Grâce à la 5G, les municipalités pourraient par exemple être capables de modéliser leurs villes en 3D, de manière à se doter d'une jumelle numérique. (Photo: 123RF)
FOCUS RÉGIONAL: CAPITALE-NATIONALE. Pour l’oeil non avisé, l’antenne qui trône sur le toit d’un immeuble du Parc technologique du Québec métropolitain ressemble à toutes les autres. Pourtant, elle promet d’être à l’origine d’une véritable révolution dans les prochaines années : celle du 5G.
Depuis son installation, en 2019, cette antenne expérimentale permet à des dizaines d’entreprises de la région de la Capitale-Nationale de mettre à l’essai la cinquième génération de réseau cellulaire. Le but : faciliter le virage massif anticipé vers cette technologie de rupture – elle devrait notamment faciliter l’avènement des voitures autonomes et de l’Internet des objets.
Pour réaliser gratuitement des tests et des expérimentations grâce à cette infrastructure, les PME intéressées ont dû déposer un appel de projets. Plus de 150 d’entre elles se sont prévalues de ce privilège. «C’est une réponse qui va bien au-delà de nos attentes», se réjouit Luc Sirois, directeur général de Prompt, un consortium de recherche industrielle chargé de piloter Encqor, un projet de déploiement d’un réseau précommercial de télécommunication sans fil 5G dans l’axe Québec-London. L’initiative est financée à hauteur de 400 M $ par les gouvernements du Canada, de l’Ontario et du Québec ainsi que par Ericsson, Ciena, Thales, IBM et CGI.
On prévoit que plus d’un millier de projets novateurs de technologies de l’information et de la communication (TIC) seront réalisés d’ici la fin d’Encqor, en 2022. «Ce projet donne les moyens à des entreprises visionnaires de développer le monde de demain. Grâce à la 5G, les municipalités pourraient par exemple être capables de modéliser leurs villes en 3D, de manière à se doter d’une jumelle numérique», illustre Luc Sirois.
Moteur économique
Que Québec soit l’un des deux seuls endroits dans la province où une antenne expérimentale a été installée – l’autre est à Montréal – en dit long sur la place qu’y occupent les TIC. Selon Québec international, l’agence de développement économique pour la région, on dénombrait 412 entreprises dans le domaine en 2016. Celles-ci étaient responsables d’environ 15 000 emplois et généraient un chiffre d’affaires de 2 milliards de dollars, soit 4,1 % du produit intérieur brut régional.
La Ville de Québec pour sa part se targue d’être une ville branchée sur les besoins de ses citoyens, grâce à des technologies comme Nomade, qui permettent le suivi en temps réel du réseau de transport en commun, et maintes infrastructures intelligentes. La Ville s’est d’ailleurs classée dans le top 7 mondial des villes intelligentes en 2012, lors du concours annuel de l’Intelligent Community Forum.
Depuis, elle a continué à innover pour se maintenir dans ce peloton de tête, comme en témoigne sa participation au Défi des villes intelligentes, lancé en 2017 par Infrastructure Canada. À l’occasion de ce concours auquel 130 collectivités de partout au Canada ont déposé leur candidature, Québec a entrepris une profonde réflexion sur la place des TIC dans le quotidien de ses citoyens. L’enjeu, il faut le dire, était de taille : 50 M $ étaient décernés au grand gagnant.
Sus aux inégalités sociales en santé
«Nous sommes allés à Lyon pour nous inspirer des travaux qui y sont réalisés depuis plusieurs années, en plus de nous inspirer des approches des villes d’Angers, de Nantes et de Tallinn, en Estonie. Au bout de ce processus, nous avons fait de la lutte aux inégalités sociales en santé notre cheval de bataille», raconte Pierre-Luc Lachance, conseiller municipal et adjoint du maire pour l’entrepreneuriat à la Ville de Québec.
Québec s’est rendue jusqu’en finale du Défi des villes intelligentes, où elle s’est néanmoins fait doubler à la ligne d’arrivée. La vision qu’elle a articulée dans le cadre de ce concours est malgré tout appelée à teinter ses décisions dans les prochaines années.
«Disons que la notion d’inégalités sociales en santé trouve une résonance particulière en ce moment, avec la crise de la COVID-19. Plus que jamais, nous sommes conscients qu’il faut développer à échelle beaucoup plus humaine, de manière à ne pas perpétuer les iniquités», affirme Pierre-Luc Lachance.
Dans les prochaines années, il est par exemple question de verdir certains secteurs clés de la ville, considérés comme des îlots de chaleur, et d’élargir les trottoirs, facilitant ainsi la vie des personnes à mobilité réduite. Comme quoi la notion de ville intelligente ne se résume pas qu’à des questions de technologies.
Sehl Mellouli, directeur du Centre de recherche sur les communautés intelligentes à l’Université Laval (Photo: courtoisie)
«Il n’existe pas de définition de la ville intelligente qui fait consensus – certaines ne font même pas écho à la technologie. Il faut plutôt la voir comme un outil pour mieux servir et répondre aux besoins des citoyens, en tout respect du contexte propre de la ville», commente Sehl Mellouli, directeur du Centre de recherche sur les communautés intelligentes à l’Université Laval.