dans les mêmes conditions que celles qui prévalaient avant la COVID-19.
«On est des people person, note l’homme d’affaires. On parle ou on rencontre des gens toute la journée. À distance, c’est différent. Quand on est ensemble, on partage des informations sur le coup. Le niveau de réactivité est beaucoup plus élevé et on peut cibler plus rapidement le profil des candidats pour nos clients.»
Il y a un an, l’agence spécialisée dans l’embauche de professionnels des technologies de l’information et de marketing numérique a réaménagé ses espaces de bureaux. Les travaux ont entraîné une réflexion sur la dynamique d’équipe. Cyril Moreau a occupé un bureau fermé pendant un mois à la suite du chantier, mais il s’est ravisé. Il a déménagé son poste de travail dans la zone à aire ouverte pour se rapprocher de ses employés.
«Je me sentais exclu. Je n’avais pas le sentiment de faire partie de l’équipe», avoue le président, qui a toujours travaillé dans une aire ouverte depuis le lancement de son entreprise, il y a six ans.
En réinstallant son poste de travail dans l’aire ouverte, Cyril Moreau a constaté la différence : la communication avec ses sept employés s’est améliorée et la cohésion du groupe a été bonifiée. Quand il songe au retour prochain au bureau, c’est la collaboration efficace qui prévalait au sein de son équipe avant la pandémie qu’il veut retrouver. «On est conscient qu’on ne pourra pas revenir en arrière, admet-il, mais si on se réunit au bureau deux ou trois jours par semaine, on pourrait travailler ensemble pour faire avancer des dossiers.»
Faire évoluer les aires ouvertes
La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) a donné des directives claires aux entreprises en ces temps de pandémie : les employés doivent être à deux mètres les uns des autres en tout temps, ce qui risque de mettre fin aux aires ouvertes où les travailleurs étaient au coude-à-coude. Si la règle de distanciation physique ne peut pas être respectée, des paravents doivent être fixés entre les postes de travail ou des équipements de protection individuelle (masques et lunettes) doivent être fournis.
Les consignes sanitaires sonneront-elles le glas des aires ouvertes ? Le directeur du programme d’architecture intérieure à l’Université de l’Australie du Sud, Andrew Wallace, n’y croit pas. Dans un article publié en juin dans le média électronique The Conversation, il avance que «les espaces à aires ouvertes devront évoluer et être recentrés sur leur véritable objectif qui est d’être un espace collaboratif». Un équilibre devra selon lui être trouvé entre le télétravail – qui demeurera – et le travail au bureau, qui permettra aux employés de collaborer plus étroitement. La gestion des horaires rotatifs sera primordiale, d’après Andrew Wallace.
Revoir les espaces de travail partagé
L’évolution des aires ouvertes passera-t-elle par un recours plus marqué à des espaces de travail partagé (coworking) par les entreprises ? Le fournisseur canadien de bureaux partagés Espace iQ, dont les membres réclament généralement des aires ouvertes, constatait en juillet que ses clients veulent de plus en plus des bureaux qu’ils peuvent occuper «au besoin».
La location d’un tel espace de travail entretenu selon un horaire flexible «est plus efficace, pratique et rentable pour les entreprises», croit le cofondateur, président et chef de la direction d’Espace iQ, Kane Willmott. Il souligne que son entreprise – qui doit ouvrir un nouveau centre à Montréal le 1er septembre dans l’édifice Sun Life – a dû revoir ses services pendant la pandémie de COVID-19. «Nous avons révisé nos forfaits en ajoutant plus de flexibilité afin de répondre à la demande», indique-t-il.
Les aires ouvertes ne sont donc pas sur le point de disparaître. Au contraire, elles semblent adaptées à la nouvelle réalité pandémique.