Bas-Saint-Laurent: nouvelle poussée de croissance pour Berger
Pierre Théroux|Édition de la mi‑février 2019Valérie et Mélissa Berger
FOCUS RÉGIONAL: BAS-SAINT-LAURENT — Plus de 55 ans après sa création, Berger est à l’aube d’une nouvelle poussée de croissance. Cette entreprise familiale, qui cultive et transforme la tourbe en mélanges horticoles pour des producteurs en serre et autres professionnels, a en effet annoncé l’an dernier des investissements de 23,5 millions de dollars afin de poursuivre son expansion.
Cette injection d’argent, qui s’échelonnera sur une période de trois ans, servira notamment à augmenter sa capacité de production, de même que ses activités de recherche et développement. La construction d’une nouvelle serre dédiée à la R et D facilitera le développement de nouveaux produits et marchés.
« On veut se diversifier davantage. On vise toujours les marchés des fruits, légumes et plantes horticoles, mais on veut développer des produits plus adaptés pour des secteurs émergents comme la culture biologique ou le cannabis », précise Valérie Berger, la co-présidente directrice générale qui, au début 2016, a pris la relève avec sa sœur Mélissa de l’entreprise fondée en 1963 par leurs grands-parents qui exploitaient des tourbières.
L’innovation est d’ailleurs au cœur du développement de l’entreprise. Berger a notamment été le premier producteur nord-américain à introduire la fibre de bois dans sa gamme de mélanges horticoles. Cet additif, qui fournit une meilleure capacité de rétention de l’eau et un développement racinaire plus rapide, permet aux serriculteurs de réduire leur temps de production.
« On travaille toujours au développement de nouveaux intrants dans nos mélanges de tourbe pour offrir de nouveaux produits ou améliorer leur efficacité », souligne Valérie Berger.
Nouvelle usine au Manitoba
L’entreprise de Saint-Modeste, près de Rivière-du-Loup, projette aussi la construction en 2019 d’une usine de production de mélanges horticoles au Manitoba où elle exploite déjà, depuis 2008, des tourbières et une usine de traitement de la tourbe.
« Ça nous permettra de mieux fournir nos marchés des États-Unis et du Mexique », fait valoir Mme Berger. L’entreprise possède aujourd’hui 13 sites de récolte au Québec, au Nouveau-Brunswick et au Manitoba, de même que 8 usines de transformation au Canada et aux États-Unis (au Texas et en Californie). Ses produits sont distribués dans quelque 20 pays.
La croissance de Berger passe aussi par l’acquisition d’entreprises. En 2017, pour assurer son approvisionnement en tourbe, elle avait fait l’achat de Tourbière Henri Théberge, une tourbière voisine de son site de Saint-Modeste qui a été créée en 1962. En 2011, Berger avait acquis l’entreprise californienne Sun Land Garden Products, lui permettant ainsi de faire son entrée sur le marché de l’ouest des États-Unis et de poursuivre son expansion au Mexique.
L’entreprise, qui emploie 650 personnes, dont près de la moitié dans la région du Bas-Saint-Laurent, entend donc poursuivre sur la lancée qui lui a permis de doubler ses revenus au cours des cinq dernières années. « Ma sœur et moi souhaitons poursuivre le rêve de nos grands-parents », dit Valérie Berger, dont le père Claudin et son oncle Régis avaient repris le flambeau de l’entreprise familiale au début des années 1980.
Berceau de la tourbe horticole
Le Bas-Saint-Laurent est d’ailleurs réputé pour la culture de la tourbe où les activités de récolte s’effectuent depuis plus de 75 ans. Outre Berger, la région regroupe d’ailleurs une concentration d’importants producteurs et transformateurs comme Premier Tech à Rivière-du-Loup ou Tourbières Lambert à Rivière-Ouelle.
« La ressource est très abondante dans la région qui est un terreau fertile pour les tourbières », explique Stéphanie Boudreau, directrice de l’Association des producteurs de tourbe horticole du Québec (APTHQ), dont les bureaux sont d’ailleurs situés à Rivière-du-Loup.
Le Bas-Saint-Laurent produirait près de 50 % de la tourbe récoltée au Québec, alors que l’industrie est également présente dans les régions de la Côte-Nord et du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Le Québec représente pour sa part quelque 30 % de la production annuelle de quelque 1,2 million de tonnes de tourbe au Canada qui, par ailleurs, est l’un des plus importants producteurs au monde. Les États-Unis importent 85 % de la production canadienne.
« La tourbe de sphaigne est principalement utilisée pour ses propriétés horticoles », explique Mme Boudreau qui dirige également le créneau d’excellence portant sur la tourbe et l’agroenvironnement dans le Bas-Saint-Laurent.
La tourbe, qui est utilisée comme composante principale des substrats de croissance ou comme amendement de sol, a des propriétés qui aident à stimuler la croissance des plantes et le développement des racines. Elle a notamment la capacité d’alléger les sols argileux et d’améliorer leur porosité.
Les propriétés de la tourbe de sphaigne en font également un matériau de choix pour la biofiltration et dans le traitement des eaux usées. La tourbe peut aussi être utilisée comme absorbant écologique pour nettoyer les déversements d’hydrocarbures à la fois sur la terre et sur l’eau.